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La Galopade '.
Les airs relevés prouvent autant la fouplefle & la
foumifîion du cheval dreffé, que les progrès, l’attention
& la fineffe du cavalier inflruit. Un élève ,
qui les demande avec intelligence & précifion ,
femble dire aux fpeâateurs : On m’a li bien initié
dans l’art d’apprécier & de régler les différents
mouvements du cheval , que toutes fes aéfions
m’appartiennent» En balançant adroitement les
puiflancesaéfives de mes jambes égales parla re-
-, tenue motivée de ma main , j’ai fçu refferrer le pas
d’école , quoique déjà cadencé, jufqu’à l’élever au
tride du paffage. -N’eft-ce pas à la même addition
des demi-arrêts que je dois la fubftitution ingé-
nieufe du piaffer au martier en placé ? Eh bien ,
nonobftant la dépofition de ces vérités, fi vous
n’ètes pas encore perfuadé del’efficacitédes moyens
que l’équitation employé pour enchaîner la volonté
du cheval, la galopade va vous convaincre qu’il eft
poffible d’engager ce même cheval à prendre, en
s’élevant, l’efpace qu’on lui refufe en s’étendant.
Ce que c ejl que la Galopade.
La galopade , autrement appeliée le galop de
manège , offre une répartition abfolument conforme
à la combinaifon qui crée le galop ordinaire.
Même préparation , même exécution. Mais l ’allure
diffère d’avec I’oir par l'étendue du terrein qu’ils
embraffent. En effet, à la galopade , au moyen
d’un raffembler plus e x a â , l’arrière-main enlève
davantage l’avant-main : elle le retient auffi plus
long-temps au centre : enfin elle l’en décoche plus:
lentement qu’au galop ; enforte que le cheval , qui
' le rabat d’une manière plus écoutée, marque dif-
tinâeme'nt une rnefure à trois temps, dèlicieufe
pour les oreilles fènfibles & délicates , dont la!
jambe de devant du dedans fait entendre le premier
temps ; dont les jambes.de devant du dehors
& de derrière du dedans battent enfemble le fécond
; & dont la percuffion de la jambe de derrière^
<lu dehors frappe le troifième.
Comment on embarque un cheval à la galopade. ;
Puifque , du galop accourci, on fait la galopade
élevée,; à quoi ferviroit de retracer ici tout ce qui
eft écrit dans la quatrième leçon des éléments. Il]
vaut infiniment mieux, fuivantmoi, remettre fous
les yeux de mes leéleurs les points d’appui que
prend forcément un cheval qui galope, quelle que
îbit la diftance & la direéfion de l’allure , afin de
choifir avec discernement parmi les airs qu’on a
premièrement efquiffés au pas d’école,dont on a
lait énfuite une heureiife répétition au paffage ,
ceux q u i, fans nuire aux enlevers du bipède de
devant, favorifent les chaflèrs du bipède de der-
yiêre. Or - nous avons invariablement éprouvé que
les malles ne refluent du dedans fur le dehors pendant
la préparation du-galop, que pour fluer avec
jdus d’abondance du dehors fur le dedans pendant
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l’aélion. En confêquence toutes les évolutions oïl
le cheval exécute de dehors en dedans, c’eft-à-dire
où les deux jambes du dehors chevalent alternativement
celles du dedans, fympatifent avec la double
répartition du galop. En effet, fi la jambe de
devant du dedans , arrivée la première à terre pour
y attendre le retour des maffes lancées du dehors
fur le dedans , fert alors de pivot à la' jambe de devant
du dehors; d’après la feule combinaifon du
galop, la jambe de derrière du dehors fe précipite
deffous le centre , & par-deffus celle du dedans ,
pour y recevoir les maffes enlevées du dedans fur
le dehors.
Quelles font les évolutions que le cheval peut répéter
à la galopade , avec la : définition & exécution des
paffades.
