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mille ; et de grands glaçons, aux espaces glacés qui n’ont
pas plus d’un demi-mille de diamètre.
On rencontre vers le Spitzberg de grands bancs de
glace, qui ont quatre ou cinq myriamètres de circonférence.
Comme les intervalles qui les séparent-forment
une sorte de port naturel, dans lequel la mer est presque
toujours tranquille, les pêcheurs sy établissent
sans crainte ; mais ils redoutent de se placer entre
les petits bancs qui n’ont que deux ou trois cents
mètres de tour, et que la moindre agitation de l’océan
peut rapprocher les uns des autres. Ils peuvent bien ,
avec des gaffes ou d’autres instrumens, détourner de
petits glaçons. Us ont aussi employé souvent avec succès,
pour amortir le choc des glaçons plus étendus et
plus rapides, le corps d’une baleine dépouillé de son
lard, et placé sur le côté et en dehors du bâtiment.
Mais que servent ces précautions ou d’autres semblables,
contre ces masses durcies et mobiles qui ont
plus de cinquante mètres d’élévation? ce nest que lorsque
ces glaçons étendus et flottans sont très-éloignés
l’un de l’autre, qu’on ose pêcher la baleine dans les
vides qui les séparent. On cherche un banc qui ait au
moins trois ou quatre brasses de profondeur au-dessous
de la surface de l’eau, et qui soit assez fort par son vo^
lume, et assez stable par sa masse, pour retenir le navire
qu’on y amarre.
Il est très-rare que l’équipage d’un seul navire puisse
poursuivre en même temps deux baleines au milieu
des glaces mouvantes. O11 ne hasarde une seconde
attaque, que lorsque la baleine franche, harponnée et
suivie, est entièrement épuisée et près d’expirer.
Mais dans quelque parage que l’on pêche,, dès que
le matelot guetteur, qui est placé dans un point élevé
du bâtiment, d’où sa vue peut s’étendre au loin, apper-
çoit une baleine, il donne le signal convenu; les chaloupes
partent; et à force de rames, on s’avance en
silence vers l’endroit où on l’a vue. Le pêcheur le plus
hardi et le plus vigoureux est debout sur l’avant de sa
chaloupe , tenant le harpon de la main droite. Les Basques
sont fameux par leur habileté à lancer cet. instrument
de mort.
Dans les premiers temps de la pêche de la baleine,
on approchoit le plus possible de cet animal, avant de
lui donner le premier coup de harpon. Quelquefois
même le harponneur ne l’attaquoit que lorsque la chaloupe
étoit arrivée sur le dos de ce cétacée;
Mais le plus souvent, dès que la chaloupe est parvenue
à dix mètres de la baleine franche, le harponneur
jette avec force le harpon contre l’un des endroits les
plus sensibles de l’animal, comme le dos, le dessous du
ventre, les deux masses de chair mollasse qui sont à
côté des évents. Le plus grand poids de l’instrument
étant dans le fer triangulaire , de quelque manière qu’il
soit lancé, sa pointe tombe et frappe la première. Une
ligne de douze brasses ou environ est attachée à ce
fer, et prolongée par d'autres cordages.