Refervoirsou
Citernes.
Plan & Cou-
pe d’un Re-
lervoir d’eau.
P l a n c h e
X.
pofcr à pafTer le Bogas, ou l’embouchure du N il, parce qu’elles auroicnt couru risque
de s’y perdre. On y trouvoit encore une aiure utilité, en ce que la ville
d’Aléxandrie, dépourvue d’eau douce, en pouvoit être pourvue abondamment, par
le moyen de ce Canal. Aujourdhui, il eft hors d’état de répondre à tous ces d e f
feins. Creufé fimpleinent dans la terre, fans être fouccnu d’aucun revêtement de
maçonnerie, il s’eft pcu-à-peu comblé. L a décadence du Commerce, & la ruïne
du P ay s, ne permettent plus aux Habitans de fournir à la dépenfe, qu’il faudroit
faire tous les ans, pour tenir ce Canal dans le niveau requis. Il reiTemblc aujourdhui
à un fofte mal entretenu ; & à peine y coule-t-il affez d’e au , pour remplir
les Refervoirs néceffaires à la confommation de la nouvelle .Alexandrie. Je le paffai
à fee dans le mois de Juin. On y remarque néanmoins un endroit revêtu de
murailles. C’eft où commence l’Aqucdue, qu’on peut fuivre tout le long de b
plaine, Sc même jusqu’à Aléxandrie. Car quoiqu’il foie fous la terre, les fou-
piraux qu’il a , de diftance en diftance, font affez connoître la route qu’il prend,
pour fe rendre aux Refervoirs ou Citernes, qui ne iè trouvent que dans ce que
nous avons vu être l’ancienne Ville. Du tems qu’elle fubfiftoit, tout le terrein
qu’elle occupoit étoit creufé pour des Refervoirs, donc la plus grande partie fe trouve
maintenant comblée. II n’en refte qu’une demi-douzaine : encore ne font-ils pas
trop bien entretenus.
11 feroic fuperflu d’entreprendre de faire ici la defcription d’un de ces Refervoirs.
Un coup d’oeil jetté fur le deffein que j’en donne, en apprendra plus
que tout ce que je pourrois dire. J ’avertirai feulement d’une chofe, que le
deffein ne fçauroit exprimer; c’eft que toutes les voûtes paroiffcnc être faites de
briques, & couvertes d’une matière impénétrable à l’eau. Cette matière eft pré-
cifement la même que celle donc font couvertes les murailles Sc les P I S C I N A R I ,
ou Refervoirs, qu’on voit à Baïes, Sc à Rome, dans les Thermes des divers Em-
percurs.
L a plus grande partie des colonnes, qui fupportent les voûtes de ces' Refervoirs,
font de différentes fortes, & la plupart dans le goût Gothique, ou plutôt
Sarazin. Il n eft pas concevable, qu’elles ayent été placées de la forte dès le commencement.
Une entière deftruêlion a fa it, fans doute, que les unes ont pris la
place des autres. On aura réparé les Refervoirs, qui étoient le moins ru'inés, & on
iè fera ièrvi pour cela de ce qui coûtoic le moins à mettre en oeuvre. Jugeons
de-Ià de quelle manière le refte doit avoir etc traité.
De
De tous les Refervoirs, dont on fe fert aujourd’hu i, celui qui eft voifin de
la porte de Rofette conferve le plus long-tems fon eau, apparemment parce qu’il eft
plus bas que les autres. Quand il y en a quelqu’un de vuide, on a foin de
le nccoyer, vers le tems de l’accroiffement du N il; car il faut fçavoir, que ces
Refervoirs ne peuvent pas fe vuidcr d’eux-mêmes. Ils font faits pour recevoir
l’eau & pour la conferver, Sc non pour la laifîèr échapper. On les vuide par
le moyen des pompes à chaînes, ou à chapelets; & lors qu’on veut tranfporter
l’eau à la nouvelle V ille , on en remplit des outres, que l’on charge fur le dos des
Chameaux, ou des Anes. L ’obligation, où l’on eft de vuider, à la main, ces
Refervoirs, nous fait connoître la raifon, pourquoi on en a comblé un fi grand
nombre. L a confommation, n’étant plus fi grande dans la nouvelle V ille , quelle
l’étoit dans l’ancienne, l’eau fc feroic corrompue, & auroit infailliblement caufé des
maladies par fa mauvaife odeur. D’ailleurs il n’y avoit pas moyen de fubvenir à
la dépenfe, qu’il auroit falu faire pour les nétoyer cous les ans. Si on avoit
bouché les canaux de l’Aqueduc, qui conduifent l’eau, on auroit été en danger de
faire un cloaque général. Enfin on reinédioic à un autre inconvénient: la plupart
des Refervoirs étant à moitié ru'inés, il valoit mieux les combler, que s’ex-
pofer aux accidens, que leur confervacion auroit fait naître, d’un jour à l’autre.
Voilà tout ce que je puis dire, touchant les Refervoirs d’Aléxandric. L e s d e f
feins & les mefures, dont ils font accompagnés, achèveront d’en donner une
idée complette.
Il ne nous refte plus, dans l’enceinte de l’ancienne Aléxandrie, qu’à voir ce
que c’eft que la porte de Rofette, & une autre porte, par où on fort de la Villeneuve,
pour encrer dans la vieille, après qu'on a traverfé la grande place de cette
dernière. Ces deux portes font bâties, dans le même g oû t, que le refte de l’en-
ceince. Celle de Rofette a quelques petites tours à chaque angle: l’autre, qui eft
proche d’un Boulevard, n’à qu’une fimple ouverture dans la muraille. L e s baccans
de ia porte font de bois, Sc couverts de placques de fer extrêmement rouillées.
C :nmcil vaut mieux achever de dire tout ce qui concerne l’antique, avant
que de paflèr au moderne, il convient de faire un tour vers le vieux P ort, au bord
duquel nous rencontrerons des reftes d’antiquités, appartenans à l’ancienne Aléxaii-
drie, ou du moins à fes fauxbourgs.
I.e vieux Port, autrement le Port d’A frique, a d’un côté le grand Pharillon,
qui le défend, comme il fait la défenfe du nouveau Port. A l’oppofite du grand
D 2 Pha-
Porte de Rofette.