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c’eft le moyen de lui affermir la tête » affurer les
hanches , faire plier les bras , & de l’empêcher de
trépigner. Quand le cheval a formé fon arrêt, il
fait au bout une ou deux pefades ; mais il n’en
fait aucune au demi-arrêt, c’eft ce qui en fait la
différence.
PESANT , pefer, fe dit d'un cheval qui s’abandonne
trop fur la bride, qui a trop d’appui, qui
pèle à la main , fans pourtant la forcer. .Un cheval
pèfe à la main , ou par la laffitude, ou par foibleffe
de reins, ou par moleffe d’encolure, ou par la pe-
fanteur du train de devant. Il faut trotter fous lui
un cheval qui pèfe à la main , c’eft-à-dire, qu’il
faut le mettre fur les hanches en le foutenant avec
le bridon. On le rend auffi plus léger en l’arrêtant
& en le relevant fouvent. On peut même par ce
moyen furmonter ce défaut, en cas qu’il ne lui
•vienne que de pareffe ou d’engourdiffement ; mais
il n'y a point de remède, s’il lui vient de la foibleffe
des reins ou des jambes. Pefer à la main n’eft
pas un auffi grand défaut que tirer à la main ; c ’eft-
à-dire bander la tête contre la main du cavalier, la
Jui incommoder, réfifter aux aides de la main & de
la bride par une défobéiffance caufée ou par la
roideur d’encolure, ou par 1 ardeur qu il a de vouloir
trop aller en avant.
PIAFFER. Cheval piaffeur. Un cheval piaffeur
eft un cheval plein de feu , inquiet, ardent, &
qui ayant beaucoup de mouvement & un defir
exceffif d’aller en avant, fe fer? d’autant plus de ce
mouvement , qu’on fait effort pour le retenir , &
qui plie la jambe jufqu’au ventre. Il s’ébroue , fe
traverfe s’il peut, & marque fon inquiétude par
fon aâion pleine de feu , que quelques-uns appellent
improprement dan fer. Les chevaux qui
piaffent, de même que ceux qui font inftruits au
paffège, font les plus propres pour les. carrou-
fels & pour les occafiens d’éclat.
PIED. Dans le cheval , c ’eft la partie de la
jambe, depuis la couronne jufqu’au bas de la corne.
On diftingue les quatre pieds par leurs noms dif-
férens. Des deux pieds de devant, l’un eft appellé
le pied de l’étrler, le pied du montoir de devant ;
le pied de la main de la bride, c’eft le gauche, Le
droit s’appelle le pied hors du montoir de devant.
Autrefois on appellpit mains ces deux pieds, mais
çe terme a vieilli en ce fens. Des deux pieds de
derrière , le droit s’appelle le pied hors du montoir
de derrière ; on l’appelloit autrefois le pied de
la lance, ce terme eft encore en ufage dans les
courfes de bague. Le pied gauche fe nomme le
pied du moptoir de .derrière. O n dit qu’un cheval
a les pieds gras , quand il a la corne fi foible & fi
mince» qu’à moins d’être broché très-bas , il court
rifque d’être piqué quand on le ferre. Les chevaux
anglois font fujets à avoir le pied gras. On dit qu’un
cheval a le pied ufé, quand il l’a mauvais , quand
la corne eft ufée. Avoir peu de pied , c’eft-à-dire
peu de corne ; avoir mauvais pied, c eft-à-dire ,
eue la corne ne vaut rien pour la ferrure. On ap-
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pelle pied dérobé, le pied du cheval rompu , & fi
u fé , que faute de corne on peut à peine le ferrer ;
ce qui lui arrive pour avoir marché longtemps pied
nud, c’eft-à-dire, déferré. Pied comble fe dit d’un
cheval qui a la foie arrondie par-deffous , en forte
qu’elle eft plus haute que la corne : ce qui fait boiter
le cheval, & empêche de le ferrer, à moins
qu’on ne voûte le fer. Pied encaftelé fe dit du pied
de devant, dont la corne eft devenue fi fèche & fi
étroite, qu’elle refferre & approche de fort près les
deux côtés du talon , & oblige par la douleur qu’elle
y caufe , le cheval à boiter. Ces fortes de chevaux
doivent être ferrés à pantoufle. Pied-neuf fe dit
d’un cheval à qui la corne eft revenue après que le
fabot lui eft tombé, auquel cas il ne vaut plus rien
que pour le labour. Le terme de pied-neuf peut
auffi s’appliquer aux chevaux fujets à muer de
' corne, tels que font les chevaux qui viennent de
Hollande. Celle qui leur vient dans leur pays natal
étant trop humeélée, d’une confiftance trop foible,
dès qu’ils ont été quelque temps dans un pays plus
fe c , ils en muent peu-à-peu, parce que la première
corne leur croît, ou qu’il s’en forme une plus
ferme & plus folide. Pour prévenir que ce changement
ne leur applatiffe les pieds , il faut que le
maréchal leur donne une bonne forme par la ferrure.
