[ilace, donna l'ordre du d éjiart, et annonça au gouverneur
qu'il pouvait considérer la paix coiinnc rompue, l ’a ffront qu'il
venait de recevoir lui étant un sûr garant que ses com|)atriotes
accueilleraient avec transport ses paroles de guerre. Dans les
circonstances difficiles où se trouvait engagé le C ln li, uue jia-
reille rupture eût entraîné sans doute de funestes consétjucuces,
et tous les habitants avaient encore trop présentes a leur souvenir
toutes les horreurs commises jiar ces mêmes Araucaniens
pour ne pas frémir d’effroi à la seule idée de les avoir encore
pour ennemis. Aussi la Segnorita Dolores n entendit retentir
|)artont autour d’elle qu’un long cri de détresse, et pro fon dé ment
affectée des nouveaux malheurs (jue son refus allait attirer
sur sa terre n ata le , son ame jtuisant une force héroi(jue
dans les sentiments relig ieux, qui dominent toujours dans le
coeur d’une Ch ilien ne , au milieu des plaisirs comme au sein de
la misère, lu i donna le courage de faire à sou pays un sacrifice
iuoiü. Soumise, dévou é e , sans pousser une jilainte, linfor tun ée
Dolores liv ra sa main au tyran sauvage (jui 1 adorait. L A ra n -
canien ivre d’une joie féroce, (jui exprimait tout-à-Ia fois les
transpoits d’un amour triomjthant, d’une audace révoltante, et
d’im amour-jiropre satisfait des égards accordés à son cou ra g e ,
jaromit la consei’vation de la jia ix, et alla au milieu de sa tribu
célébrer ses noces avec la triste victime de sa jiassioi). Ou a eu
dejmis des nouvelles du sort de la jeune fille. Elle est devenue
mère ; et, traitée par son sauvage éjioux avec des égards inconnus
dans les moeurs araucanicnnes, elle a plus d’une fois secouru
la misère de ses comj>atriotes (jue les malheurs de la guerre civile
ont jetés errants daus ces contrées.
Le général Ereire devait à sa haute réjmtation de bravoure de
maintenir dans son alliance ces farouches Araucaniens, auxquels
il s’était rendu redoutable jiar sa jiersévérante activité à jtour-
suivre leurs tribus déprédatrices. Dans l’étude q u ’il avait faite
de leur manière de comba ttre, il avait reconnu ([ûe la longue
ja v e lin e , dout le fer était empoisonné, était dans leurs ma in s,
une arme terrib le; et il avait formé un bataillon dc. lanc iers,
q u i, dressé par ses soins à ce genre de comba t, avec tout l’ensemble
de la discipline européenne, lui avait permis de leur
résister avec avantage et de les détruire avec jdus de facilité dans
toutes les rencontres. Le cavalier cbiliea est réputé b ra v e , et
ceux que nous avons eu l’occasion de questionner sur l ’effet de
la lance dans la main dc f Araucanien, nous répondaient avec
une vivacité qui peignait bien l ’impression que cet ennemi avait
faite sur eux dans les combats, par ces mots : terribile, senhor;
terribile. Outre ses armes ordinaires, le cavalier chilien est aussi
muni d’un la c e t, dont il se sert surtout dans la poursuite de l ’cii-
nemi, soit pour l'a r rê te r , soit pour le faire p é r ir , eu le traînant
à la (jucue de son cheval avec, autant de rajûdité (ju Achille
traîna Hector autour des murs de Troie.
I.Ai cavalerie formait la majeure jiartic des troupes du général
Freire. Il en avait déjà dirigé uue division sur S an tia g o , et il se
préparait à jiai'tir lui-même avec celles (ju’il venait de j>asser
en revue, lors(ju’un courrier extraordinaire lui apprit le soulèvement
de cette capitale et la déposition d’O ’Higgins. A cette
nouvelle (jui se répandit rapidement, toute la ville dc la Concepcion
retentit des cris de joie des soldats et de la jiopulace.
Chacun se félicitait comme si cet événement dût ramener le
bonheur et fiûre refleurir le Chili. Les forts l’annoucèrent par
des salves d’artillerie. Il y eut grande réunion a 1 hôtel du gouvernement,
oii le soir le général donna un bal aucjuel assistèrent
les autorités et les jirincipaux habitants dc la ville.
Durant cette soirée, la Concepcion, qui ju sq u ’alors nous avait
paru eiivelojjpée d’un voile funèbre, sembla sortir de son long
deuil. Des illuminations eurent lieu. La grande place oû la musique
d e là garnison exécutait des airs patrioti(jues, offrait une
réunion brillante de jeunes femmes qui mariaient légèrement