j t j i t s
lui envoyâmes deux bouteilles d’eau de la Reine de Hongrie; & nous lui confeillâmes
d’en prendre une bonne dofe le foir & le matin.
Nous partîmes auffi-tût; & nous nous trouvâmes dans peu vis-à-vis de l’ancien
Temple de
K O N O M B U .
Je mis pied à terre pour l’aller voir. Chemin faifant, je remarquai, qu’une
grande quantité de Poules de Pharaon fuivoic le petit Camp du Cacheff. 11 y en avoic
dc blanches, avec les aîles noires, & d’autres étoient entièrement noires. Elles fe
nourriiîbienc dc ce qu’on jetcoic ; & elles paffoienc encre les tentes, comme des Oifeaux
apprivoifés,
11 régnoit un grand calme; de forte que nos Rameurs, aidés du courant, nous
firent faire bonne route.
Un peu après midi, nous étions déjà arrivés à
T S C H IB A L E S S E L S E L E ;
C ’eft-à-dire à ia Montagne de la Chaîne. Notre Reys, qui écoic convenu de
nous mettre à terre, partout où nous voudrions, fit beaucoup de difficulté pour s’arrêter.
Il eut beau faire, je defcendis, & je me mis d’abord à deffiner & à mefurer,
tout ce que je trouvai dc remarquable. J ’avois à peine commencé, que le J u if vint
m’avertir de me retirer dans la barque, parce qu’on avoic apperçu une troupe d’A rabes,
qui s’approchoienc. J ’avois été fi fouvent la dupe de pareilles chanfons, &
j’avois tant de peine à me faire mettre à terre dans les endroits où ma curiofité m’ap-
pelloit, que je renvoyai mon homme, fans vouloir Técoucer, & je continuai mon
travail.
Peu de ccms après, un autre de nos Gens fut dépêché, pour me dire, que le
Reys décachoic la Barque, afin de s’en aller. J e ne fis pas plus dc compte de ce
fécond avis, que du prémier. J ’avois com menc é, & je voulois finir. Je retins mon
homme avec moi, en lui faifant entendre, que la barque n’iroit pas loin, & que nous
la rejoindrions bien-tôt. Je travaillai ainfi tranquillement toute Taprès-dînée jusqu’au
foir. Je vifitai les grottes voifines; & je ne quittai la place, que quand robfcurice de
la nuit, qui commençoic, ne me permit plus de voir les objets.
J ’avois cependant un bon chemin à faire, avant que de pouvoir joindre la barque
; & je ne m’y rendis pas fans peine. A mon arrivée, un chacun m’y reçut en
riant dc la terreur panique, qui les avoit faifis; car ils m’apprirent, que la prétendue
troupe d’Arabes n’avoit confifté, qu’en une vingtaine de chameaux, fuivis de leurs
Chameliers. Je fis pourtant un peu le fâché ; & j’avois fujet de l’être. J e remar-
quois, à mon grand regi-ec, que les périls pafiés avoient fait une trop force impreffion
iùr i’efprit dc quelques-uns de nos gens. L e J u if, qui avoic fes dattes dans la barque
écoic plus craintif que jamais; & le Reys, frippon fiéfé, avoic fait tant dc coquineries
tout le long du N il, qu’il crembloit de peur quand il enccndoit une feuille tomber.
C ’étoit d’ailleurs le même Reys, qui avoit conduit le Pere Siccart, lorsqu’il fit fon voyage
dans la Haute-Egypte. Ce Reys fçavoit beaucoup de circonftances, couchant ce Pére;
mais j’ccois furpris, de ce que Tayanc accompagné par-tout, il n’étoic pas meilleur
Guide. II nous avoic montré dans la matinée de quoi il étoit capable.
Avant que d’arriver à la montagne de la Chaîne, nous avions pafie devant un
endroit, où un jeune Garçon, gardoit quelques brebis. L e Reys lui dit des injures;
& l’Enfant lui répondit fur le même con. Picque de la réponfe, le Reys fe jette fur un
fufil chargé à crois balles, qui étoit toujours en cet état hors de la tente; & il cire finie
troupeau de brebis. Nous avions cru qu’il ne prenoit cette arme, que pour faire
peur -à l’Enfant; mais, lorsqu’il l’eût cirée, nous en fûmes très-fcandalifés. Heureufement
il ne tua rien. Ce qui nous furprit beaucoup, c’eft que TEnfanc, au lieu de
s’enfuir, demeura ferme fur la place, & fe mit à vômir mille injures contre notre Barbon,
qui, pour s’cn venger, ne parloit pas moins, que de mettre à terre, & de s’emparer
de toutes les Brebis. Son Equipage ne valoit pas mieux que lui. C ’étoic de
véritables Corbeaux. Ils voloienc la viande du p o t , qui bouilloit fur le feu.
Nous continuâmes à defcendre à la rame, jusqu’à mi-nuit, que nous nous trouvâmes
devant
BUEB BE.
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L e calme dura toute la nuit, & même tout le jour fuivant; ce qui nous fit beaucoup
avancer. Nous vîmes de tems en ceins, divers Crocodiles; ¿c nous cirâmes deffus,
iâns en pouvoir tuer aucun.
L ’après-midi, nous apperçûmes, fur le haut d’une Montagne, un Edifice, qui
paroifibic de conftruclion Sarafine; & à un quart de lieuë de-là, je remarquai quelques
ruïnes, dans une Vallée, derrière la montagne. 11 n’y eut pas moyen d’y aller. Je
T t t 2 n’au