
» foutient un homme dans l’eau, ayant la tête & le
j) haut des épaules dehors.
» Je penfai que Ton pouvait fe feryir de cette
il idée. L’année fuivante*je me rappellai ce projet, :
« que j’exécutai avec affez. de peine. Je fis faire un
» çorfet ou cuiraffe de liège , 8c elle p{t:©duifit 1 ef-
» fet que je m’en étois promis , mais dans l’eau
» dormante; car dans une rivière rapide, j’ai re-
>> connu que, pour fe tenir debout , fans fe mouil-
?> 1er la tête , il falloit un certain poids aux pieds ».
( M. l’abbé de là Chapelle n’approuve pas cet expédient.
Les contrepoids, dit-il fort fenfemènt, font
de nouvelles charges 8c de nouveaux foins..Si l’on
venoit à les oublier ou à les perdre, on pafleroit
fort mal fon temps dans l’eau. Le matelot qui n’au-
roit pas le temps de s’en défaire , feroit retardé
dans fes manoeuvres, parle poids accablant dont
cette efpèce de balançoire le furchargeroit, 8c le fol-
dat, fur pris par l'ennemi, en s’en défaifant, feroit
jnaffacré avant de pouvoir fe défendre ).« Je com-
« mençai alors, (continue M. de Puyfégur^), a
sj perfectionner l’ouvrage , & fis joindre aux lou-
liers deux femelles de plomb , du poids d’une
»• livre chacune,
- j> J’éprouvai un nouvel inconvénient. La cui-
svraffe tendant à remonter, 8c le corps àdefcendre,
s> elle s’élevoit fous le menton & fous les bras , de
sj faç'on à empêcher ceux-ci d’agir. J’y ai remédié ,
>j en faifant faire ce qu’on appelle à préfent un
sj pantalon. Je fis attacher des courroies à la cein-
sj ture que l’on boucloit à la cuiraffe, Par ce m oyen,
s> en entrant dans l’eau , on pouvoir plus ou moins
sj l’abaiffer . . . . On peut, en arrivant à terre , lâ-
sj cher fes courroies plus ou moins , par le moyen
»-des boucles, 8c marcher ou fe baiffer à fon aife.
jj En 1756, j’allai un jour à la rade de Granville
sven chaloupe, au moment de la marée baffe. Je
s> me jetta iM a mer avec mon corfet & le flot
sj montant me ramena au rivage fans peine, fans
» fatigue & fans avoir eu la tête mouillée. Je pris
71 feulement mes précautions , pour avoir le moins
».que je pourrois de fpe&ateurs de tout le camp
» de Granville, que je commandois alors.
jj Pour pouvoir tirer parti des armes dans l’eau ,
su,j’ai fait conftruire un bonnet, une forte de caf-
sj que de fer blanc, auquel le fufii eft attaché par la
sj fous-garde. Le bout du canon, que l’on a foin
sj de bien boucher avec du linge , pend dans l’eau ,
» & la croffe eft çn l’air attachée au bonnet, qui ,
»par faftru&ure, contient les cartouches & le linge,
»propres à charger & nettoyer le fufii.^
» Pour le faire plus commodément, j’ai arrangé
svune petite cgffe.tte de liège, doublée d’une légère
sx feuille, de plomb , que l’on traîne avec une fi-
sj celle. Cette çaffette. fert à appuyer la. croffe du
^ pendant qu’on, le charge.
j> Au lie.u de pourpoint, je me fuis à préfent
s» borné à une ceinture,de liège , large de huit pou-
» ces fur fix.d’ép.aiffeur, pefant treize livres , atta-
'çjiée également à un pantalon , ayeç trois, liyrçs
»de plomb aux fouliers. La ceinture efl aufli fou*
, j> tenue par des bandelettes au-deffus des épaules ,
jj de façon que-, fi quelque accident renverfoit le
, J» flotteur dans l’eau, cul par deffus tête , cette cein?
jj ture ne put fortir par les pieds , 8c faire-réparation
» de corps avec lui ». M. le comte de Puyfégur
ajoute , qu’avec cet habillement il a flotté en 176a
dans le bafîin de Dunkerque , en préfence du
comte d’Hérouville & du chevalier d’A r c y , 8c non-
feulement marché avec aifance dans l’eau, mais,;
encore chargé & tiré plufieurs fois fon fufii.
