, , VOYAGE AÜTOÜR DU iMONDE,
1K> iiégligei'imos point de nous livrer aux différentes observations
de physique qui étaient une des branches spéciales des opérations
du voyage. Nous observâmes rinclinaison de fa igu ille
aimantée, que nous trouvâmes de 63“ 58’, et nous limes oscillej'
le pendule invariable dans des lieux convenables à ces deux
genres d’expériences : les résultats (|ue nous obtînmes furent
adressés aussitôt â f Académie des Sc iences, qui daigna les
aeeneillir.
Nos cinq montres marines étaient ionrnellemcnt. comparées
â la pendule cle l’observatoire, dont M. B a r ra i, directeur par
intérim, et MM. les officiers de l’expédition, réglaient la marche
diurne, au moyen de hauteurs absolues dn soleil cjuils observaient
au cercle répétiteur astronomicj[ue. Ces montres furent
transportées â bord de la corvette, le 8 août 1822.
Le moment de fixer le départ était venu. T o u t était suivani
nos désirs et clans le meilleur état possible : la corvette avait
été reconslruite avec une rare solidité; les objets du matériel
avaient été confectionnés avec cm soin tout particulier par les
diverses d ire c tion s, dont nous ne saurions trop reconnaître la
sollicitude des chefs; les vivres étaient d’une qualité supérieure
•. rien ne manquait enfin à notre expédition que le succès
cpii nous apparaissait an loin enveloi>pé des chances cle 1 avenir.
Les hommes de l ’équipage avaient reçu les avances, dont
le ministère avait fixé la cjuotité a six mois. ï,c s dettes, c[ue
des circonstances particulières leur avaient fait contracter, devaient
être religieusement acquittées. D ’ailleurs, au moment cle
partir pour un long v o y a g e , ils éprouvaient, comme nous, le
désir lûen naturel de revoir encore une fois des jiarcnts ou
des am is , dont ils allaient s’éloigner ])eut-ctre pour toujours. A
cet égard, nous pressentîmes leur demande, et leur laissâmes consacrer
une partie de la journée du 10 août à ces diverses o b ligations.
Ils descendirent à terre par division et à tour de rô le ,
(le manière â ne |)oint arrêter un seul instant les pré|)aratif’s
(le l ’a jipareillag e, (jui furent terminés dans la soirée. Pas fin
marin ne manqua à l'heure du rendez-vous; et nous nous félicitâmes,
dans cette occasion, de leur vo ir justifier la première
marcjne de notre confiance : tous les matelots, de notre choix,
s’étalent présentés de bonne vo lon té, et nous désirions exciter,
autant (|ue possible, l’ardeur dont ils nous avaient paru animés,
en prévenant leurs besoins , en ne laissant germer dans leur
esprit aucune cs|)èce de regret cle s’ctre embarcpiés dans une
campagne hasardeuse.
Le 1 I août 182 2 , par une belle matinée, la corvette la Coquille
leva l’ancre, et sortit de la racle cle To ulon en prolongeant
le cap S ep e t, sur lequel reposent les cendres de l ’amiral La-
touche-Trévillc, fu n e des gloires de la marine francçaise. C ’était
la seconde fois que nous quittions ce port pour exécuter le
tour du m o n d e , entraîné [lar le v if désir de faire (pielques découvertes
utiles aux sciences; et pourtant ce cap couronné
d’une tombe (pu réveillait en nous des idées de gloire et de
néant, l ’aspect du soleil qui éclairait de ses [cremiers rayons les
sommités des terres, la mer doucement agitée, le bruit léger
des flots qui venaient expirer sur la |)oupe, enfin le sillage ra pide
du navire c|ui abaissait â vue cfoeil le rivage où s’attachaient
nos regards ■. tou t ce vaste tableau mouvant fit naître mille
souvenirs, rendit le bord silencieux, et nous pénétra de cette
vérité incontestable, que l’amour pour la patrie ne se fait ja mais
mieux sentir c|u’alors (pi’ou s’en éloigne. T o u te fo is , à la
clarté du jou r su iv ant, la mélancolie clans lac[uelle le moment
du départ nous avait plongés disparut et fit place à toutes les
illusions de l’espérance.