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cétacées, est comme un voile qui intercepte une grande
quantité de rayons de lumière; l’animal peut l’épaissir
facilement et avec promptitude, en s’enfonçant de
quelques mètres de plus au-dessous de la surface de la
mer; et si, dans quelques circonstances très-rares et
pendant des momens très-courts, l’oeil de la baleine est
tout-à-fait hors de l’eau, on va comprendre aisément
ce qui remplace le voile aqueux qui ne le garantit plus
d’une lumière trop vive.
La réfraction que le cristallin produit £st si fort augmentée
par le peu de densité de l’air qui a pris alors
la place de l’eau, et qui aboutit jusqu’à la cornée, que
le foyer des rayons lumineux, plus rapproché du cristallin,
ne tombe plus sur la rétine, n’agit plus sur les
houppes nerveuses qui composent la véritable partie
sensible de l’organe, et ne peut plus éblouir le cétacée.
Les baleines franches ont donc reçu de grandes
sources de sensibilité, d’instinct et d’intelligence, de
grands principes de mouvement, de grandes causes
d’action.
Vojons agir ces animaux, dont tous les attributs sont
des sujets d’admiration et d’étude.
Suivons-les sur les mers.
Le printemps leur donne une force nouvelle ; une
chaleur secrète pénètre dans tous leurs organes; la vie
sy ranime; ils agitent leur masse énorme; cédant au
besoin impérieux qui les consume, le mâle se rapproche
plus que jamais de sa femelle; ils cherchent dans une
baie, dans le fond d’un golfe, dans une grande rivière,
une sorte de retraite et dasyle; et brûlant 1 un pour
l’autre d’une ardeur que ne peuvent calmer, ni l’eau
qui les arrose; ni le souffle des vents , ni les glaces
qui flottent encore autour d’eux, ils se livrent à cette
union intime qui seule peut l’appaiser.
En comparant et en pesant lés témoignages des pêcheurs
et des observateurs, on doit croire que, lors de
leur accouplement, le mâle et la femelle se dressent,
pour ainsi dire, l’un contre l’autre, enfoncent leur
queue, relèvent là partie antérieure de leur corps, portent
leur tête au-dessus de l’eau, et se maintiennent dans
cette situation verticale, en s’embrassant et se serrant
étroitement avec leurs nageoires pectorales *. Comment
pourroient-ils, dans toute autre position, respirer l’air
*dë l’atmosphère, qui leur est alors d’autant plus nécessaire,
qu’ils ont besoifl-dé tempérer l’ardeur qui les
anime? D’ailleurs, indépendamment des relations uni*
formes que font à ce sujet les pêcheurs du Groenland,
nous avons en faveur de notre opinion une autorité
irrécusable. Notre célèbre confrère le citoyen de Saint-
Pierre, membre de l’Institut national, assure avoir vu
plusieurs fois, dans son voyage à l’île de France, des
baleines accouplées dans la situation que nous venons
d’indiquer.
Cëux qui ont lu l’histoire de la tortue franche, n’ont
* Bonnaterre, Cêtologie. Planches de VEncyclopédie méthodique,
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