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CHAP ITR E XI.
Î L E S D E l ’ a m i r a u t é .
L e s calmes prolongés que nous éprouvâmes en vue des lies de l’Am irauté
, me laissèrent ie loisir d’observer en ce iie u , ainsi que nous 1 avions
déjà fait près de l’ile Pisang, des productions végétaies enlevées aux
rivages voisins par les hautes marées, et que promènent les nombreux
courans qui seuls alors paroissent troubler la tranquillité de la mer.
Ces corps flottans, constamment réunis par bancs immenses, nous
rappeioient les trains de bois qu’on voit sur nos rivières. Mais leurs
masses, quoique plus denses et plus volumineuses, étoient loin d’offrir
cette diversité d’objets que nous avions vus charriés par les courans des
îles Moluques.
En e ffe t, à peine trouve-t-on ici quelques vestiges de plantes réellement
terrestres , si ce n’est pourtant des fragmens de b o is, et des
fruits durs noircis par une longue macération, tels que ceux de ïaleurites
triloba, de plusieurs espèces de dolichos; les graines huileuses de 1 hernandia
sonora, &c. Ces dernières graines, dépouillées de leur enveloppe
calicinale, sont de la forme et de la grosseur d’une balle de mousquet.
Les productions marines composent presque seules ces masses errantes;
on y aperçoit entre autres des ypstera (^. marina! ) , des sargassum
(j. ilicifolium et s. turbinatum) , des spharococcus, des fucus, et des fragmens
d’une grande laminaire ; plantes semblables ou analogues aux espèces
observées sur les plages de Rawak et dans les environs de cette île. C e
sont, de plus, des conferva et des oscillatoria floconneuses et en partie
gélatineuses, compactes, aplaties, de quatre à six pouces de diamètre ,
et portant encore parfois à leur face inférieure des traces de la terre
vaseuse d’où elles furent enlevées.
On y remarque aussi beaucoup d’éponges et d’autres polypiers coralli-
gènes, mais principalement un nombre prodigieux et varié de coquilles,
de crustacées, et de molusques. Une multitude de petits poissons se
pressent autour de ces vastes amas mobiles , et semblent se plaire à
l ’ombre qu’ils projettent.
Quoique les objets de zoologie ne fassent pas partie de mes attributions,
je parlerai pourtant ici d’un poisson nouveau que sa mâchoire
inférieure, qui est presque verticale et se meut d’avant en arrière, fait
distinguer de tous les autres (i).
(i) D ire que M M . Lesson et Garnot ont recueilli et dessiné avec un soin infini une
deuxième espèce de ce genre, c’est promettre aux naturalistes des renseignemens aussi prompts
que positifs sur la nature de ce singulier animal.