
ber la conflnxffion. « Comme j’ai déjà dit que le feul
» but que je me fois propofé dans cet ouvrage,
v dit-il, n’eft que le lervice-de mon roi & l’uti-
5» lité de fes fujets , mes compatriotes,il ne faut pas
»> que je déclare mon fecret d’une manière qui,
v contre mon defîein , puiffe fervir aux ennemis de
» l’état ; il n’efl pas jufte de fe faire battre de fes
33 propres armes , 8t d employer,pour fon fupp-lice
91 ies inftrumerus de fa gloire. Je me contente donc
de faire favoir à ceux qui voudront fe fervir de
» mes machines, qu’ils n’ont qu’à me venir trou-
m ver. Je promets de leur donner en même temps
3> mes machines & le fecret pour s’en fervir. L’u-
« fage en eft aifé & les commodités agréables »..-Le
chevalier a filtre enfuite avoir fait l’expérience de
cette machiné'au-defibus du pont rouge, en pré-
jfence d’une multitude de fpeâateurs de touts les
ordres. Louis XIV fut lui-même témoin de cette
merveille, & ce prince accorda à fon auteur des
lettres-patentes, qui lui permettoient de faire construire
& de -vendre fit machine, à l’exclufion de
tous autres mèchaniciens. MM. d’Etrées & de
Sainte-Co!embe font cités dans l’ouvrage du chevalier
de Lanquer, pomme des témoins capables de
juger du mérite de fa découverte.
M. l’abbé de la Chapelle qut, comme moi, a vu
cet ouvrage, n’y a trouvé qu’une pure annonce ,
fans aucunes traces de récompenfe accordée par
Louis XIV , auquel une telle machine eut cependant
s N A c e r .
33 qu’il en pourra faire, ce qu’il né fâtrroit fans dan-
paru, fort précieufe.
Voici les termes mêmes des lettres-patentes du
12 avril 1695 , accordées au chevalier de Lanquer.
« Louis , &c. notre bien amé le fieur Richard^
s i Lanquer, chevalier de l’ordre de Ghrrft, & capita
in e de chevaux légers , entretenu pendant la
93 paix pour le fervice du roi de Portugal, nous a
» très-humblement remontré r que par fes foins &
» fon application il auroit inverrtéune machine qui
s> fe peut porter dans la poche , pour paffer fur les
» eaux de quelque rivière ou lac que ce foir, un
9» foldat armé des armes ordinaires, portant fur foi
33 de quoi tirepp-lufieurs coups, & du pain de mu-
33 nition pour fa fubfiftance de huit jours , fans qtie
«dans ledit paffage lefdites armes & munitions de
3) guerre & de bouche foient endommagées- par
>> l’eau, de quoi ledit fieur Lahquer auroit fait'l’é-
37 preuve en notre préfence fur la rivière de Seine ;
37 ce qui encore peur utilement fervir fur mer, &
s? fauver la vie aux paffagers & gens de marine ,
37 en cas de naufrage , de même que là matière
97 dont elle eft compofée, à faire dés bas, panta-
37 Ions, cafaques, manteaux, bonnets , couvertu-
37 res de chevaux & mulets , tours de lit pour la
37 campagne & tentes impénétrables à- l’eau ainfi
37 qu’au froid, comme îl nous a auffi fait voir y
37 defquels effets étant pleinement fatisfait & per-
s> fuadé , & defirant ne pas fraftrer le public m s
37 l'avantage qui peut revenir de la? pratique de ces
37 chofes , non plus que Fexpofant de l’utilité par-
si tiçulière qu’il a droit d’en prétendre parle débit
77 g.er de rendrè fon fecret connu, s’ilii'avoit (ur
77 ce nos lettres néceffaires. A ces caufes, voulant fa-
>7 vorablement traiter ledit fieur de Lanquer , nous
» lui avons permis , & par ces préfentes fignées de
77 notre' main , permettons exclufiveraent à tout
v autre de conftruire ou faire conftruire ladite ma-
7> chine, en tel nombre, & par tels ouvriers- qu’il
77 avifera , &c. 77,
Le même auteur foupçonne que l’air étoit la
principale matière de fa ,compofition , & que les
habits dont il revêtoit fon nageur , étoient faits de
plume oit de duvet, objets que ; l’eau ne pénètre
pas. Mais , comme l’obferve encore l ’auteur du
Scaphandre-, une pointe une aiguille , une épée,
une balle de fufil, &c. , pouvoient rendre fubite-
ment inutile, dangereufe même , une telle machine
à vent; & l’es habits de duvet feroient d'une exécu*
tien très-difficile & très-difpendieufe,
C u ira ffe d e AL B a c h jlr om .