Machine de M, Ozanam,
M. Ozanam, membre^ de*l’académie des fcien*
ces, St profeffeur en mathématiques , propofe dans
fes récréations phyfiques 8c mathématiques , un
problème dont l’objet efl la conftruâion d’une machine
à nageri Voici l’idée de ce favant 8c judicieux
académicien. Faites deux coffres plats & demi-circulaires
, peu importe de quelle matière , pourvu,
qu’ils ne reçoivent point d’eau , qu’ils foient légers
8c affez folides pour pouvoir réfifleràla violence
des flots. Vous joindrez ces deux pièces en-
femble , 8c vous en formerez une ceinture au nageur
, qui, par ce moyen , aura toujours. la moitié
du corps au-defl'us de l’eau. On y peut ajouter , lï
on le juge à propos , des ouvertures avec des por-,
tes, pour y renfermer de l’o r , de l’argent, des papiers,
& tout ce que l’on voudroit fauver d’un naufrage
, ou faire fervir à fa fubfiftance.
Quoiqu’avec cette machine on puiffe fe porter
où l’on veut, par le feul mouvement du corps. Sc
des pieds, on peut, pour faciliter encore la pro-
greffion , attacher des efpèces de. nageoires aux.
pieds du nageur.Ces nageoires, que l’on attache à
une femelle de bois que le nageur a fous la plante
des pieds ', font compofées d’un gros puir double *>
ou triple & pliant, qui peut s’étendre pu fe reffer»
rer comme la patte d'un cygne.
Certe machine, dit M. Ozanam , peut être d’iin
grand fecours en différentes çirconftances. i°. Dans
un naufrage ; car on peut fe fauver avec cette ref-
fource au travers des flots , fans avoir plus à crain-,
drela mon qu’un oifeau aquatique. Il efl d’ailleurs,
inutile de quitter fes habits ; & l’on doit d’autant
moins appréhender la faim, que l’on peut renfermer
dans cette machine des vivres pour quatorze
ou quinze jours.
2°* Dans ces inondations fubites, qui ravagent,
les campagnes , 8c couvrent d’eau en un inflantdes.
régions entières. Cette machine feroit d’autant plus:
précieufe en de tels accidens , qu’un homme pour-
■ roit fauver avec lui un1 ou deux de fes enfans. 30,
Cette découverte feroit aufli d’une grande utilité à
•: une armée , pour faire paffer fes efpions, fans danger,
d’iiii bord à- l’autre, 40. Enfin , M.. Ozanam
ajoute qu’on pourrait aufli l’employer à exécuter
; fur l’eau quelques -évolutions agréables , fous des;
figurçs de fy renes, de tritons & d’oifearçx.
Jiïefcrîption du. Scaphandre de M. l'abbe de la Cka-
pelle..
Le Scaphandre dont nous allons parler, efl le
>rèfultat de toutes les obfervations qü’on vient de
paffer en revue. Cet accoutrement, quoiqu’ert dife
ion auteur , n’efl que la copie des habits imagines
par Bachflrom & par ceux qui fe font occupés du
même objet ; mais cette copie a été enrichie de
tant d’augmentations importantes, effeiitielle's même
, qu’elle peut paffer à bon droit pour un original.
Je dois dire aufli à la louange de M. l’abbé de
la Chapelle, que perfonne n’a mieux approfondi
que luiia matière dont il s’eft fi longtemps occupé,
pour donner à fon corfelet la proportion qu’il a cru
ia plus convenable. Il a examiné i°. jufqu’à quelle
’profondeur le corps doit être plongé, pour que
l'homme fôit à fon aife 8c fans courir aucuns risques.
2°. Quel efl le poids du volume d’eau , me-
luré par la partie du corps plongé 3^. De combien
le poids total du corps excède le poids du volume
'd’eau de pluie. 40. Quelle efl la pefanteur fpecifi-
que du linge , comparée à çelle de l’eau. 5°. Quel
doit être en conféquence le volume du corfelet,
relativement à fa pefanteur propre, 8c à l’excès de
celle du corps fur celle du volume d’eau de pluie.
6°. Quelles font les parties du corps que l’on doit
Revêtir de linge préférablement airjç autres.
Après avoir fait ces recherches préliminaires ,
l’auteur paffe à la conftruftion de fon fcaphandre.
