LÉZARDS CROCODIUENS
de terre. Elle couduit ses pelits, les défend et les nourrit pendant
trois mois en leur dégorgeant la pâture. 11 dit aussi que les femelles
sont plus nombreuses que les mâles, et que ceux-ci se battent
avec acharnement lorsque vient l'époque de l'accouplement, qui
a lieu dans l'eau.
Observations. L'inscription sur les registres de la science du
Crocodilus acutus, comme espèce reconnue distincte, date de 18o3,
époque à laquelle M. Geoffroy, dans le tome lo des Annales du
Muséum d'histoire naturelle, en publia la description comparativement
avec celle du Crocodile Vulgaire, le seul qu'on connût
alors. Mais le Crocodile à museau effilé avait déjà été étudié. Un
savant naturaliste , le père Plumier, avait fait sur elle des observations
curieuses qui sont demeurées manuscrites, à l'exception de
ce qu'en ont publié, chacun séparément, Schneider et Gautier (i).
Les manuscrits de Plumier renferment enoutre un excellent dessin
de ce Crocodile, qui se trouve aussi représenté plusieurs fois dans
l'ouvrage de Séba. En effet, il n'est pas douteux que tous les
jeunes Crocodiles de la planche 104 de son premier volume, depuis
le n° I jusqu'au n° g, ainsi que le n» 12, appartiemient à
l'espèce dont il est question ici. 11 existe d'ailleurs dans notre
collection deux individus venus du cabinet du stathouder, que
nous avons reconnus être des modèles de ces figures.
Nous pensons également avec M. Cuvier, que la gravure n" i
de la planche 106 du tome i«"" de ce même ouvrage de Séba est
un portrait du Crocodile à imiseau effilé, peu exact, il est vrai,
mais néanmoins reconnaissable pour ceux qui se sont particur
lièrement appliqués h. distinguer les espèces de Crocodiliens.
L'auteiu' de ce dessin a non-seulement mal représenté les plaques
du dessus du corps qui paraissent imbriquées ; mais il a aussi
augmenté de beaucoup le nombre des dents, et fait aux pieds
de derrière im doigt de plus que n'en a aucun Saurien de la famille
des Aspidiotes. C'est ce qui a induit M. Lacepède en errem-.
Ce natm-aliste, jugeant que l'animal représenté par cette figure
ne devait pas être un Crocodile, mais un Saurien semblable au
Lacerta Caudiverbera de Linné, qui appartient au contraire à la
famille des Geckotiens, l'inscrivit sous le nom de Fouette-Queue, à
la suite de ses Crocodiles.
Foyez page 58 du présent volume , et pag, 664 et 671 du
ime.
( I )
a^ voume
o u SAURIENS ASPIDIOTES. G. CROCODILE. G. 125
Le soin que nous avons mis à étudier le Crocodile à museau
effilé, sous le rapport des différences individuelles qu'il présente
dans quelques-iuis des détails de son organisation extérieure,
nous a pleinement convaincus que M. Cuvier a fait un double emploi
de cette espèce, en étabhssant celle du Crocodile à deux
boucliers. Car, en quoi trouve-t-il que ce dernier diffère du
Crocodilus acuius P En ce que les mâchoires sont un peu moins
effilées, en ce qu'il a deux plaques de moins sur la nuque et
quatre sur le cou. Mais, parmi les individus incontestablement
de la même espèce qui nous ont été envoyés de Saint-Domingue
par M. Ricord, il y en a plusieurs qui, quant au nombre des
écussons de cette partie du corps, forment le passage du Crocodilus
biscuiatus au Crocodilus acuius, ayant quatre plaques carénées
derrière l'occiput et six sur le milieu du cou. Ainsi, il en
existe un auquel il ne manque que deux carènes nuchales, un
autre qui est privé de la dernière rangée des cei'vicales, et un
troisième qui n'a plus que deux écussons nuchaux et quatre cervicaux.
Nous pourrions même , à la rigueur, contester que l'un
des deux individus sur lesquels M. Cuvier a établi son espèce, le
seul malheureusement que nous ayons retrouvé dans la collection
, ait sur le cou un moindre nombre de plaques que ce dernier,
attendu que chacune des deux qu'on y voit offre une légère
suture qui laisse croire qu'elles sont intimement soudées l'une
avec l'autre. Alors la seule différence spécifique qui resterait entre
ces deux Crocodiles ne consisterait plus qu'en, un peu moins d'étroitesse
dans les mâchoires du Crocodile à deux boucliers que
dans celles du Crocodile à museau effilé ; mais on sait, quand il
n'existe point d'autres caractères, combien peu on doit attacher
d'importance à celui-ci, tant il est variable chez les individus des
espèces de Crocodiliens en général.
Quant au système de coloration de son Crocodile à deux boucliers
, M. Cuvier observe avec raison qu'il est d'un brun plus
foncé que celui du Crocodile Vulgaire ; mais nous pouvons assurer
que, parmi nos individus empaillés du Crocodile à museau aigu,
il en est plusieurs chez lesquels il l'est pour le moins autant.
De tout ceci il résulte bien évidemment c[u'on ne doit plus soupçonner
le Crocodile à deux boucliers d'appartenir à l'espèce dont
Adanson a fait mention sous le nom de Crocodile noir. Celui-ci
doit être nécessairement recherché parmi les espèces africaines.
Nous dirons, à l'article du Crocodile à nuque cuirassée, les motifs
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