Le cheval peut donc entreprendre, à la galopade
, Y air intitulé la hanche, ou les deux bouts
en dedans. 11 peut auffi changer & contre-changer
de main fur deux piftes. Il peut encore arrondir une
volte entière, en décrire feulement la moitié, ou
bien exécuter au galojxle quart de volte, comme
on a coutume de le tracer au pas d’école & au paffage
, ce qui conftitue la demi-volte à pirouette.
Enfin il peut galoper, & très-fûrement, la tête au
mur. Au lieu que tout s’oppofe à èe que le cheval
fe livre à l’épaule en dedans, au renverfement d’épaules
; & même, qu’en galopant, il effaie de la
croupe au mur , quoique la figure en foit deffinée
de dehors en dedans , à moins cependant qu’il
n’aille & vienne en paffades. Les combinailbns ré-
trogradées de l’épaule en dedans & du renverfement
d’épaules ont une affinité fi palpable avec les
erreurs du galop , qu’elles préfentent abfolument
des dangers égaux, ce qui me difpenfe d’étayer
leur exciufion par aucun raifonnement. Mais je
dois à me$ leéleurs les motifs du refus conditionnel
que je fais de la croupe au mur pendant la galopade.
Outre rimpoffibilité phyfiquement avérée de
divifer cette leçon ayec des changements de main
connus & ordinaires, je me fonde fur l’obligation
étroite où le cheval fe trouve de ne prendre les
coins qu’en fouettant les hanches : obligation à laquelle
il ne peut fe foufiraire, telle régularité qu’il
obferve fur la longueur des pifles, par la raifon
que la croupe file le long du mur. Il réfulte effectivement
de cette pofition inverfe , que plus un
galopeur entretient, à la croupe au mur, le plan
oblique de fes deux bipèdes, lorfqu’ils fraient de
deux piftes, & du dehors fur le dedans , les quatre
parallèles du manège, plusla prife des coins l’expofe
à fe coucher fur le dehors , puifque, quatre fois
par tour de manège, le cheval eft dans la fâcheufc
néceffité de rabattre le bipède de devant du dedans
fur le dehors, afin que le bipède de derrière, en
fe diligentant feul du dehors fur le dedans, trace
exclufivement le deflin des angles; La fècurité renaît
quand on a la précaution de mener en paffades.
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Mais diront quelques lecteurs, faites-nous donc
conno'ître ces paffades tant précomfees. |
Les paffades de manège font des allées & venues
d’un mûri l’autre , qu’on fait reitérer au cheval
en le menant & le ramenant toujours fur une
même longueur, & fans le changer de combmat-
fon ; confequemment, fans lut permettre, ni le
paffage d’aucun coin , ni la traverfee d aucune diagonale
Cette explication dévoile 1 intention de
nos premiers maîtres., dont le b ut, en créant les
paffades, étoit plutôt de donner une fuite à la
croupe au mur, que de former un nouvel air de
manège : témoin l’exemple bien récent que nous
en fournit la dernière leçon du travail terre-à-terre, j
où le cheval reftoit à la même main, fans le fecours j
d’une paffade prolongée. En effet , les paffades ;
étant privées de toute efpèce de combinaisons par- j
ticulières, ne font, à vrai dire, que des répétitions !
affez mefqHinès des airs dont elles offrent l’image ,
tantôt à la première , tantôt à la fécondé main. :
Mais voyons à nous en fervir pendant que le cheval
galope la croupe au mur, pour efquiver , & la
prife des coins, & les changements de main.
On conçoit que les paflades dérangeroient infailliblement
le plan des leçons auxquelles on les
adapte, fi elles n’avqient pas également lieu fur-
une & fur deux piftes ,& , encore, fi elles ne fup-
portoient pas indifféremment tous les degrés d’action
que les airs de manège peuvent parcourir.