Si vous voulez vous former un corfelet d’après fes
principes , taillez-vous un gillet de coûtai, ou d’une
forte toile, également large de haut en bas, 8c
dont le pourtour foit de quatre pieds deu:rç pouces ,
8c la hauteur de deux pieds. Avant d’affeàjbler les
épaulettes de ce corfelet, étendez-le fur un plan ;
flir toute la largeur, tirez une ligne à trois pouces
dediftance du bord inférieur;à dix pouces plus
loin , 8c au-deffus de cette ligne, tir.z-en une autre
parallèle & femblable à la précédente. C ’eft dans
cet intervalle que vous placerez des morceaux de
liège , de forme cubique , 8c épais de deux pouces
8c demi ; quatre rangs de ces cubes fuffiront pour
remplir l’efpace de dix pouces que vous voulez
couvrir.
| Les échancrures du gillet s’avanceront jufqu’à
cette dernière ligne, à un pouce 8c demi près, que
vous laiffere.z pour les replis ; ainfi vous avez déjà
pris quatorze pouces 8c demi fur la hauteur du corfelet
; en partant de fon bord inférieur, huit pouces
au-deffus, tirez encore une ligne qui doit terminer
toute la hauteur de l’habit ; il ne vous reftera
plus qu’un pouce 8c demi que vous employerez aux
replis du bord fupérieur.
M. l’abbé de la Chapelle entre enfuite dans une
foule d’autres détails, qui font d’autant plus inutiles
ic i , qu’on peut avoir recours à fon tailleur ,
pour fe procurer un de fes feaphandres. J’obferve-
rai feulement qu’il ajoute urte efpèce de queue ou
£ifpenfoir, terminée par un plaftron qui, après
avoirpafféentre les cuifles, vifent s’attacher fur là
poitrine. Ce plaftron qui efl garni de petits mor«
ceaux de liège , taillés 8c placés régulièrement comme
dans le fcaphandre, efl deftiné à deux ufages
également effentiels* Le premier', d’empêcher què
le corfelet ne remonte trop haut fous les aiffelles
ce qui gêneroit beaucoup le mouvement des bras ;
le fécond, de fournir à celui qui en fait ufage, un
fiègè fur lequel il peut fe repofer aufli longtemps
qu'il lui plaira. Les feaphandres qu’on deftineroic
aux foldaïs; doivent avoir leur plaftron d’une feulé
pièce de liège , courbée au feu , pour qu’il puiffe
mieux s’ajufter fur la poitrine. Il peut être plus
épais, 8c monter plus haut qu’à l’ordinaire , avec
une échancrure vers lés clavicules en forme de
hauffe-col ; 8c cette efpèce d’armure fuffiroit pouif
parer le coup de fufii & de fabre qui porte vers la.
poitrine & le coù.
M. l’abbé de la Chapelle a aufli imaginé une e(-
pèce de pantalon , garni d’étriers par le bas, qu’on
attache au corfelet par le haut, 8c qui aide à marcher
avec moins de fatigue quand on eft à flot.
Pour rendre fon habillement complet, l’auteur y
ajoute la defcriptioW d’un bonnet, dans lequel on
peut dépofer des choies qu’on a intérêt à ne pas
mouiller.
On n’éprouve aucune difficulté à faire ufage de
ce fcaphandre ;on peut s’en revêtir en aufli peu de
temps qu’il en faut pour prendre une vefte corn-,
mime. Après avoir noué les cordons par-devant ,
on paffe le fufpenfoir entre les cuiffes , 8c l’on attache
ce plaftron fur la poitrine ; on efl alors en
état de fe mettre à l’eau , dans laquelle , moyennant
cet habit, on n’enfonce que jufques vers la
région des mamelles ; on s’y trouve dans une poii-
tion verticale , la tête 8c lés bras hors de l’eau , 8c
à portée d’en faire tel ufage qu’on voudra. Si l’on
veut avancer, il faut faire ufage du pantâlon , qui
diminue beaucoup le travail qu’on éprouveroit fans
ce fecours. Alors on chemine dans l’eau par un
mouvement des jambes, à-peu-près femblable à
celui par lequel nous marchons fur la terre, avec
cette différence, que les mouvements des jatnbes
font beaucoup plus grands , 8c la progreflïon plus
lente 8c plus pénible, à caufe de la réfiftance du
fluide dans lequel on avance.
Les commiffaires nommés par l’académie des
fciences pour examiner ce fcaphandre , affurent que
M. l’abbé de la Chapelle a exécuté plufieurs fois
devant eux ces mouvements, 8ç dans l’eau courante
8c dans l ’eau dormante ; ils obfervent que
dans lésrivières dont le courant eft un peu rapide,
il eft impoffible de remonter vers leur fource , on
! peut feulement traverfer la rivière, mais en déri
vant beaucoup ; dans l’eau dormante, on avance
dans telle direâion que l’on veut. M. l’abbé de la
Chapelle a parcouru devant les mêmes commiffai
res deux cents feize pieds en cinq minutes de
temps.
Les mêmes favans ont cru devoir confeillér a