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 fortunés ,  et  de  rappeler les  traits  de  ce  dauphin poétique  
 ,  voyons  de  près  celui des  navigateurs  :  la  fable  
 a  des charmes  bien  doux ;  mais  quels  attraits sont au-  
 dessus  de  ceux de  la  vérité? 
 Les  formes  générales  du  dauphin  vulgaire  sont plus  
 agréables à la vue que celles  de presque tous les autres  
 cétacées  : ses proportions sont moins éloignées de celles  
 que  nous  regardons  comme  le  type  de  la  beauté.  Sa  
 tête,  par  exemple,  montre,  avec  les  autres parties  de  
 ce  cétacée,  des  rapports de dimension  beaucoup  plus  
 analogues  à  ceux  qui  nous  ont  charmés  dans  les  animaux  
 que nous crojons  les plus favorisés par la Nature.  
 Son ensemble est comme composé de deux cônes alon-  
 gés  presque  égaux,  et  dont  les  bases  sont  appliquées  
 l’une  contre  l’autre.  La  tête forme l’extrémité du  cône  
 antérieur ;  aucun  enfoncement  ne  la  sépare  du  corps  
 proprement dit,  et  ne  sert à la faire  reconnoître : mais  
 elle se  termine  par  un museau  tres-distinct  du  crâne,  
 très-avancé,  très-aplati  de  haut  en  bas,  arrondi  dans  
 son  contour de manière à présenter  l’image d’une  portion  
 d’ovale,  marqué  à  son  origine  par  une  sorte  de  
 p li,  et  comparé  par  plusieurs  auteurs  a  un  énorme  
 bec  ctoie  ou  de  cygne,  dont  ils  lui  ont même  donné le  
 nom. 
 Les deux mâchoires composent ce museau  et comme  
 elles  sont  aussi  avancées  ou  presque  aussi  avancées  
 l’une que  l’autre,  il  est  évident  que  l’ouverture  de  la  
 bouche  n’est pas  placée  au-dessous  de  la  tete,  comme 
 dans  les  cachalots, les phjsales  et les physétères.  Cette  
 ouverture a d’ailleurs une longueur  égale au neuvième  
 ou même au huitième de la longueur totale du dauphin. 
 On voit  à  chaque mâchoire  une  rangée  de dents .un  
 peu  renflées, pointues, et placées de manière que lorsque  
 la bouche se ferme, celles d’en-bas entrent dans  les  
 interstices  qui  séparent  celles  d’en-haut,  quelles  reçoivent  
 dans  leurs  intervalles;  et  la  gueule  est  close  
 très-exactement. 
 Le nombre de ces dents peut varier,  suivant l’âge ou  
 suivant  le  sexe.  Des  naturalistes  n’en  ont  compté  que  
 quarante-deux à la mâchoire d’en-haut, et trente-huit à  
 celle  d’en-bas.  Le  professeur  Bonnaterre  en  a  trouvé  
 quarante-sept  à  chaque  mâchoire  d’un  individu  placé  
 dans  le  cabinet de l’école  vétérinaire d’Altfort.  Klein  a  
 écrit  qu’un  dauphin  observé  par  lui  en  avoit  quatre-  
 vingt-seize  à  la  mâchoire  supérieure,  et quatre-vingt-  
 douze  à  l’inférieure. 
 La langue du  dauphin, un peu plus mobile que celle  
 de quelques autres cétacées, est charnue, bonne à manger, 
   et,  suivant Rondelet,  assez  agréable  au  goût.  Elle  
 ne  présente  aucune  de  ces  papilles  qu’on  a  nommées  
 coniques,  et  qu’on  trouve  sur  celle  de  l’homme  et  de  
 presque  tous les mammifères ;  mais  elle  est  parsemée,  
 sur-tout  vers  le  gosier,  d’éminences  très-petites,  percées  
 chacune  d’un  petit  trou.  A  sa  base  sont  quatre  
 fentes,  placées  à  peu  près  comme  le  sont  les  glandes  
 à  calice  que  l’on  voit  sur  la  langue  du  plus  grand