Le petit-pied eft un os fpongieux renfermé
dans le milieu du fabot & qui a toute la forme du
pied. On dit auffi, remettre un cheval fur le bon
pied, galoper fur le bon pied , quand on le fait
aller uniment & fur les mêmes pieds qu’il a commencé
à partir.
PILIER fe dit du centre de la volte autour de
laquelle on fait tourner le cheval, foit qu’il y ait
un pilier de bois ou non, & cela s’appelle travailler
autour du pilier. On dit auffi travailler entre
deux piliers, quand On monte un cheval entre
deux piliers de bois , quand on l’y fait fauter,
cabrer & ruer, lever le devant & le derrière. La
plupart des grands manèges ont un pilier planté
au milieu de leur terrein , mais ils ont tous lur les
côtés d’autres piliers de diftance en diftance, qui
font difpofés deux à deux , d’où vient qu’on les
appelle les deux piliers pour les diftinguer du pilier
du centre. Le pilier du centre fert à régler
l’étendue du terrein , afin de manier fur les volres
avec étendue & jufteffe, & pour travailler avec
règle & mefure fur les quatre lignes dç la volte ,
qui doivent être imaginées dans une égale diftance
de ce centre. 11 fert auffi à commencer les chevaux
défobéiffans & fougueux, fans aucun péril pour le
cavalier, parce que le cheval eft attaché à une
longe ou longue corde, attachée elle-même au pi-?
lier & tenue en état par un homme qu’on y pofte.
Cette fujétion empêche le cheval d’échapper. Pour
commencer un cheval fougueux & le faire aller en
avant, pour le dénouer , lui affouplir le corps &
lui apprendre à ne pas galoper faux ni défuni, on
lui met le caveçon, on attache la longe à l’anneau
dp milieu, & on l’arrête au pilier, on le trotte alep*
tour,
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tour fans perfonnè deflùs, en lui faifant peur de
la chambrière, afin qu’il la connoiffe & la fuie
non-feulement au moindre coup, mais encore à la
moindre approche. Après cela on peut le monter ,
& on le fera marcher en avant, lans qu’il puiffe
fe cabrer ni s’arrêter pour faire des contre-temps;
parce que la peur de la chambrière préviendra tous
les défordres & l’empêchera de s’arrêter. Newcaftle
dit qu’on ne doit fouffrir qu’en cette occafion l ’u-
fage du pilier ; en général il ne l’approuve point,
& foutient dans fa nouvelle méthode que eet ufage
ne fert qu’à gâter les chevaux, parce qu’Hs ne travaillent
alors que par routine , ont continuellement
les yeux occupés à regarder les mêmes objets,
ne manient plus quand ils font, hors de-là, &
qu’au lieu d’être dans la main & dans les; talons,
ils ne font que dans la longe & dans la chambrière.
Alix manèges qui n’ont pas de pilier, on confidère
la place ou il doit être, & on fait tous les mouvements
autour de ce centre imaginaire, comme s’il
y avoit réellement un' p ilier, ou bien un homme fe
met au milieu du terrein, & tient le bout de la
longe. Les deux piliers font plantés à deux ou trois
pas l’un de l’autre. On y met le cheval avec le caveçon
de cuir où de corde , monté de deux greffes
cordes qui répondent de l’un des piliers à l’autre. Il
faut que le cheval donne dans les cordes du cave-
con, & qu’il fe lève entre deux piliers. Dès qu’on
lui a appris à fe lever devant, on l’inftruità s’éparer
& a fe mettre aux airs relevés , par les aides où
par le châtiment de la chambrière. Dans le befoin
on fait venir au fecours la gaule , le poinçon, la
main & les talons.
De l’utilité des piliers. ( La Guériniére ).