En 1741,1e fieur Jean-Frédéric Bachftrom , doc*
teur en médecine, & directeur,général- des fabriques
de la ducheffe. de Radziwill, grande chance-
liere de Lithuanie , fit imprimer un ouvrage de 70
pages , fur l’a id e nager. Cet Allemand allure
avoir été porté^à'compofer ce petit ouvrage par la
Cgnification de fon nom , que Fon rend dans-notre
langue par co u ra n t d ’ u n ru ïf fe a u . Quoi qu’il en foit
d’un tel motif, que l’auteur eût paffé fous filence
fans inconvénient, il eft certain que fon ouvragé
contient des vues faines & de fort bonnes idées
fur l’art de voyager fous l’eau. Après’ , plufieurs
épreuves dont il rend compte , il trouva enfin le
moyen de conftruire une cuiraffe de liège propre
à le foutenir fur l’eau, & à faciliter à des armées
entières le paffage des rivières les plus larges, les
plus profondes & les plus rapides. Cette cuiraffe,
dont le poids doit être: d’environ dix livres , eft
compofée de deux plaques de liège, appliquées fu r
leidos, fans defeendre plus bas que les reins , Ôc
de deux autres fur la.poitrine, croifées en; formé
de camifole , qui ne pafienr pas la ceinture.- On y
en ajoute quelques morceaux fous les aiffelles &
fur les épaules ÿ &-toutes ces pièces,. enveloppées
entre deux;groffestoiles , forment parleur réunion
une cuiraffe qui vous foutient tour droit dans l’eau.
Pour empêcher que cette cuiraffe , agitée par la violence
des flots , ne vienne à vous incommoder les
aiffelles & le menton , vous l’attachez à la ceinture
d’un grand pantalon y qui defeend jufqu’au défions
des pieds.. Si vous deftinez cet habit aux foldats,
laiffez-en les plaques entières. Les balles de fufil ne
pourront les entamer mais fi vous le préparez
pour les matelots , il eft effemrel de rompre le
liège en morceaux , afin- qu’ils puiffent fe prêter
aux différents mouvements qu’exigent leurs manoeuvres.
Avec cet accoutrement ,. dit l’auteur-,
vous ferez aflis commodément fur l’eau., & vous
flotterez au milieu même des tempêtes comme un
t ’ i S T D
■ Canard, ou comme un enfant qui repofe dans fori
berceau; & fi votre voyage eft de longue durée,
il' vous fera permis de vous repofer , de dormir
même dans le feiri des flots.
Voulez-vous, ajoute Mv Rathftrom, faire paffer
une rivière à plufieurs efeadrons de cavalerie ? attachez
cinq livres de bois de liège derrière la- Celle
de chaque cheval, & autant par devant. Cette précaution
même fera inutile, puifque les chevaux nagent
naturellement, fir le cavalier, revêtu dé fa cuiraffe
de liège:, eft allez habile pour fe jetter à propos
dans la rivière, & pour y marcher en tenant
fon cheval par la bride. Jé vous promets que , dans
cet état, il pourra paffer le Danube à la nage, pu
toute autre rivière large & rapicFe.-
Soubrevejle du jîeur Bonal.
Quelque temps après Bachftrom , le fieur Bon'al
citoyen de Dieppe , imagina une foubrevefte de
liège, dont l’objet étoit de préferver les marins
d’une mort qui ne les attend que trop communément
dans les flots. Si l’on en croit M. l?abbé de la
Chapelle, qui a ru de ces fortes de feaphandres ,
le fieur Bonal, fans- aucune connoiffance- de la
phyfique, de l’hydroflatique , ni des mouvements
du corps humain, lês avoir formés fans principes
& fans aucun jugement. Quoi qu’il en foit de cette
critique-, peut-être trop amère de la part d’un auteur
qu’on a aeeufé d’avoir profité des lumières du
fieur Bonai , il eft certain: que M. le marquis de
Cruffol d’Amboife, dont la candeur & l’honnêteté
fontaufli connues que fon profond favoir, n’a pu
fe difpenfer d’avouer, après avoir effayé en 1759
Fune de ces foubreveftes, qu’à la longue on feroit
incommodé de fa fufpenfion. Des officiers du régiment
de la Reine, infanterie, dont il étoit alors
colonel, eflayèrentaufirce eocfeletenfa préfence,
& penfèrem-faire la culbute.