Auffi, exécute-t-on des paffades au pas d’école : les
demande-t-on au paffage : les incorpore-t-on à la 1
galopade , ( ce font ces dernières que les anciens
auteurs appellent des paffades furieufes à la fran-
çoife ) ; le point effentiel eft de retourner affez
promptement le pli de l’eucolure , avant què de
ramener le cheval fur lui-même, pour qu’il re- '
vienne dans une répartition intérieure, & avec une
combinaifon extérieure tout-à-fàit femblable à celle
qu’il avoit en allant. Au furplus,je trouve qu’un
élève fait autant preuve de goût, quand j l s’abf-
tientde paffader au pas d’école & au paffage, qu’il
montre de favoir , lorfqu’il redoute les paffades à
la galopade, où la plus légère omiffion du cavalier
diftrait * comme la moindre réticence du cheval
inquiet occafionne des chûtes promptes & prefque
inévitables.
D e s g r a n d s a i r s ,
ou airs relevés.
_ Tous les exercices gymnaftiques fe terminent
ordinairement par certains tours de force, plus brillants
qu’utiles, qu’oi\regarde néanmoins comme le
fceaudu grand talent. L’équitation n’eft pas exempte
de pareilles effervefcences, & ce font les bonds
réglés d’un fauteur en liberté qui compofent la
troifième & dernière claffe des airs de manège ;
enforte qn on franchit, avec les grands airs , cette
même carrière bu Ton a paifiblement débuté par
les éléments» Telles défordonnées que paroiffent
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les a fiions impétueufes du cheval qu’on excite à
fauter en liberté, l’art fait • lui faire refpeâer les
lois naturelles , & les grands airs, au lieu de pré-
fenter les réfultats diffus d’une imagination égarée,
confervent entre eux une hyérarchie méthodique ,
dont voici la nomenclature, l’enchaînement & la
defcription.
Le cheval a la faculté d’exécuter fept fauts différemment
combinés ; fçavoir, la -pelade, la courbette,
le mezair, la croupade , la ballotade , la cabriole
, le pas & le faut, autrement appellé le galop
gaillard.
La Pefade.
On reconnoît la pefade, premièrement à ce que
le cheval, cramponné fur l ’arrière-main , enlève
très-haut l’avant-main ; fecondemcnt, en ce qu’il
entretient la pofition perpendiculaire de fa tête ;
troifièmement, à ce qu’il retrouffe avec foin les
deux jambesde devant, en ployant également les
deux genoux ; quatrièmement, à ce qu’il rabat le
bipède de devant, fans que le bipède de derrière
change de place.
La Courbette.
Le cheval qui fait une courbette enlève l ’avant-
main avec les mêmes précautions j. mais un peu
moins haut qu’à; la pefade. Lorfqu’il ramène à terre
les deux jambes de devant, on voit celles de derrière
couler enfemble deffous le centre, afin de
fournir une nouvelle alfiette à i’avant-main que le
cheval élève pour une fécondé courbette, & ainfî
de fuite.
Le Mc^air.
Si le nom de ce troifième des grands airs annonce
qu’il eft mixte, fon rang indique qu’il tient
du premier & du fécond. En effet, au mézair , ou
moitié air, 1 avant-main s’élève comme à la pefade
, & auffitôt que le bipède de devant revient à
ferre, le bipède de derrière, qui s’élève à fon tour „
& parvient prefqu’au même niveau , n’engliffe pas
moins deffous le centre comme à la courbette, &
avec le même but. En conféquènce le mézair porte
le cheval en avant par une efpèce de galop à deux
temps alternativement égaux.
La Croupade.
La croupade eft un faut où le cheval bondit a fiez ?
haut pour enlever les quatre jambes à-la-fois , &
les tenir un inftant cachées fous fon ventre, en
; ployant autant les genoux que les jarrêts.
La Ballotade.
Le balloteur fait un bond femblable.à celui de la
croupade. La différence eft , qu’a près avoir re-
trouffé les quatre jambes , le cheval fe contente de
laiffer defibus lui celles de devant-, & qu’il préfente
les deux pieds de derrière, comme s’il étoit