f tr t quelques avanies de la part des Turcs. C e f t le Confuí qui IiaulTc ou baiflc cette
taxe, fuivant que les circonftances le demandent. Je ne crois pas néanmoins, qu’il foit
abfolumenc le maître d’en ordonner comme il lui plaît. T o u t cela dépend fans
doute de l’Ainbaftadeur de France à Conftancinople, qui doit approuver les rcprc-
fentacions des Confuís d’Aléxandrie &: du Cayre, avant qu’ils puinènt paifer outre.
Cependant, quelle que foie l’autorité, en vertu de laquelle ou léve ces droits, on
peut dire, qu’ils font fort à charge à la Nation, qui véritablement perd par-là beaucoup
plus, qu’on ne fçauroit fe l’imaginer.
Les Anglois ne connoiftènt point de contributions femblables. Ils ont le
droit du Confulat à payer; & voilà tout. De plus cette grande fubordination,
que les François font obligés d’avoir pour leur Confuí, n’eft point en ufàgc parmi
les Anglois. Ils agifienc plus rondement les uns avec les autres; & il n’y a de
refpe a qu’autant que la bienféance, ou quelque intérêt particulier, le peut éxigcr.
Il arrive tous les ans un bon nombre de Vaiffeaux Anglois à Aléxandrie; mais ils ne
font pas toujours chargés pour le compte de cette Nation. Les Juifs & même les
T u r c s en frettent fouvent, & y font bien leurs affaires.
L e s Vénitiens & les Hollandois, ont eu autrefois des Ecabliffemens & des
Confuís à Aléxandrie; mais de grandes banqueroutes, faites par les Confuís mêmes,
ont ruiné entièrement ce commerce. Les T u r c s , qui n’entendent point raillerie,
quand ¡I s’agit de leurs intérêts, ne veulent plus admettre aucun Confiai de ces deux
Nations, avant qu’elles les ayent dédommagés des torts, qu’ils ont foufferts de la parc
des Confiais précédons. Comme les fommes, dont il s’agit, font grandes, & que les
uns ni les autres n’entrevoient point l’efperance d’un profit confidérable, ils n’ont
point depuis travaillé férieufèment au rétablifTeinent de cette branche de leur commerce.
Peut-être auffi ne veulent-ils pas l’entreprendre à caufe des conféquences,
qui en pourroient naître, fi toute une Nation faifoit fon affaire de la dette d’un Particulier.
L e peu de vaiffeaux, que les Vénitiens, ou les Hollandois, envoient à
Aléxandrie, font, ainfi qiae leurs charges, à la merci du Douanier, qui eft réputé
leur Confuí. Ils font accord avec lui, pour les droits de la Douane; & ils s’en cirent
quelquefois affez bien. Cependant les Vénitiens paroiffent ordinairement fous
le Pavillon François, & jouïffcnt de fa proteftion, autant qu’il la peut donner par
rapport au commerce.
Les Suédois, quoiqu’en alliance avec la Porte, ' ne vont que très rarement à
Aléxandrie. Dans le tems, que ]j- ccois, il s’y trouvoit un Vaiffeau de cette Nation.
iion. Il s’actendoic de jouïr au moins des privilèges, qu’on accorde aux Vénitiens
& aux Hollandois; mais le Douanier refufa de craiier avec lui fur ce pied-là; de
forte qu’il fut contraint de payer les droits dans toute leur étendue; ce qui ne dévoie
pas l’encourager à retourner une autre fois.
Il n’y a pa s, ce me femble, d’autres Nations Européénes, qui fafiènt commerce
à Aléxandrie. L e s Bâtimens T u r c s , qui fréquentent fon P o r t, font des Sultanes,
qui y vont tous les ans, pour prendre en marchandifes le Carrat du Grand-
Seigneur. L e Bacha du Cayre eft chargé de le raffembler, & de le faire conduire
fous les yeux d’un Bey du C a yre , qui l’accompagne toujours jusqu’à Confian-
tinople.
On vit encore à Aléxandrie, du tems que j’y étois, une Efcadre T u rq u e , qui
s’y rendit, pour tranfporter les crois mille Hommes, que l’E gypte fourniffoit, pou f
fon contingent, durant la guerre encre la Porte & l’Empereur d’Allemagne. L a
moitié de ce contingent confiftoic en Janiffaires : l’autre moitié en Affafs. Ces deux
Corps fe coinporcèrenc fi mal, durant les deux mois, qu’ils reftèrent a Aléxandrie,
que perfonne n’y pouvoit venir du Cayre en fureté. Ils püioient de tous côtés ;
& ils volèrent, encre autres, mille Sequins, qu’un Marchand François envoyoic,
afin qu’on les embarquât pour les faire paffer en Europe. Il avoit c ru , que fon
argent ne comroic aucun risque, parce qu’il l’avoic confié à quelques Janiffaires,
que la Nation entretient ; mais ceux-ci furent attaqués par un Ennemi fupérieur en
nombre, & l’un d’eux fe trouvant bleffé dangéreufement, ils lâchèrent l’argent aux
Vainqueurs. L e Confuí employa le verd & le fee pour faire reftituer cet argent;
mais malgré toutes les démarches qu’il fit : malgré tout ce qu’il put offrir aux Chefs
de ces T rou pe s , i! n’obtint rien; & , à mon départ d’A léxandrie, on rcgardoit ces
mille Sequins, comme perdus fans reffource.
L e s désordres allèrent depuis à de fi grands e xcès, dans la Ville même
d Aléxandrie, que les Janiffaires & les AfHifs en vinrent aux mains. L e s refèr-
voirs ne fe trouvant pas pourvus d’une affez grande quantité d’eau, pour fournir
aux befoms d’un fi grand nombre de Perfonnes furnuméraires ; c’étoit à qui s’cn
empareroic : avec cela, la haine, qui fiibfifte toujours entre ces deux Portes, les ani-
inoïc tellement, que leurs Chefs avoient beaucoup de peine à les empêcher de s’égorger;
Sc ils n’en feroient jamais venus à bouc, s’ils n’avoient pris le parti de preffcr
leur départ. Par ce feul moyen ils rétablirent la difcipline parmi leurs croupes
Sc délivrèrent la Ville d’Aléxandrie d’un pefant fardeau, qui lui laiffoit à peine la
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