50. de longueur, Sc fur 20. de lai-geur. Leurs côtés font fort unis; mais le fond eft
fi rempli de lable, qu’à peine peut-on découvrir le haut d’un canal, q u i, dans quelques
uns de ces fofl'és, femble devoir mener à quelque Souterrein. On fçait bien,
fans que je le dife, qu’il eft hors de la portée d’un Voyageur de faire nétoyer de pareils
endroits, pour fatisfaire fa curiofité. Quiconque connoît le Pays, ne fçauroit
exiger une démarche fi périlleufe ; & c eu x , q u i, làns avoir rien vu, prétendent qu’on
falTe tout ce qui leur femble practicable, n’ont qu’à voyager en E g yp te , pour y apprendre,
qu’il eft plus aifé de juger, que de faire par foi-même.
Il s’agiroit maintenant de palier à la defcription de la nouvelle Alexandrie;
mais avant que de quitter l’ancienne, j’ai encore bien des chofes à dire & des réflé-
xions à faire -à fon fujet. Il ne fuffit pas d’avoir fait le tour de cette ancienne V ille,
d ’être allé hors de fon enceinte voir la Colonne de Pompée, d’être entré dans les Catacombes,
qui font au voifinage, d'avoir vu le Canal de Cléopatre, d’avoir parcouru
les bords du vieux Porc, & le terrein voifin, qui avoit paru mériter nos recherches:
on obmet toujours quelque chofe dans de pareilles occafions, Sc quelque-fois on laiffe
trop entendre. II fembleroit par exemple, en lifanc la defcription, que j’ai donnée
de l’enceinte de la vieille V ille , qu’on la peut fuivre tout à l’entour, fans qu’elle foit
interrompue nulle part. Il eft pourtant certain, qu’il fe trouve des efpaces, où il
P l a n c h e ne refte, ni Boulevards, ni murailles; & fi on veut connoître ces efpaces, on n’a qu’à
examiner le Plan: on les y verra d’un coup d’oeil. De plus, pour avoir une idée
jufte de l’état du terrein, qui étoit occupé par l’ancienne Ville, il y a à connoître
autre chofe que les antiquités, qui fubfiftent. I.es Edifices modernes mêmes, la
Butte de Ste. Cathérine, & la Plaine voifine de l’Obélisque, ne font pas, avec les antiquités
, tout l’efpace entier. Il convient encore d’ajouter, que le refte ne diffère
guère du terrein, qui eft près de l’ObélÎsque ; que tout a été remué & fouillé ; que le
meilleur a été emporté; & que s’il y a encore quelque chofe qui en vaille la peine, il
faudroit le chercher bien avant dans la terre, ou dans les Refervoirs qu’on a comblés.
Qiieftion cu- iicufe.
D’autre part, il fe préfente naturellement quelques queftions, qui méritent
qu’on y réponde: D’où avoit-on tiré, dira-t-on, cette enorme quantité de marbre &
de Granité, qu’on employa à la conftruGion de la prémiére Aléxandrie; & qu’eft-ce
que tout cela eft devenu, depuis la deftrucliûn de cette grande Ville? Si je n’entreprends
pas de répondre pofitivement à ces demandes, je bazarderai du moins des conjectures,
qui foient tant foie peu raifonnables.
Un
Un chacun, je penfe, conviendra avec mo i, qu’il n’auroit pas été fenfe, d’aller
chercher bien loin ce qu’on avoit en quelque manière fous la main; Sc que fi on l’eût
entrepris, on n’auroit jamais pu porter cette Ville au degré de magnificence, où on la
vit dès fa prémiére fondation, ou peu de tems après fous les Ptolomées. Il eft donc
naturel de fuppofer, que la prémiére Aléxandrie tiroit fon plus grand luftre de la de-
Itruêtion de Memphis; & cette raifon eft d’autant plus probable, qu’il faut abfolu-
inent un endroit, pour placer les ruïnes de cette grande V ille, dont il eft refté à
peine quelques foibles vertiges, capables d’indiquer la place où elle étoit. II ne s’agit
après cela que de lever quelques objections, qui fe préfentent d’elles-mêmes.
On dira d’abord, qu’il n’eft pas concevable, qu’Aléxandre Guerrier fi généreux
ait pu fe porter à détruire une Ville aulfi fuperbe que Memphis, pour en conftruire
une en fon nom. Ce n’eft pas non plus ce que je prétends. Je ne veux pas
charger davantage la mémoire d’A léxandre; que celle des Papes, qui n’ont point fait
difficulté de permettre de détruire une partie des Antiquités de Rome, afin d’en conftruire
des palais fuperbes pour leurs familles.
Memphis, ajoutera-t-on, fans doute, fubfiftoit encore du tems d'Alexandre &
fous les Ptolomées. J ’en tombe d’accord, mais de quelle façon fubfiftoit-elle? A peu
près comme l’ancienne Aléxandrie fubfifte de nos jours, ou tout au plus comme elle
fubfiftoit du tems des Sarazins. Eft-il à croire effectivement, que les Pcrfes ayent
fait plus de grace à Memphis, qu’aux autres Villes de l’Egypte? Ceux qui extermi-
iioient les Dieux auroient-iis épargne les Temples? Lors qu’AIéxandre entra dans
l’E gypte, l’éclat de la Religion n’écoit-il pas écÜpfé dans Memphis? L e s principaux
Prêtres s’écoient retirés dans les dcferts, & Cambvfe avoit emporté les Idoles. Jugeons
par-là de l’état, où fe trouvoient des Temples, qu’on ne fréquentoit plus, qui
étoient en horreur aux Perfes, & qu’ils employoient aux plus vils ufages. Dans ce
cas, Aléxandre, & fes Succeffeurs, ont bien pu y toucher, fans devenir facriléges,
& fans s’attirer la haine des Peuples, qui dévoient même voir avec plaifir, que les
matériaux de leurs Temples ruinés fufiènt employés à des Edifices, où devoit fe rétablir
le culte de leurs anciens Dieux.
Cette grande obJeCIion ainfi le v é e , il ne s’agit plus que d’examiner, comment
on a pu tranfporter cette quantité immenfe de matériaux. Mais le N i l , & le Canal
de Cléopatre, n’offroient-ils pas des paffages bien faciles? L e Canal, dira-t-on, y
écoic-il déjà ? Il n’y a point de douce à cela. On ne pouvoir pas faire le projet de bâtir
une Ville dans un tel quartier, fans penfer d’abord au Canal. L ’endroit étoit déf
i 2 pourvu
Réponfe.
O bjeS ion
contre cette
reponfe.
Répliqué à
cette objection.
O rigine du
Califch, ou
C.inal de
Cléopatre.