SepteiiibiH
1822.
r iio r iz o n , à l'heure où il va se cacher dans les f lo ts , qu il dore
de ses derniers feu x , l’observateur voit arriver la n u it, q u i,
abaissant son voile v a p o r eu x , change tout-à-coup la s c èn e , et
montre à ses regards étonnés la surface de la mer scintillant
de lumières vives qui rivalisent avec les étoiles suspendues a
la voûte éthérée. Alors les heures ravies au sommeil s’écoulent
pour lui avec ra p id ité , les yeux attachés sur le sillage du navire,
ou errants sur les jets de lumière qui s’échappent des vagues
soulevées; et si l ’amour des recherches le domine, quel vaste
champ ouvert à ses investigations!
La jjhosphorescence des eaux q u i, sous les trop iqu e s, frappe
le navigateur le plus in d iffé ren t, devint à bord l ’objet d’une
attention particulière. La constance que l ’on mit à poursuivre
les myriades d’animaux microscop iques, qui pullulent à la surface
des mers, ne fut point sans succès : on parvint à en saisir
((uelques-uns, au moment où ils brillaient du plus v if éclat.
Semblables à des étincelles, ils disparaissaient en passant de
l’obscurité dans la lumière; ce qui n’augmentait pas peu la difficulté
de les saisir. V us à la lou p e , ces animalcules se montrèrent
le |)lus communément sous la forme de petits crustacés
de formes diverses, d’autant plus éclatants, qu’ils étaient irrités
par le mouvement qu’on leu r imprimait en les examinant. Deux
petits filets établis à la traîne du navire nous livraient ces
curieuses productions de l’O c é a n , que M . Lesson s’empressait
de dessiner et de décrire avec un soin tout particulier.
« D ’après nos propres ob servations, et obéissant à notre con-
« v ic tio n , dit ce zélé natura liste, nous ne regardons nulle-
« ment la phosphorescence de la mer comme susceptible d’être
» produite pa r une action purement physique ou chimique.
« Nous dirons qu elle est due à des animaux m a r in s , apparte-
c( naiit le plus souvent à des crustacés de genres très-dilférents;
« q u ’elle est propre à toutes les latitudes daus toutes les saisons;
« mais qu elle est plus habituelle et plus remarquable sous la Septembre
Cl zone torride; que le fo y e r de cette lum ière , émise par irr ita it
tion ou à l’époque de la p ro c ré a tio n , inconnu pour le jilus
11 grand nomb re , réside dans des glandes, jdacées en nombre
11 variable sur les côtés du thorax de certains crusta cés, à la
11 manière des foyers lucifuges de quelques insectes; qu’en fin ,
11 on doit la regarder, jusqu’à ce que des recherches complètes
11 et suivies viennent fixer l ’o p in io n , comme une modification
« des lois de la v i e , différente de la simple lumière s c in tillan te ,
11 qui résulte de la décomposition des substances animales.»
Quelles que soient d’ailleurs les vraies causes de ce phénomène,
il sera toujours un des plus beaux spectacles de ces pa rages,
et il commandera en tous temps l ’attention des naturalistes
comme de fh om m e du monde.
L e 25, notre route nous fit traverser un grand nombre de
méduses, parmi lesquelles nous en distinguâmes d’une dimension
extraordinaire. Nous manoeuvrâmes aussitôt pour mettre
en p a n n e , e t , dans la crainte de les perdre de v u e , nous jetâmes
à l’instant une bouée à la mer pour les signaler à l ’embarcation
q u i , envoyée à leur re ch e r ch e , rapporta une m éduse , désignée
depuis par M. Lesson sous le nom de medusa cyathiformis;
elle était énorme dans ses proportions, et au centre de f omb
relle se trouvait comme inqilantée une espèce d’anatifes d’une
forme particulière.
Le lendemain, poussés par une brise lé g è r e , l ’attrait toujours
puissant d’un beau ciel et d’une m er unie retenait cbacun sur
le p o n t, lorsque le passage d’un nombre considérable de v é lelles
fit naître les réflexions les plus b iz a r r e s , et donna lieu à
exprimer le reg ret qu’elles ne fussent point mangeables : tout-
à-coup s’éleva un conflit d’opinions sur l’emploi de ce radiaire
comme aliment. I l fut reconnu que les pêcheurs de la Méditerranée
en usaient parfois; e t, sous le rappor t des expériences