120 Voyage d’ Egypte
L e Loifir qne nous avions nous invita à mettre pied à terre. Nos gens tirèrent
fur quantité de pigeons, & en tuèrent; mais comme ce n’étoit pas la faifon où
il y a des petits, ils étoient v ie u x , & (î durs qu'on ne pouvoit les manger.
Us trouvèrent mieux leur compte à tuer une forte de Perdrix, qui étoit déli-
deu fe , & de la grandeur de nos Perdrix rouges. Elles avoient les plumes fcmbla-
bles à celles des Pintades, & la qnenë comme l’Hirondelle, L eu r chair a un goût
aromatique, & beaucoup de fumet. Il n’y avoit perfonne dans notre Barque, qui
les connût.
Nous cueillîmes auffi beaucoup de pourpier parmi les bleds.
VENDR ED I 22. N o v em b r e .
P oint de v ^ c le matin. la’après-midi, il s’en éleva un très fort ; mais il venoit du
Sud ; de forte qu’il nous força de reftcr oîi nous étions. A ce grand vent de Sud
fuccéda un nouveau calme, qui fut fuivi d’un petit vent de Nord-Oueft. Nous
mîmes à la voile pour en profiter ; mais i! ne dura pas long-tems ; & le calme, qui
nous reprit, nous réduific à faire tirer la barque contre le courant. Cette manoeuvre
ne nous avancoit pas beaucoup: nous ne faifions que très-peu de chemin avec beaucoup
de peine ; cela nous fie réfoudre à attacher la barque au bord Oriental du Nil.
SAMEDI 23. N o v em b r e .
E n c o r e grand calme le matin. Nous allâmes à terre pour y chercher quelques provifions
; mais nous n’en trouvâmes point ; & nous rcvinmes à bord. Peu de tems
après, nous fûmes en état de remettre à la voile, au moyen d’un petit vent de Nord-
Oueft. Il ne dura pourtant guère ; & nous fûmes réduits à reprendre la corde, donc
nous fîmes ufage jusqu’à Midi, que le vent devint affez fort, pour nous faire avancer,
& même pour rompre notre vergue de Mizaine. Cet accident fut caufe que nous
retournâmes à Salehie, oîi pendant qu’on nous remcccoic une autre v ergu e, nous
fîmes des provifions de bouche pour quelques jours. Nous remîmes enfuite à la
voile, & nous avançâmes environ une licuë ; mais le vent, qui étoit Nord-Eft, devint
li violent, qu’il nous contraignit de ferrer toutes nos voiles. Nous nous trouvions
'alors vis-à-vis de
GIESIRET EUTFEEG.
C c ft une Islc fituée aifez près de la rive Orientale du Nil. Elle a un Village
de même nom, avec une Mofquée, & un Bosquet, qu i, quoique petit, contribue à
rendre
vendre fa fituation fort agréable. J ’en ai levé une vuë. 11 y a vis-à-vis de GieCret p l a n c h e
Eutfeeg deux Villages. Celui qui eft à l’Orient s'appelle
SOLL,
Et celui qui eft à l’Occident fe nomme
EDFU.
Vers le foir, le Vent devenu plus traitable, & Nord, nous donna le moyen de
faire du chemin. Nous paflames devant deux Villages l’un_ à l’oppofice de l’autre;
fçavoir : BRUMBUL,
Sur la rive Orientale, &
HUASTA
Sur 1a rive Occidentale. L e nom de ce dernier fignifie le fied ia teu r .
Nous découvrîmes presque auffi-tôt deux Isks, vers le bord Oriental du Fleuve.
La première, qui n’a qu'un quart de lieuë de longueur, fe nomme;
GIESIRET ELL GÜKMAND.
L ’autre, q u i peut avoir le double de longueur, s’appelle
GIESIRET BARRAKAED.
Elles-ne font feparéçs l’une de l’autre, que par un petit paffage; & elles ont
chacune u a Village.
L a nuit, nous aimiTâmes la barque devant
SAUVIED-ELMASLUUB,
B ourg, fur la rive Occidentale du Fleuv e, vis-à-vis dc Giefirec Barrakaed. Il
eft accompagné d’une Mofquce; S: fon nom veut dire; l'A b h cu -J o ir de la C r o ix .
D IM AN CH E 24. Novembre.
J ’allai encore voir, de grand matin, 1a faufiè Pyramide, dont j’ai fait mention ci-
dcITus. J ’cu étois à une diftance aifez grande. Je l’-approchai néamnoins aifez
pour juger dc fa conftrucf ion, & pour remarquer les briques qu’on y a employées.
A mon retour, à Sauvied.Elinasluub, nous reçûmes k vifite de Muftapha,
frère du K ta ja , ou Colonel Osman-Bcy. Il nous fit préfent de deux Moutons, de
trente poules, d’une centaine d’oeufs & d’un panier de pain. En revanche, nous
Tom. II. Hh lui
LXV. teii :
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