Ifahit de mer de M. GelacU
Les regiftres dé l’académie des fciences du 30
jui'let 1747 » contiennent une efpèce- de differta-
tion , dans laquelle M. Gelaci propofe des moyens
de fe foutenir fur l'eau. L’habillement qu’il a imaginé
à cet effet , n’eft qu’une efpèce de gillèt,- revêtu
de morceaux de liège équàrris, placés comme
le font les écailles-dé poiffon’, & attachés par une
petite face for laquelle ils püifient fo mouvoir comme
fur une charnière. Cette difpofition de différen--
t . N A G e r .. 437
M. Gelaci, doit être agité beaucoup fur fes charnières
tes pièces de liègë, dont le gillèt eft' hérifle, a été ;
formée ainfi-,-pour qu’elles puiffent prendre Sc con-
ferver une pofition horifontale, lorfqu’elles font
agitées par lesflbts*'M.-. l’abbé de la Chapelle trouve
plufieurs défauts dans là c'onftrtiélroiï de cet habit ;
& fes obfervations à cet- égàrd nous paroiffent fort-
fenfées. •
i°. Il eft faux que ces-m<5rceaux:de liège y diftri-
bués en manière d’écailles-, doivent flotter lïori-
fontalem-enr dans l’eàu.
20. Le liège, lorfqu’on fait ufage1 de; l’habit de’’
par les impulfions irrégulières de l’eau ; &
ce frottement parvient bientôt à bouleVerfer ces
écailles, & à caufer leur eritière deftruâion.
3,0. Ces lièges flottans & ballotés par l’eau , font
expofés à tout moment à s’accrocher à d’autres
corps , & à faire périr ainfi le nageur.
4°. Ils préfentent un trop grand nombre de fur-
faces'àl’imptilfion des eaux, & rendent le mouvement
de progreffion fort difficile. '
J a q u e t t e d e M . W i lk in fo n
Les j.aqtiettes de M. \Vilkinfon , anglois, paroifi-
fent avoir été calquées for la cuiraffe de M. Bachf*'
trom, M. l’abbé de la Chapelle, qui en a vu un*
modèle , affure qu’elles ont été faites fans principes
, & fans aucune connoiffance du centre de-
gravité du corps humain. Les nageurs, ceux au
1 moins qui favent déjà les premiers principes d©-
l’art de nager, peuventfeuls s’en fetvir. Ce juge-
, merft paroîren effet avoir été confirmé par les compatriotes
même de l’inventeur. L 'h i f io i r e d u v o ya ge -
f S i t a u to u r d u m o n d e , par Byron , chef d’efeadre
en 1764 & 1765 , nous apprend que« pendant
! 7> qu’on alloit prendre de l’eau pour la provifion
7> du vaiffeau , les matelots commandés pour cela,
>7 avoient ordre de mettre des jaquettes de liège lorfo
77 que la houle étoit forte, pour- aller & venir en-
77 nageant, des canots àJa côte de la côte aux-
33 canots. Notre commodore ne voulut pas permet-
77-tre qu’ils fe miflent à l’eau fans ce fecours, qui
17 garantit du danger de fe noyer, pourvu qu’on ait-
77 l’attention de tenir la tête hors de l’eau ; ce qui-
77 eft aifé à obferver 77. Si, comme le remarque-
l’auteur du Scaphandre , ces jaquettes euffent été
bien faites v il aurok été inutile de recommander
l’attention dé & tenir la. tête liors de l’eau.
C e in tu r e -d e l ie g t de M . U com te d e P u y f e g u r , lie u te * :
n a n tg é n é r a l d e s a rmées d u r o ïr
Nous ne connoiflbns le corfelet de liège , imaginé
au milieu de ce fiècle par M. de Puyfégur
que par le tableau qu’il en a tracé lui-même dans
une-lettre écrite le 19 fept-embre 1-7^5 , à M. l’abbè’
d;e la Chapelle. «■ L’hiver de 1-747 à 1748 , dit-il,
77 le hafôrd me f i t tomber fous la main un livrer*
33 i n - 1 1 intitulé fort improprement l 'a r t d e n a ge r.
33 L’auteur fait de bonne foi cette mauvaife plai—■
77 fanterie for le motif de fon ouvrage : il paroît ne'
77 l’avoir entrepris qu’à caufe de la- lignification de'
77 fon nom de Bachftrom , qui fignifie en langue
71 allemande: le -co u ra n t d yun r u ijfea u , à ce qu’il dit;
| ir II s’eft cru obligé de. publier les moyens de ne"
>7 jamais aller au rond de l’eau.
77 Le réfultat de toutes fes recherches Sc des ef>
77 forts de fon imagination , ne confifte que dans
>» un habillement de liège, du poids d’environ dix-
>7-Uvres, renfermé dans la toile en forme de c o r fe t v
V p o u r p o in t , cam ifo.le>9 g i l l è t , v e jle ou - cu ira jfe^ qut