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Si le cheval ne fe préfente de lui-même à cet air,
îl fera difficile de l’y mettre; mais fa fo.upleffe,
& fon feu naturel , lui en donneront quelque
temps. En le ménageant & en lui laiffant du repos ,
fa gaîté fera plus agréable, fk il prendra quelques
pas de mézair.
Pour entretenir le cheval à cet air, on peut fie
fervir des aides fuîvantes : enlever légèrement de
la main, & laiffer tomber inoëlleufement les
jambes près du corps pour lui donner une chaffe
douce &fiuivie : on doit fur-tout être affuré dans
la felle. De cette manière o-n' pourra y accoutumer
le cheval. Mais la gaîté une fois paffée, il n’a
plus le même agrément.
J’ai mis c e tair à la.fuite du terre-à-terre, à caufe
de la grande analogie que je trouve entr’epx.
D es airs relevés en général.
Les fauts & les bonds que les poulains en liberté
font dans les prés , font proportionnés à leur
force & à leur légèreté , & font produits par leur
gaîté & par leur vivacité : ces qualités peuvent
être les njêm.es dans tous les chevaux, mais leur
conftru&ion ayant des différences * ils ne font point
tous capables d’exécuter les mêmes fauts.
On exerce les chevaux aux airs relevés plutôt
pour la curiofité que pour une utilité réelle. Les
anciens aimoient ce genre de manège : aujourd’hui
il eft très-négligé en France. Cependant, comme il
eft bon d’avoir des principes pour-dreffer dés chevaux
fauteurs ? nous croyons convenable d’en dire
un mot#
Théorie du Saut.
La première aélion du cheval qui veut fauter,
eft d’enlever le devant, d’en rapporter toute la
maffe fur les jarrets , ‘ qu’il plie & qu’il avance autant
qu’il lui eft poffible fous le ventre vers fon
centre de gravité, afin de pouvoir enlever plus
facilement & plus haut une, grande partie de fa
maffe : car, plus le poids qui fera fléchir les articulations
fera grand , fans excéder les forces des
jarrets, & toujours dans une proportion raifon-
jiable; plus alors la détente fera vive : de même
plus la flexion eû grande dans les articulations ,
plus l’effort eft confidérable. C ’eft pour cela que
les chevaux , lorfqu’ ils veulent redoubler leurs
fauts , fe rapetiffent, pour ainfi dire , fur leurs
jambes de derrière.
Les mufcles fléchiffeurs ayant agi avec une
grande vîteffe, & la maffe ayant comprimé les
extrémités des os fémurs fiibîtement & bien fur :
les lignes d’appui des jambes de derrière, comme
eettç fituation eft pénible & ne fauroit durer, les
mufcles extenfeurs agiffent à leur tour avec une
promptitude proportionnée à la gêne où ils étoient ;
& l’extrémite de la jambe trouvant le terrein qui
arrête fon effort & réagit fur e lle , toute i’impui-
Son eft alors, pour la maffe mobile qui eft le corps
de l ’animal.
A I R
L’élévation &. la longueur du faut font proportionnées
à l’étendu* des os , à la force des mufcles,
& au degré de cohérence dans toutes les parties des
jarrets.
Une articulation formée par des os très-longs ,
•ouvre un angle plus grand, dont l’extrémité comprimée
s’éloigne davantage , dans la réa&ion, de
celle qui appuie.fur le terrein; la force des mufcles
augmente i’aéHvité des refforts , & la cohérence
ff:rme des organes des jarrets peut fupporter un
, plus grand poids fans fouffrir.
L’anima!, dont le volume eft léger en raifon de
fes jambes , eft plus propre à fauter^ car les articulations,
en s’étendant après la compreffion,
trouvant une moindre réfiftance, la’ force de la
détente doit pouffer le .corps plus loin. Il eft certain
qu’un petit cheval bien fait & nerveux, eft
plus propre au faut qu’un grand animal.
Daprès ces principes il nous fera plus facile de
donner les moyens de dreffer des chevaux aux
airs rtelevés.
