D éc em b re
1822.
CHAPITRE IX.
TRAVERSÉE DES ILES MALOUINES AU CHILI.
L e i 6 décembre 1822, toutes nos dispositions étaient faites
pour sortir de la baie Française , lorsque les vents, q u i, ju sq u ’à
ce jour, avaient soufflé de la partie de l’O uest, passèrent à l ’Est
et arrêtèrent ainsi notre appareillage. Cette circonstance nous
laissa quelque temps dans la crainte d’éprouver beaucoup de
retard à quitter ce m ouillag e, où nous n’étions arrivés q u ’après
avoir souffert bien des contrariétés; mais par b on heu r, le 18,
vers m idi, une brise fraîche et favorable se d éc lara , e t , avec
elle , nous pimies nous éloigner enfin de ce triste séjour.
A Jieine avions-nous perdu de vue la baie Française, qu’il
fallut lutter contre des vents de S. O. et des courants assez forts :
comme ils étaient contraires à la route à suivre jiour se rap-
jiroclier de la T e r re des Etats, nous jugeâmes qu’il serait jilus
avantageux de nous diriger vers la côte de Pa tagon ie , en passant
au nord des îles Malouines. Cette route nous paraît, dans
tous les cas, devoir être préférée à celle du Sud, parce qu e, dans
ces Jiarages, les courants jiortent jircsque toujours au N. E . , e t ,
cjii’en général, l ’on ne doit pas s’attendre à être favorisé par
des brises de l’Est. Néanmoins nous fûmes rejetés par des coups
de vent successifs, ju sq u ’au 4q parallèle, et cc ne fut qu’avec
beaucoup de difficultés que nous nous avançâmes vers le Sud.
Le 26 d éc em b re , étant précisément au milieu du canal qui
sépare les iles Malouines du continent de l’Am é r iq u e , nous
passâmes à douze milles dans l’Est de la position assignée au
rocher de l’A ig le , que l ’on dit avoir été découvert, le 1“ octobre
18 1 7 , par 5 i° 5 i ’ de latitude 6167° 10’ de longitude. Cet
é cu e il, dont nous ignorions alors l’cxistcn co, ne se montra pas
à notre vue, quoique l’horizon fût clair dans tous ses jioints;
nous fûmes seulement entourés toute la journée d’a lbatrosses,
d’alcyons et d’uue espèce de jiétrcl de couleur grise-blanohâtrc ;
mais l’on sait que ces oiseaux ne sont point un indice certain
du voisinage des rochers où ils se réfugient. Cette v ig ie , laquelle
aurait écliapjié â l ’investigation de tons les navigateurs q u i,
depuis Magellan jusiju’à nos jo u r s , ont sillonné l ’Océan dans
l ’O uest des iles Malouines, n ’a jioint non plus été retrouvée p a r le
capitaine Weddell, qui, jiresqu’en même temps que nous, a croisé
dans ces mer s, o ù , quoiqu’il fût sjiécialement occupé de la
pêche des p h oq u es , il s’est livré à des recherches intéressantes
Jiour la navigation. Voic i comme il s’exprime au sujet de cet
écueil, dans la relation de sou V o y a g e , jiage 18 : « Le 2 jan-
«vier 182 3, â m idi, nous étions jiar 5 i ” 55’ de latitude et ( ¡ f l i - j
«de longitude. Comme c’était la latitude assignée au rochei-
«l’A ig le , découvert jiar le cajiitaiue Bristow en 1 8 1 7 , je m ’a-
« vançai dans l’E. N. E . , dans l ’intention de le reconnaître ; mais,
«après avoir couru quatorze milles, ayant du h aut des mâts une
«vue de dix milles d’étendue, je n’aperçus rien. S’il avait été
«exactement jila e é , j ’aurais dû le trouver. Ce roch er doit être
«dangereux ; car il est jilacé entre les îles Falkland et la côte de
«Patagonie. On dit que c’est une réunion de brisants de 3oo
«yards (278 mètres) d’étendue. M, Poole le place par la latitude
«de 5 i° 5 i ’ et la longitude de 67° 10’ , position sur lacjuelle, d’a-
«près mon opinion, on ne doit point compter. » Ce qui précède
suffit Jiour jirouver cjue ce ro ch e r , s’il existe, 11e jieut être jilacê
entre les méridiens de 66” 5o’ à 67” 35’ par la latitude qu’on lui
assigne; et aujourd’hui que des bâtiments de l ’état doublent
1822.