Il étoit alors à la fleur de fon âge, vif, fage, éclairé,
d’un courage qu’aucun peril ni aucune fatigue ne rebutoit,
avec cela d’un goût fin & fur, Obfervateur habile, grand
Deiïïnateur & bon Mathématicien. Il y avoit plus encore :
Une forte en vie d’examiner fur les lieux les merveilles de
l'Egypte, avoit prévenu en lui l’ordre du Maître.
Etant à Florence, il avoit trouvé occafion de lier
commerce avec Mr. le Baron de Stofch, fi connu par fon
favoir & par fon beau Cabinet de Pierres gravées, de Médailles
& d’autres Antiquités. La conformité de leurs
goûts les unit bientôt plus étroitement. Les entretiens
qu’ils avoient tous les jours enfemble, rouloient d’ordinaire
furies belles connoillânces, & principalement fiirl LIiftoire
& les Antiquités. Mr. de Stofch, plein d’admiration pour
celles d’Egypte, regrettoit fouvent l'incertitude & la dc-
feauôfité des Relations de cette Contrée, tant anciennes
que modernes. Notre Voyageur entra fans peine dans les
idées de fon Ami. Infenfîblement il fe laillâ aller au défir
de voir les bords du Nil. La gloire qu’il trouvait à inftruire
le Public de tant de fingularités interelfantes, firifoit diljra-
roître à fes yeux toutes les difficultés qu’il auroit à furmon-
ter pour y parvenir.
Dans cette difpofîtion il reçût à Florence les Ordres
de la Cour. Il leur obéît avec zèle & fit avec empreflé-
ment les apprêts de fon Voyage, guidé par les lumières de
Mr. de Stolcli & par les relations des témoins oculaires
qu’il rencontra à Livourne.
Il s’y embarqua en 1737. pour Alexandrie, où il mit
pied
P R E F A C E .
pied à terre au mois de Juin, après une navigation de trente
jours.
11 vit ce qu’il y avoit de plus curieux à Alexandrie &
dans le voifinage,&pourfuivit fa route jusqu’au Caire, où
il arriva le 7. de Juillet. Obligé par une grande maladie,
jointe à d’autres circonftances, d’y faire un féjour déplus de
quatre mois, il ne manqua pas de tout examiner, Ibit dans
la Ville, foit aux environs, & d’aller voir les Pyramides ^
fituées à quelque diftance de cette Capitale.
Etant enfin parvenu le 17. de Novembre à s’y embarquer
fur le Nil pour continuer fon voyage, il traverfa la
Haute-Egypte en remontant le Fleuve, vit fur fa route
Girge, Capitale de cette Contrée, & aborda à Effuaen où
Syene, où il fe fit conduire à la première catarafte du Nil.
11 fe rémit enfuite à cotoyer les bords du Fleuve, refolu
d’aller à la fécondé catarafte, mais il ne vint que jusqu’à
Derri en Nubie, où des obftacles inllirmontables l’empe-
chérent d’avancer plus loin.
Il réprit la route du Caire le 6. de Janvier 1738. toûjours
en navigcant fur le Nil, & mit pied à terre le 21- de Février.
En dcfcendant le Fleuve, il ne négligea point de donner
plus de jufteilè & d’étenduë aux obfervations qu’il avoit
faites en le rémontant, & d’en faire des nouvelles. Il fit
de même en répafl'ant par la Baflè-Egypte, principalement
au Caire (&à Alexandrie, d’où il partit fur la fin du Mai
pour retourner en Europe, pourvù de bons Mémoires fur
tout ce qui lui avoit parù intereflànt & digne d’attention
dans les Pays qu’il avoit parcouru.
c 2 Ces