
CHA P ITR E XVI.
Î L E S S A N D W I C H .
A v a n t d ’e n tr e r d a n s a u c u n d é ta il s u r la v é g é ta tio n e x tr a o rd in a ir e
d e c e t a r c h i p e l , a v a n t s u r - to u t d e s ig n a le r les é to n n a n te s a n om a lie s
fo u rn ie s p a r le s m êm e s p la n te s d e b e a u c o u p d e g e n r e s , je c ro is q u ’il
e s t in d is p e n s a b l e , ic i b ie n p lu s q u e p a r - to u t a ille u r s , d e j e t e r d ’a b o rd
u n c o u p d ’oe il g é n é ra i s u r l’o rg a n is a tio n d u so l q u i le s n o u r r i t , a in s i q u e
s u r les in flu e n c e s d iv e rs e s so u s le s q u e lle s e lle s v é g è te n t.
Toutes ces île s , sorties du sein des flo ts , doivent leur origine à des
vo lcans, q u i , d’après nos observations, paroissent avoir brûlé à des
époques différentes , en suivant peut-être une direction qui approche de
celle de l’Ouest à l’Est ( N. O. et S. E. ). En effet, dans les îles de
1 Ouest, la décomposition de la lave est plus avancée que dans celles de
l’Est. Si cette lave étoit composée des mêmes principes et dans un état
semblable de fusion et de vitrification, cette présomption se changeroit
en certitude ; mais jusqu’à quel point peut-on l’admettre ?
Le temps a déjà rendu les îles de l’Ouest susceptibles de culture sur
presque toutes leurs parties ; la chaleur et l’humidité réunies commencent
à avoir le même résultat sur celle d’O w h y h i, que je choisis pour sujet
de mes observations générales , parce que, située à l’Est, elle est la plus
grande et la plus élevée de cet archipel.
La décomposition de la lave s’y exerce sous des conditions que je
dois signaler, puisque c’est à elles que j’attribue cette diversité de formes
si singulières qu’offrent là majeure partie des plantes de ces îles.
La lave est vitrifiée, brillante près du rivage. A 150 toises, elle est
encore d u re, mais opaque et rugueuse ; et d é jà , vers ce p o int, elle
éprouve un premier degré de décomposition. A une élévation de 250
à 300 toises, l’action simultanée du calorique et des nuages qui baignent
constamment cette partie d e là montagne, décomposent cette la v e , et là
seulement commence aussi la végétation naturelle de ces îles. Elle est
bien différente, bien autrement active que celle qu’on observe sur
quelques points isolés du rivage, o ù , étrangère en quelque sorte, elle
n’est entretenue que par des filets d’eau qui descendent des montagnes
et entraînent de la terre végétale dans leur cours.
Malgré le désir que j ’en avois, je n’ai jamais pu franchir les nuages,
toujours fixés à une élévation'de 300 à 600 toises au moins. II m’a
donc été impossible d’étudierles plantes alpines (anémophiles) qui doivent
croître au-dessus d’eux.
II est probable qu’à cette hauteur leur nombre et leur vigueur vont
toujours en décroissant ; et l’on finit probablement par trouver la lave
nue au sommet de ces montagnes, ainsi qu’on le remarque à leur base.
Ces premières considérations conduisent naturellement à partager mes
observations en trois séries ou régions. La première comprendra la
végétation des plages cultivées, et sera précédée de l’énumération
des plantes tbalassiophytes , qui toutes sont d’un usage journalier. La
deuxième indiquera la nature et l’état du peu de plantes que l’on trouve
depuis ce point jusqu’au bord inférieur de la ligne ordinaire des nuages.
Dans la troisième , j’examinerai les productions végétales (néphélophlies)
vraiment indigènes de cette partie des montagnes qui est renfermée
dans ia région entière des nuages.
L ’ordre que je vais suivre dans cette exploration semble le plus méthodique
et le plus naturel. C epend ant, l’ordre inverse ne le seroit-il
pas autant, puisque c’est de la partie nuageuse des montagnes que
sont sortis d’abord les végétaux propres à cette terre? Mais cette marche,
opposée à l’usage, auroit le grave inconvénient de placer brusquement
l’observateur au centre d’un pays inconnu, parmi des productions nouvelles
, au iieu de l’y faire arriver par une gradation insensible. Suivons donc
la nature de moins près, et ne nous écartons point des routes déjà frayées.
P RE MI È R E RÉGION.
Le peu de jours que nous avons passés sur cette île ne nous a pas
permis d’en explorer les plages de manière que nous pussions donner ici
le détail de ses richesses en plantes marines, qui néanmoins paroissent
y être aussi nombreuses que variées.
Voyage de l ’Uranie. — Botanique, i 2
i*Ml
il%I