. De la Pefdde,
La pefade eft .un air dans lequel le cheval bien
placé, & bien dans la main , enlève le devant en
pliant les deux jambes de devant, fans remuer
celles de derrière, & en fléchifiànr les jarrets.
Pour exécuter la pefade , il eft néceffaire de bien
raffembler le cheval, & d’enlever la main, en
fixant les hanches par une preftlon légère des deux
gras de jambe. Les pefades feront médiocrement
élevées ; le cheval ne les fera pas de lui-même , &
il ne reculera pas avant que de les faire. L’homme
foutiendra le cheval lorfque fon devant retombera
afin que les épaules ne portent pas tout le
poids.
Cette ‘leçon eft utile pour accoutumer l’animal à
refter fur fes jarrets , 8c pour les habituer à fupporter
fans remuer toute la maffe du corps.
De la Courbette.
Dans la pefade, les hanches ne marchent pas,
dans la courbette, aulfi-tôt que le cheval s’eft enlevé
à pefade, le derrière marche en pouffant le devant :
les jarrets reftent pliés , & ne s’étendent qu’après
que l’on a ceffé d’enlever à courbettes > car fi l’on
en faifoit un trait d’un bout du manège à l’autre ,
les hanches feroient toujours en travail.
Pour faire de belles courbettes, les hanches doivent
agir preftement, enfemble, & fans traîner.
Une cadence tride, vive & bien marquée, carac-
térife les belles courbettes. Voici la manière de les
faire.
On enlève à pefade, & dans l’inftant on chaffe
des deux jambes ; on laiffe tomber le devant, en
rendant imperceptiblement la main ; les jambes
fe relâchent auffi, fe raniment pour recommencer.
Il faut un taél particulier pour cet air, très agréable,
mais très-rare en France ; car il eft difficile de
trouver
A l l
„cuv er un cheval propre à ce manège. Les anciens
é^vers ftifoient toutes fortes de figures à courbettes.
Aujourd’hui ces operations n ont lteu que
dans les livres. Eft-ce un bien ? eft-ce un mal ? Je
ne décide point.
V e la Croup aie, de U Balotaie, &> ie la Cabriole.
Dans la courbette, le cheval s’eft peu élevé de
terre, parce que fes articulations de derrière ne
fe fom point déployées ; s’il les étendo.t , alors .1
fauteroit des quatre jambes. Le faut qu .l feroit
prendroit un nom différent félon la difpofmon de
fes jambes de derrière. Si elles font pliees fous le
ventre dans l’attitude qu’elles ont à la courbette,
le faut fe nomme croupade. Si les deux jarrets remontent
& touchent les feffes, & fi les fers fe
laiffent voir, mais fans ruade, ce fera une balo-
tade. Enfin, quand le cheval bien enlevé détache
la ruade entière, il fait une cabriole.
Les règles de fes fauts, font que le devant fort
Lien enlevé. & plus que la croupe , que l’animal
l’homme.
On fait fauter le cheval en enlevant la main , &
en aidant la croupe avec le poinçon, ou la gueule
ou la chambrière , jufqu’à ce qu'il foit confirmé
dans fon air. Sa vigueur & fa légèreté décident du
faut qui lui convient: l’homme ne peut le fixer à
l’un plutôt qu’à l’autre.
C ’eft un grand abus que de vouloir faire fauter
des chevaux, fans les avoir fait pafferpar les leçons
du manège, qui les affoupliflent & les rendent
obéiffants : autrement ils ne fautent que de caprice
& de colère, & deviennent dangereux.
Les chevaux parfaitement exercés, comme l’é-
toient ceux de M. de la Pleignière , exécutent tout
le manège exactement, &. fautent en liberté , au
commandement de l’homme , fans faire un temps
de plus contre fon gré. C ’eft-là dreffer des fauteurs
, que l’on peut exercer fans courir rifque de
la vie.