Les piliers font de l’invention de M. de Pluvia
l* M. le duc de Newcaftle ne les approuve pas. Il
dit « qu’on y eftrapaffe & qu’on y tourmente mal-
à-pr-opos un cheval pour lui faire lever le devant,
efpérant par-là le mettre fur les hanches; que cétte
méthode eft contre l’ordre ôc rebute touts les chevaux
; que les piliers mettent un cheval fur les jarrets
; parce que , quoiqu’il plie les jarrets , il n’avance
pas les hanches fous lui pour garder l’équilibre,
fouteriapt fon devant fur les cordes du caveçon
».
1 ufage des piliers, c’eft: que de fon temps la plupart
des écuyers fe fervoient de cette méthode pour
aire lever d abord le devant à un cheval avant qu’il
• ut réglé au piafer. Par ce moyen ils mettoient fans
oute un cheval fur les jarrets, & lui apprenoient
p utôt a faire des pointes & à fe cabrer qu’à lever
• devant de bonne grâce. Mais fi dans les commencements
au lieu de fonger à détacher de terre
un cheval, on fe fert des piliers pour lui apprendre
palier dans une place fans avancer, reculer ni fe
raverfer, qui eft 1 aâion du piafer, on verra que
cette cadence plus aifée à donner dans les piliers
9uen liberté, met le cheval dans une belle pof-
équitation, Efirime & Danfa
VIL
tnre , lui donne une démarche noble & relevée , &
lui rend le mouvement des épaules libre & hardi,
& les refforts des hanches doux & Hans : toutes ces
qualités font recherchées pour un cheval de parade
& pour former un beau paffage. Mais comme il
faut beaucoup d’a rt, de patience & de temps pour
régler un cheval dans cet air de paffage fier & rele
vé , que donnent lés piliers employés avec intel-:
ligence , il n’eft pas étonnant qu’ils, caufent tant
de défordres à ceux qui s’en fervent dans une autre
vue , que de parvenir d’abord au piafer.
Un favant écuyer a dit avec raifon, que les piliers
donnent de l’efprit aux chevaux ; parce que
la crainte du châtiment réveille & tient dans une
adion brillante ceux qui font endormis & pnref-
feux ; mais les piliers ont encore l’avantage d’ap-
paifer ceux qui font d’un naturel fougueux & colère
; parce que l’aftion du piafer qui eft un mouvement
écouté , foutenu , relevé & fuivi, les oblige
de prêter attention à ce qu’ils font: c’eft pourquoi
je regarde les piliers comme un moyen , non-feulement
de découvrir la reffource , la vigueur, la '
gentilleffe, la légéreté & la difpofition d’un cheval; ~
mais encore comme un moyen de donner ces dernières
qualités à ceux qui en font privés.
La première attention qu’on doit avoir dans les
commencemens en mettant un cheval dans les piliers,
c-eft d’attacher les cordes du caveçon égales
& courtes , de façon que les épaules du cheval
foient de niveau avec les piliers, & qu’il n’y ait
que la tête & l’encolure qui foient au-delà , par ce
moyen il ne pourra paffer la croupe par-deffous les
cordes du caveçon , ce qui arrive quelquefois. Il
faut enfuite fe placer avec la chambrière derrière
la croupe , & affez éloigné pour n’êtré point à portée
d’être frappé: le faire enfuite ranger à droite
& à gauche en donnant de la chambrière par terre,
& quelquefois légèrement fur la feffe. Cette manière
de faire ranger un cheval de côté & d’autre ,'
lui apprend à paffer les jambes , le débrouille & lui
donne la crainte du châtiment. Quand il ob éira i
cette aide , il faudra le chaffer en avant, & dans le
temps qu’il donne dans les cordes, l’arrêter & le
flatter, pour lui faire connoître que c’eft-là ce •
qu’on lui demande ; & il ne faut point lui demander
autre chofe, jufqu’à ce qu’il foit confirmé dans
l’obéiffance de fe ranger à droite & à gauche, &
d’aller en avant pour la chambrière, fuivant la volonté
du cavalier.
Il y a des chevaux d’un naturel fougueux & malin
q u i, avant que de fe ranger pour la chambrière
& d’aller en avant dans les cordes, emploient toutes
les défenfes que leur malice peut leur fuggérer.
Les uns pleins d’inquiétude , trépignent au lieu de
piafer ; les autres font des pointes & des élans dans
les cordes, d’autres redoublent de fréquentes ruades
, & reculent ou fe jettent contre les piliers.
Mais comme la plupart de ces défordres viennent
plus fouvent de l’impatience de celui qui les châtie
mal-à-propos dans ces commencements, que du