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,4 4 V O Y A G E A U T O U R D U M O N D E ,
filer sur la grande jilace les Araucaniens employés comme auxiliaires
dans les troupes chiliennes. Montés tous sur des chevaux,
ils étaient armés d’une javeline d’environ dix-huit pieds de longu
eu r , ([u’ils portaient de la main droite, et d u n lacet placé
sur la croupe de leur cheva l; à leur ceinture pendait un large
coutelas semblable au machete des Espagnols. L eu r taille nous
¡larut être moyenne. Ils avaient le teint cuivré, les yeux petits,
noirs e l pleins de feu, le nez un peu aplati, les lèvres épaisses,
le menton garni de quelques poils, les cheveux n o irs, longs et
flottant sur les épaules, les membres musculeux, les (ormes
a thlétiques; l’ensemble de leur figure large et massive portait
l ’expression dc la brute et d’une sorte de féroce impassibilité.
Leur habillement consistait en une pièce d’étofle bleue de
laine, tournée autour de la ceinture et descendant en forme de
robe jusqu’au-dessous du mollet, en un poncho de la même
c o u le u r , eu une espèce de bonnet conique de peau de mouton
ou de laine. ( P. n" 1 . ) Us avaient en guise de souliers un cuir de
boeuf (]ui, leur couvrant la plante des pieds, était noué au-dessus
j i a r des cordons de même sorte. Ils portaient des éperons armés
de molettes très-grosses, et des étriers en bois de forme singulière
ou eu corde de boyaux. Leurs chevaux étaient caparaçonnés
avec trois ou quatre peaux de mouton et une couverture
de laine b le u e , auxquelles étaient apiiliquées ou suspendues
diverses plaques d’argent. Ce dernier ornement n ’était point
commun à tous; il ne servait point d’ailleurs de marque distinctive
, et u ’indic|uait que le plus ou moins de luxe du cavalier
qui en était orné.
Au milieu des guerres qu’a fait naître l’indépendance du
Ch ili, les tribus de l’Araucanie ont subi des divisions intestines
et se sont partagées en différents partis sous la dénomination
de Réalistas et de Ponchos, suivant qu’elles soutenaient les
Espagnols ou les Chiliens. L ’épithète de Poncho est donnée à
celles qui servent les indépendants. Diverses familles de la
Concepcion ont, dans ces temps désastreux, tantôt suivi ces sauvages
comme jirisonn ières, tantôt trouvé un refuge assuré au
milieu d’eux contre la fureur des partis. Nous avons obtenu
dans leur conversation, daus celle du général Freire et de ses
officiers, des renseignements sur ces hordes barbares tpii p rou vent
qu’elles sont bien loin de toute espèce de civilisation.
Ces Indiens ne sont fidèles aux partis q u ’ils ont épousés,
que par la haine qu’ils se portent mutuellement de tribu i\
tr ib u , par leur amour effréné du pillage et par l’intérêt dn
moment qui décide toujours de toutes leurs actions. Leu r fidélité
est sans cesse soumise à la mobilité de ces passions funestes.
Si on les a vus quelquefois recevoir sous leurs toldos les vaincus
et prendre tout-.à-coup leur défense, ils ont toujours été portés à
cette action généreuse par un esprit de vengeance particulière ■.
c’est que dans le parti opposé se trouvait comme alliée une
tribu qu’ils voulaient exterminer. Chez eux la haine domine
toutes les autres passions, et c’est elle seule qui est la garantie
la Jilus durable de leur fidélité. Ils sont tons d’nne bravoure
éprouvée, ardents, impétueux, sans pitié jiour leurs ennemis
iju’ils massacrent avec une h orrible impassibilité. Impérieux et
vindicatifs, ils sont d’une méfiance extrême à l ’égard de tous
ceux (ju’ils ne connaissent point, mais hospitaliers et généreux
envers ceux qu’ils ont pris jiour amis. A'éliéments dans toutes
leurs jiassions, ils se montrent jaloux à l’excès de leur liberté
et de leurs d ro its , et sont toujours prêts à les maintenir les
armes à la main. Ils gardent éternellement le souvenir de la
moindre in ju r e , ne jiardonnent jam a is, et ont une soif inex-
tiiiffuible du sans rt O de leurs ennemis.
loe colonel Beauchef, à sou arrivée à la Concejicion, venait
dc terminer heureusement, aidé d’une troupe auxiliaire de ces
sauvages, une expédition militaire contre le cacique Millau,