AJUSTER un cheval, ç’eft lui apprendre fon
exercice en lui donnant la grâce néceffaire.
ALLÉGIR. C ’eft rendre un chevat plus libre,
plus léger du devant que du derrière. Lorfqu’on
veut allégir un cheval, il faut qu’en le faifant tro-
te r , on le fente toujours /difpofé à galopper, &
que l’ayant galoppé quelque temps, on le remette
encore au trot. Le cheval eft f; pefant d’épaules
, & fi attaché à la terre , qu’on a de la peine
à lui rendre le devant léger, quand même, pour
Y allégir, on fe ferviroit du caveçen à la Neucaftle.
Ce cheval s’abandonne trop fur les épaules ; il faut
Yallègu du devant & le mettre fous lui.
ALLURE. Train, marche d’un cheval. Ce cheval
a Y allurefroide, pour dire qu’il ne lève pas affez
le genou ni la jambe, & qu’il rafe le tapis : il a de
belles allures , pour dire qu’il a la marche belle. Il
n’y a perfonne qui puiffe parfaitement dreffer un
cheval, qu’il ne fçache exactement toutes les al-
Equitation, Éfcrime & Danfe.
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turcs naturelles des chevaux, 8c les aftions des
jambes. Les allures naturelles font le pas , ou peiit
trot, le trot, le galop. Si ce cheval continue à fal-
fifier fon allure, donnez-lui de l’éperon dans la
volte. Neucaftle dit : Ce barbe a les allures belles ,
contre l’ordinaire des barbes.
D e s a l l u r e s .( La Güériniere ) .
La plupart de ceux qui montent à cheval n’ont
qu’une idée confufe des mouvements des jambes
de cet animal dans fes différentes allures ; cependant
fans une connoiflance auffi effentielle à un
cavalier , il eft impoffible qu’il puiffe faire agir des
refforts, dont il ne connoît pas la mécanique.
Les chevaux ont deux fortes d'allures ; favoîr ,
les allures naturelles , & les allures artificielles.
Dans les allures naturelles , il faut diftinguef les
allures parfaites , qui font, le pds , le trot, & le
galop; & les allures défeélueufes, qui font, l’amble
, l’éntre-pas ou traquenard & l’aubln.
‘ Les allures naturelles & parfaites , font celles qui
viennent purement de la nature , fans avoir été
perfectionnées par l’art.
Les allures naturelles & défeCïueufes, font celles
qui proviennent d’une nature foible ou ruinée.
Les allures artificielles, font celles qu’un habile
écuyer fait donner aux chevaux qu’il dreffe , pour
les former dans les différents airs dont ils font capables
, §c qui doivent fe pratiquer dans les ma-,
nêges bien réglés. Voyeç A irs.
D es allures naturelles.
Le Pas.'
Le pas, eft l’aôion la moins élevée, la plus lente
& la plus douce de toutes les allures d’un cheval.
Dans le mouvement que fait un cheval lorfqu’il va
le pas , iWève les deux jambes qui font oppofées
& traverfées , l’une devant , l’antre derrière :
quand , par exemple, la jambe droite de devant eft:
en l’air & fe porte en avant, la gauche de derrière
fe lève immédiatement après , & fuit le même
mouvement que celle de devant, & ainfi des deux
autres jambes ; enforte que dans le pas, il y a
! quatre mouvemens : le premier eft celui de la
i jambe droite de devant, qui eft fuiYie de la jambe
! gauche de derrière, qui fait le fécond mouvement ;
le troifième eft celui de la jambe gauche de devant
, qui eft fuivie de la jambe droite de derrière ;
& ainfi alternativement.
Le Trot. .
L’aClion que fait le cheval qui va au trot, eft de
lever en même-temps les deux jambes qni: font
oppofées & traverfées ; favoir, la jambe droite de
devant avec là jambe gauche de derrière, & enfuite
la jambe gauche de devant avec la droite de derrière'.
La différence qu’il y a entre le pas & le trot, c’eft
que dans le trot, le mouvement eft plus violent \