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dents pointues et dentelées, et lui enlèvent d’énormes
morceaux de tégumens et de muscles.
Cependant un mugissement sourd exprime, a-t-on
dit, et les tourmens et la rage de la baleine..
Une sueur abondante manifeste l’excès de sa lassitude
et le commencement de son épuisement. Elle,
montre par--la, un nouveau rapport avec l, es quad, ru'
pèdes, et particulièrement avec le cheval. Mais cette
transpiration a un caractère particulier : elle est, au
moins en grande partie, le produit de cette substance
graisseuse que nous avons vue distribuée au-dessous de
ses tégumens , et que des mouvemens forcés et une
extrême lassitude fonLsuinter parles pores de la peau.
Une agitation violente et une natation très-rapide
peuvent donc, en se prolongeant trop long-temps, ou
en revenant très-fréquemment, maigrir la baleine
franche, comme le défaut d’une nourriture assez
copieuse et assez substantielle.
Au reste, cette sueur, qui annonce la diminution de
ses forces, n’étant qu’une transpiration huileuse ou
graisseuse très-échauffée, il n’est pas surprenant qu’elle
répande une odeur souvent très-fétide; et cette émanation
infecte est une nouvelle cause qui attire les oiseaux
de mer autour des troupes de baleines franches, dont
elle peut leur indiquer de loin la présence.
Cependant la baleine blessée, privée de presque tout
son sang, harassée, excédée, accablée par ses propres
efforts, n’a plus qu’un foible reste de sa vigueur et de
sa puissance. L'ours blanc ou plutôt Yaurs maritime, ce
vorace et redoutable animal que la faim rend si souvent
plus terrible encore, quitte alors les bancs de glace
ou les rives gelées sur lesquels il se tient en embuscade,
se jette à la nage, arrive jusqu’à ce cétacée, ose
l’attaquer. Mais, quoiqu’expirante, elle montre encore
qu elle est le plus grand des animaux : elle ranime ses
forcés défaillantes; et peu d’instans même avant sa
m ort, un coup de sa queue immole l’ennemi trop
audacieux cjui a cru ne trouver en elle qu une victime
sans défense. Elle peut d autant plus faire ce dernier
effort, que ses muscles sont très-susceptibles d’une
excitation soudaine. Ils conservent une grande irritabilité
long-temps après la mort du cétacée : ils sont par
conséquent très-propres à montrer les phénomènes électriques
auxquels on a donné le nom de galvanisme;
et un physicien attentif ne manquera pas d?observer
que la baleine franche non seulement vit au milieu des
eaux comme la raie torpille, le gymnote engourdissant, le
malap'térure électrique, etc. mais encore est imprégnée,
comme cés poissons, d’une grande quantité de substance
huileuse' et idioélectrique; >
Le cadavre de la baleine flotte: sur la mer. L’ours
maritime, les squales, les oiseaux de mer, se précipitent
alors sur cette proie facile,* la déchirent et la
dévorent.
Mais cet ours maritime n’insulte ainsi, pour ainsi
dire, aux derniers momens de la jeune baleine, que