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lard huileux. On tire ces différentes bandes de dessüs
le navire , par le moyen de crochets ; on les traîne sur
le tillac 3 et on les fait tomber dans la cale , où on les
arrange. On continue alors de tourner -la baleine, afin
de mettre entièrement à découvert le côté par lequel
on a commencé le dépècement, et de dépouiller la
partie inférieure de ce même côté, sur laquelle on enlève
les bandes huileuses avec plus de facilité que sur
le dos, parce que le lard y est moins épais.
Quand cette dernière opération est terminée, on travaille
au dépouillement de la tête. On coupe la langue
très-profondément, et avec d’autant plus de soin, que
celle d’une baleine franche ordinaire donne communément
six tonneaux d’huile. Plusieurs pêcheurs cependant
ne cherchent à extraire cette huile que lorsque la
pêche n’a pas été abondante : on a prétendu qu’elle
étoit plus sèche que les huiles provenues des autres
parties de la baleine; qu’elle étoit assez corrosive pour
altérer les chaudières dans lesquelles on lafaisoit couler•
et que c’étoit principalement cette huile extraite de la
langue, que les ouvriers employés à découper le lard
prenoient garde de laisser rejaillir sur- leurs mains ou
sur leurs bras, pour ne pas être incommodés au point
de courir le danger de devenir perclus.
Pour enlever plus facilement les fanons, on soulève
la tête avec une amure fixée au pied de Xartimon ; et
trois crochets attachés aux palans dont nous avons parlé,
et enfoncés dans la partie supérieure du museau, font
ouvrir la gueule au point que les, dépeceurs peuvent
couper les racines des fanons.
On s’occupe ensuite du dépècement du second côté
de la baleine franche. On achève de faire tourner le
cétacée sur son axe longitudinal; et on enlève le lard
du second côté, comme on a enlevé celui du premier.
Mais comme, dans le revirement de l’animal, la partie
inférieure du second côté est celle qui se présente la
première, la dernière bande dont ce même côté est
dépouillé, est la grande pièce dite de revirement. Cette
grande bande a ordinairement dix mètres de longueur,
lors même que le cétacée ne fournit que deux cent cinquante
myriagrammes d’huile, et cent myriagrammes
de fanons.
Il est aisé d’imaginer les différences que l’on introduit
dans les opérations que nous venons d’indiquer,
si on dépouille la baleine sur la côte ou près du rivage,
au lieu de la dépecer auprès du vaisseau.
Lorsqu’on a fini d’enlever le lard, la langue et les
fanons, on repousse et laisse aller à la dérive la carcasse
gigantesque de la baleine franche. Les oiseaux
d’eau s’attroupent sur ces restes immenses, quoiqu’ils
soient moins attirés par ces débris que par un cadavre
qui n’est pas encore dénué de graisse. Les ours maritimes
s’assemblent aussi autour de cette masse flottante
, et en font curée avec avidité.
Veut-on cependant arranger le lard dans les tonneaux?
On le sépare de la couenne. On le coupe par
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