262 Voyage d'Egypte
D IM AN CH E , 2. F f 'y r / ir .
L e vent du Nord regnoit toujours; & il étoit très-fort. Nous fîmes cependant une
tentative, pour remettre à ia rame; mais tous nos efforts furent inutiles. Iis n’aboutirent
qu’à traverfer le N i l , & à gagner Tautre bord du Fleuve vis-à-vis d’
ASFUUN.
Nous avions devant nous une plaine, qui n’étoit guère cultivée. Elle s’éten-
doit en largeur, Tefpace d’un quart dc lieuë : après quoi les Montagnes s’élevoicnc de
nouveau. Vers le foir, le venc ayant tombé entièrement, nous détachâmes la barque,
& fîmes route. Nous avançâmes jusqu’à
SCHAGAB.
L a nuit approchoit; & nous aurions bien pu continuer à defcendre le N il; mais
nous prîmes le parti d’arrêter, afin de faire le lendemain provifion dc bois, donc nous
avions grande difetce. L e Village de Schagab eft ficué à une portée de fufil de la Rive
occidentale du Fleuv e, & à égale diftance des montagnes. Il y a aux environs des
Dattiers, avec un bosquet d’arbres de diverfes efpéces. L e terrein n’cft pas d’une
grande étendue ; mais il eft très-bien cultivé.
L U N D I , ^ .F é v r ie r .
L e matin on apporta à bord croîs grands facs de Séné-méque. Nous les fîmes jetter
dehors, dès que nous les apperçûmes. L a Barque écoic déjà affez chargée.
■ Peu de tems après que nous eûmes mis à la rame, nous vîmes plufieurs Crocodiles.
L ’après-midi nous pafiâmes devant les Antiquités d’Arment. Je voulois y
mettre pied à terre; mais le Reys me fit repréfenter, que fi j’y allois, il lui feroit iin-
polfible de me fatisfaire à Tegard dc L u x x o r , où nous devions arriver le foir. Je
n’inllftai pas d’avantage, Sr nous continuâmes à faire route, parce que je fçavois d’ailleurs,
que nous n’étions pas éloignés de
MAGSCHERADONE,
Ce Pafiàge eft difficile, & impraticable même au moindre venc qu’il fait. L a
raifon en eft, que le Nil n’y a point de Courant. Quand nous y fûmes le Reys eut
foin de me le faire remarquer, afin de mieux excufer le refus qu’il avoit fait de me
faire aborder à Arment.
L e N il forme ici une grande Isle, après laquelle nous en rencontrâmes encore
une autre.
Enfin
Enfin nous arrivâmes auprès de
L U X X O R ,
On ne peut pas y aborder, dans cette faifon, parce que Tcau eft trop bafiè.
Nous mîmes à terre à un quart de lieue du Village, hors duquel font les principales
Antiquités. Je propofai au Reys d’y aller, dans la nuit; il approuva mon defièin, &
offrit de m’y accompagner. Quelques-uns des nôtres voulurent auffi être de la partie.
Nous partîmes à minuit, & nous arrivâmes à ces Antiquités, iàns rencontrer
en chemin ame qui vive. Les Arabes fe défient fi fort les uns des autres, qu’ils fe
retirent avec le Soleil, &: ne fe montrent qu’après fon lever.
M A RD I, 4. F é v r ie r .
J ’eus tout le tems qu'il me faloit, pour mefurer ces belles Antiquités ; & j’avois même
fini, avant que le jour arrivât. Je voulus tenter d’aller mefurer auffi les Antiquités,
qui font dans le Village; mais à peine m’en fus-je approché, que l’aboyement des
Chiens m’obligea de me retirer. Nous prîmes donc le parti de nous rendre à la barque.
L e matin, je retournai à Lu x xor. Nos Gens amufèrent les Arabes, qui ac-
couroienc pour achetter des provifions; & ils les occupé rent afièz long-tems, pour que
je puife employer la meilleure partie de la matinée à prendre les mefures, qui me man-
quoienc.
A onze heures, nous retournâmes à la barque, & nous mîmes d’abord au large,
dans le deffein de nous rendre à
C A R N A C .
Comme le Nil n’avoit, de ce côcé-là, que très peu de profondeur, i! nous falut
faire plus de deux lieuës, avant que de trouver une place où uous pulfions mettre à
terre. L e tems écoic calme, & le Courant aifez fort ; de force que nous fîmes ce
chemin en moins de deux heures.
J e ne tardai pas à mettre pied à terre, pour aller aux ruïnes, quoique je fufiè
très-fatigué du travail que j’avois fait daus la nuit. Notre Reys, qui s’en apperçuc,
m’offrit de me procurer un cheval ; & j’acceptai volontiers fon offre. Il m’en amena
un, qui ne paroifibic pas être un grand Courfier. Sa mine étoic trompeufe. A peine
fus-je deifus, qu’il partit comme un éclair, & m’emporta bien loin, fans qu’il me fût
polfible de le gouverner. L a bride ne confiftoic, qu’en un morceau de ficelle, & la
felle, qui écoic de bois, ne fe trouvoit guère bien fanglée; ajoutons à cela q u e , je ne
U u u 2 fuis