Planches
X L V .
X L V I . &
XLVII.
Remarques
fur la Prom enade
pour
voir les Py-
Tamides.
Vis-à-vis de la fcconde Pyramide il y en a cinq à fix , qui ont aulTi été toutes
ouvertes; & , dans nne, j’ai obfervé un puits quarré, de 30. pieds de profondeur.
T o u t le l'efte eft rempli de fable Sc de pierres.
Environ 300. pas à l’Orient, de la fécondé Pyramide, on remarque la tête du
grand & célébré Sphinx, que )’ai eu foin de deifiner.
On découvre auflî aux environs des Pyramides des Grottes fépulcrales ; & fur
quelques-unes d’entre elles j’ai obfervé des Hiéroglyphes, qui prouvent, que ces Sépultures
n’ont été pratiquées, que long-tems après la fondation des Pj'ramides. Elles
font toutes ouvertes, & dépouillées de ce qu’on leur avoit confié. J ’cn vificai
plufieurs; mais je n’y trouvai que la moitié d’une petite Idole, ouvrage de poccerie,
& celles qu’on en trouve encore aujourdhui en grande quantité aux environs des Pyramides,
voilines de Saccara, dans le Quartier, qu’on appelle la Terre des Momies.
Pour aller voh- ces Pyramides, de même que les autres Antiquités de l’Egypte,
on choifit la faifon de l’H iver, c’eft à dire, depuis le mois de Novembre jusqua la
mi-Avrü. C ’eft-là le tems le plus propre. L a Campagne fe trouve alors defiei-
chée de toutes parts : au lieu qu’en E té , l’inondation du N il rend la plus grande partie
des Antiquités inaccefiîble, parce qu’on manque dans ce Pays-là des petits batteaux
commodes pour aller où l’on voudroit.
Une autre raifon rend encore la vifite des Antiquités difficile & même périlleufe
pendant l’Eté. C ’eft que les Arabes defcendent, dans cette Saifon, des Montagnes,
afin de camper le long du N il; & comme la Juftiee n’a pas alors la liberté de les approcher,
ils ne fe font pas une peine de dépouiller les Etrangers.
Quand on entreprend, en H y v c r , d’aller vifiter les Pyramides, on s’attache
à fe former une Compagnie, tant pour faire cette promenade avec plus d’agrément,
que pour être en état de mieux obferver toutes chofes. Ceux qui y ont déjà été
donnent de l’émulation à l’Etranger par leurs difcours, & l’aideiu à faire de plus ex-
acies recherches, qu’il ne feroic s’il étoit feul. A la vérité on eft expoie à entendre
quelquefois des raifonnemcns bien abfurdes; il y a pourtant toujours à y profiter,
pour une perfonne en état de faire le difcerneinenc de ce qu’on lui débite.
Si on parc du Ca y re , on fait cette promenade en un jour ou deux ; Sc fup-
pofé qu’on la veuille faire en d eu x , on parc monté fur des A n e s , pour chacun desquels
quels on paye onze P-arats. On craverfe ainfi la Ville ; on paffe en fuite le Califch,
qui dans cette faifon fe trouve à fec : on traverfe encore l’Isle de Rodda, où du côté
gauche, & derrière le Mokkias, on prend une Barque, dans laquelle on fait aulfi
encrer les Anes. On va débarquer à G iz e , Village vis-à-vis du Cayre. On ne s’y
arrête point ; on avance tout de fuite, jusqu’à une lieue de-là, où on loge chez le
Kaïmakaii, qui a toujours quelques chambres à donner. On y paffe la nuit, quoique
fort mal; car on n’y trouve ni lits, ni aucunes autres commodités. Outre
cela on y eft perfécuté par les Punaifes; mais une nuit eft bien-tôt pafice, Sc on s’accommode
comme on peut.
L e lendemain matin, après avoir payé un Sequin pour une fi miférable auberge,
on prendía route des Pyramides. Cependant, avant que d’y arriver, on
paffe par un autre petit V illage , auprès duquel il y a ordinairement un Camp d’A rabes.
On en prend avec foi d eu x, qui ayent la connoiffance des Pyramides ; on
continué enfuite fon chemin, jusqu’à ce qu’on foie arrivé au pied des Montagnes,
près desquelles font fituées les Pyramides ; alors 011 mec pied à terre, pour achever
le refte du chemin.
Quand on fe trouve à l’ouverture de la prémiére Pj-ramide, on cire quelques
coups de piftolcts, pour en chaffer les Chauve-fouris : après quoi on fait entrer les
d eu x Arabes afin d’écarcer le fable, qui bouche presque entièrement le paffage.
A u bout de ces préambules néceffaires, on a la précaution de fe déshabiller entièrement,
& l’on ôte jusqu’à la chemife, à caufe de l’exceflive chaleur, qui régne
dans la Pyramide. On entre, en cet état, dans ce Canal ; chacun a une bougie à
la main; car on n’allume point les flambeaux, que l’on ne foie dans les Chambres,
de crainte de caufer trop de fumée.
Lorsqu'on eft parvenu à l’excrcmicé du Canal, où le paffage eft forcé, on
trouve une ouverture, qui a , à peine, un pied & demi de hauteur, & deux pieds
de largeur. C ’eft pourtant par cc permis, qu’on eft obligé de paifer en rampant.
L e Voyageur fe couche ordinairement par terre; Sc les deux Arabes, qui ont pris les
devans, iàififfenc chacun une de fes jambes, & l’entraînent ainfi par ce difficile paffa-
g e , au travers du fable & de la pouflîére. Hcureufement ce paffage n’eft que de
deux aunes de longueur: autrement ce travail feroic ¡nfupporcable pour quelqu’un qui
n’y feroic pas accoutumé.
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