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,86 VOYAGE A UTOU R DU MONDE,
gouvernement supreme clans cette dernière épocjue, acltève de
nous éclairer sur scs vues et nous ôte même l’espérance d’améliorer
notre situation. Elle nous a démontré cju’on a le dessein
de comprimer les idées libérales qui forment l’esseuce de la société
dans le C h i li , et (|ue le gouvernement cherche à s’apjiro-
|>rler des attributions qui ue peuvent jamais lui appartenir, et
que l'on a vu seulement mettre en pratique dans les pays qui
gémissent sous le despotisme. On a imposé des restrictions à la
liberté de la presse; on a poursuivi jusqu’à la mort beaucou])
de dignes patriotes, pour avoir seulement insinué leur désir
de réformer quelques a b u s , et on les a sacrifiés sans les entendre.
On a insulté la dignité du peuple, en le sup])osant rejiré-
senté par la Convention préparatoire, dout l ’élection a été faite
par les gouverneurs des districts, qui ont nommé les personnes
désignées par le magistrat su p rêm e , et dont le choix est tombé
sur des hommes sans lumière s, sans v er tu, sans patriotisme,
ou criminels, ou partisans de ce chef. Ce corps monstrueux
n’a ])aru daus le Chili que pour le dégrader. Son premier acte
fu t de pro ro g e r pour un temps indéterminé l’autorité du suprême
directeur avec des facultés indéterminées, quoiqu’il l’eùt
obtenue déjà de cette manière six années consécutives. On s’est
conduit dans cette affaire sans la moindre discrétion ; on n’a point
pesé les inconvénients qui doivent résulter de la permanence
d’un magistrat suprême dans un pays où l’on n ’a connu d’autre
loi ([lie sa volonté; on a attaqué directement la lib e r té ,d e la
n a tio n , et on a ouvert une nouvelle route à l ’a rbitraire et au
despotisme. En défin itive , la Convention préparatoire a accrédité
d’une manière publicjue, et (|uelqucs-uns de ses membres
ont avoué m êm e , que l’objet de sa réunion n’avait pas d’autre
but. Mais il manquait encore à nos maux de voir le scandaleux
attribut de loi fondamentale que l ’on a donné à un règlement
intitulé loi d’état. Cette oeuvre à la formation de laquelle n’a
concouru aucun membre de la Convention , et qui avait pour
objet d’établir le despotisme ou de lui préparer le |)lus commode
a c cu e il, cette oe u v r e , qui devait éprouver le mécontentemeni
g én é ra l, qui devait répandre dans tout le Chili le germe de
la discorde, en déclarant privés de leurs droits et de leurs [iré-
rogatives les deux tiers d e là rép u b liq u e , a été sanctionnée par
la Convention, et le Chili a vu achever dans sa capitale même
la comédie la plus comjdètc que l ’on ait jamais représentée en ce
monde.
«Quand nous nous rappelons les deux dernières années de
notre existence, c ’est alors que nous connaissons à fond notre
déplorable é tat, et que nous ne trouvons déjà plus de moyen
de prolonger notre patience et nos souffrances. Deux mille personnes
environ sont mortes de faim durant ces deux années.
L ’humanité est profondément affligée à la vue de la scène la plus
triste qu’on puisse lui offrir : ce ne sont plus des hommes, mais
bien des squelettes, ceux qui occupent nos rues et nos portes
et que nous voyons e xp ire r , minés par la misère et la fa im , maux
auxquels nous n ’avons ]>as le jiouvoir de remédier. Ah ! la nature
fr ém it, l ’homme gémit et se désespère dans un état si violent et si
horrible. Nos gémissements élevés vers le directeur suprême ont
été mutiles. L a Convention jiréparatoire à qui nous nous sommes
adressés diverses fois ne nous a point é coutés; on a méprisé nos
larmes : elle s est occupée de sanctionner une loi jihitôt que de
conserver la vie à l ’une des villes jiour qui elle était faite.
« V o ilà , peuples dc la rép u b liq u e , notre véritable situation ,
voilà les justes motifs de nos plaintes ; ce sont eux seuls qui nous
ont porfos à nous réunir dans la capitale de notre jirov in ce , au
moyeu dc nos députés, pour exiger ce qui convient à nos b e soins
et ce qui nous apjiartient de droit. Ce n’est point ici une
réunion tumultueuse ni contraire aux lois. Nous ne voulons
point exciter une guerre civile qui plongerait la ré|)iiblique
Foyage de la Coquille. P a r t, iiist, 3 q
Fcvi-iev
1823,