Meilleurs les Coftes nous avoient rendu un très-mauvais office. Depuis ce teins-la
nous ne pouvions mettre è terre, fans être obfédés d'une foule de monde. Les bruits,
que l'on avoit commencé à répandre dans Nagadi, noos devançoient toujours; de
forte que nous aurions été expofés è bien des accidens, fi nous ne nous fuifions pas
tenus fur nos gardes. L e pire de tout, c'eft que notre Reys étoit devenu fi craintif,
qu'il trenibloit, quand on lui parloir de mettre à terre. Ii faloit l y forcer, dans les
endroits où il avoir quelque chofe il voir. On s'apperccvra en effet par la fuite de cc
Journal, qu'il y avoit bien des difficultés à furmonter.
Enfin, à cinq heures du foir, nous quittâmes Nagadi, nous prîmes le large;
& nous rencontrâmes bien-tôt une Isle, que nous avions à l'Eft. On la nomme
GIESIRET METER.ô.
Elle a un'Village & peut avoir trois quarts de licuë de longueur. Mais ce qui
la rend plus recommandablc ; c'eft qu'elle eft l'ancienne Isle T a b e n n a , où St. Pa-
chôme avoit bâti le prémier Monaftére dc fa Congrégation; & on en volt encore les
ru'ines, à l'oppoiite du 'Vill-age de
MENESCHIA,
Situé fur 1a rive Occidentale du Nil.
Environ à demi-lieuë plus haut, nous nous vîmes entre deux autres Villages;
fçavoir : DEMFIIG,
& GlERAJOES.
L e prémier reftoit à notre droite; & le fécond -à notre gauche. L e Vent ne
fe trouvant pas alors afièz fo rt, nous mîmes à terre auprès de Gierajoes.
M A R D I , lo . D é c em b r e .
L e Calme nous obligea de relier, toute la nuit, dans cet endroit; mais comme il fp,
leva un peu dc vent, avec le jour, nous remîmes à 1a voile, fans néanmoins beaucoup
de fuccès; car le vent ceffa bien-tôt, & nous fîmes tirer la Barque jusqu'-à
SOES;
C ’eft un Village fitué â l’Occident du Nil. En avançant plus loin, nous fûmes
fouvent agravés, fans en fouffrir pourtant aucun dommage, fi ce n’eft que nos Gens
en furent extrêmement fatigues, & que cette raifon nous obligea encore de nous arrc-
ter. Notre Reys, que la peur n’abandonnoit point, mouilla auprès de quelques Isles,
que la baiffe du Nil avoit mifes au deffiis dc l’eau. Nous étions affez près du Village de
GAMOLA.
Situé
Situé fur la rive Occidentale du Fleuve, & vis-à-vis d’un autre Village, qui ell
liu’ la r iw OTiencalc, & qu’on nomme
SCHENHUER.
L e hazafd avoit vou lu , que trois, ou quatre Crocodiles, avoient choifi pour
lits dc repos les petites Isles, près desquelles notre barque étoit à l’ancre. Nous tirâmes
fur ces Animaux, donc deux s’élancèrent auifi-côt dans l’eau; & l’un d’eux parue
refter fans mouvement. Nous crûmes l’avoir tu é, ou du moins l’avoir bien bleiTé;
de force que nous fîmes avancer la barque, & nous faifilTans de perches & d’autres in-
ftrumens, que nous trouvâmes fous la main, nous allâmes à lui, pour l’achever, au
cas qu’il ne fût pas mort. Ma is, -à peine étions nous à une quinzaine de pas de lu i,
qu’il fe réveilla au bruit que nous faiiions, fe leva, & fe jecca dans l’eau, comme les
autres. 1! pouvoit avoir trente pieds de longueur. Nous rencontrâmes encore ce
jour-l'à, une vingtaine d’autres Crocodiles, étendus fur des bancs de fable; & ils écoienc
de difi’crentes grandeurs, comme depuis quinze pieds jusqu’à cinquante.
L e s terres de ce quartier nous parurent affez bien cultivées. Nous y remarquâmes,
encre autres, du bled de T urq uie, des cannes de fucre, des lupins, &c.
Nous vîmes aulfi, ce jour-là, un Radeau dc paille, fupporcé par des Calebaf-
fes, & gouverné par deux Hommes.
MECREDI, I I . Décembre.
N o u s ne mîmes à la voile que vers le Midi. L e vent, qui fouffloic, n’étoic pas
fort ; mais i! étoit bon ; de force que nous nous trouvâmes bien-tôt encre
ELL-KERNE
& DAMAMIN:
Deux Villages, donc le prémier eft à la gauche, & le fécond à la droite du
Fleuve.
A une lieuë plus loin, nous vîmes à notre gauche Voyez
MAGDSCHER, 'L nÏ!
Simple Village; & peu de tems après nous apperçûmes à notre droite les ru'j- p l a n c h e
nés d’une Ville, nommée XCVIII.
MEDINET HARU.
Elle étoit environ à une demi-lieuë dans les terres,
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