,,^4 VOYAGE AUTOUR DU MONDE.
.»liait à cela un caractère très-doux qui le rendait docile à recevoir
la direction qu’il plaisait au gouvernement de lui donner.
Lorsque la cour d’Espagne, pour subvenir à ses besoins toujours
renaissants, eut mis à prix les postes élevés des Indes,
l’esprit d’égo’isme s’emiiara de tous les foiic tio iiiialre s, et les
intérêts du Chili furent sacrifiés à l’avarice des capitaiiies-géiié-
rau x , des intendants de juridiction, des gouverneurs et des officiers
subalternes. Les malversations loin d’étre punies furent
to lé ré e s , et attirèrent même des récompenses à leurs auteurs.
Le commerce ne fu t plus qu’un monopole autorisé jiar les lois
co lon ia le s, et ce fut au nom de l ’autorité royale que quelques
Espagnols jirivilégiés firent ainsi un trafic scandaleux, dont le
résultat définitif fut la ruine des intérêts du p a y s , et par suite
celle des finances de la métropole. L ’<avarice de tous les employés
liv ra , pour ainsi d i r e ,le Chili au p illag e ; e t, quoique le
système d’administration établi présentât un contrôle très-sév
ère, ces excès restèrent toujours impunis par l ’accord qui
existait entre les officiers chargés de se surveiller les uns les
autres. D ’ailleurs l’obéissance passive sanctionnée par les pouvoirs
religieux et c iv il, en changeant tout inférieur en esclave
dévoué, donnait à ce système de corruption une force devant
laquelle vint se briser même la volonté ro y a le , lorsqu e , plus
éclairée sur ses véritables Intérêts, elle voulut rétablir 1 ordre.
Des lo is , des ordonnances multipliées avaient réglé la forme
du gouvernement établi au C h ili; mais ceux qui étaient chargés
de veiller à leu r exécution étaient toujours ¡irêts à les interpréter
suivant leurs caprices ou leurs intérêts. Le r ich e comme le pauvre
ne pouvait obtenir justice s’il n’était assuré d une protection
puissante auprès des ju g e s , ou s’il n’.avait pas assez d o r p o u r
acheter leur décision. T o us les ressorts de la chicane, tous les
re tards , les vexations d’une procédure désespérante étaieut rais
en usage pour obtenir un ju g em en t, dont le résultat était tou-
PART IE H ISTO R IQ U E , CHAP. XI. i-]S
jours en faveur de la jiartie la jilus influente par ses relations
de famille ou p a r la corrujition indirecte du juge.
Le riche reportait dans les campagnes l ’oppression dont il
gémissait dans les villes. L à les jiauvres étaient sons son entière
dépendance; c.ir, jiar son or, il avait le pouvoir de les récom-
jieiiser ou de les faire punir. Les ju e c e s de P a r tido , dout les
attributions jieiivent être comjiarées à celles de nos ju g e s de
jiaix , lul étaient entièrement dévoués : ignorants et grossiers
comme les paysans qu’ils étaient appelés à ju g e r , et ne recevant
du trésor ro y a l aucun émolument pour la charge qu’ils rem-
jilissaient, ils étaient toujours disposés à sacrifier leurs devoirs
à leur intérêt. Aussi faisaient-ils un trafic continuel de leur auto
r ité , et c’était avec d’autant moins de scrujiule qu’ils étaient
sûrs de rimjmnité. Le gouverneur dc jirovince confirmait toujours
les actes du ju g e , quelque injustes et arbitraires q u ’ils
fussent, toutes les fois que ces actes étaient exercés contre les
paysans, et jiourvu (ju’ils ue fussent jias préjudiciables à \ha-
cendado, dont il se faisait une loi de protéger les intérêts. Le
jiaysan (jui osait en ajipeler au sujicricur jirovincial d’un acte
quelconque du ju e c e de Partido n’y revenait pas une seconde
fois; car sa jilaintc était accueillie de manière à ce qu’elle eût
un résultat funeste pour lui.
Le clergé lu i-m êm e , enivré de richesses et de pouvoirs,
avait suivi le torrent de ces désordres. Sa moralité était tombée
dans un état de dégradation in o u ïe , jiuisque loin de cacher ses
v ic e s , il les étalait en plein jour. Pour éviter tout d é ta il, il nous
suffira de renvoyer le lecteur à l’observation de notre impartial
Lapérouse à ce sujet, lors de son passage à la Concejicioii.
Ce fut d’abord à l’abri du nom du roi d’Espagne et à la suite
(les événements de B.ayonne et dc l'Escurial que le Chili fit les
jircmiers pas vers son indépendance. On vit alors combien était
forte la haine des créoles contre les Espagnols ; car les jireiniers
réï.lcr
1853.
il
'