l’arbre que découle le suc dont l’exploitation
forme le principal revenu du pays. Pour gravir
le long des troncs cylindriques, le résinier
(l’homme qui recueille la résine) se sert d’une
sorte de perche où, de distance en distance,
sont de petits échelons sur lesquels portent à
peine les doigts du pied droit, tandis que ceux
du pied gauche%e cramponnent contre l’arbre,
les pouces étant séparés des autres. Il en résulte
que ces pouces se contournent, deviennent exactement
opposables , et acquièrent une certaine
facilité de mouvemens , qui fait que le résinier
s’en peut servir pour arracher l’écorce , saisir
au besoin l’instrument qui sert à entailler, remuer
en tout sens, et aider à ramasser les plus
petits objets. Ces résiniers finissent par acquérir
une dextérité remarquable dans les doigts des
pieds et surtout dans celui dont l’inflexibilité et
l’inertie seraient un des caractères de l’espèce
humaine d’après nos savans. Nous avons employé
un de ces paysans pour nous récolter des
Lichens sur la cime des arbres , et il savait
écrire avec ses pieds. Pour peu qu’on soit pratique
des lieux, on distingue sur le sable la
trace de ces Hommes des bois de notre Europe.
Nous ne confondions jamais dans les herborisations
de notre jeune âge ces traces avec
celles que les pasteurs impriment dans les dunes,
et les agriculteurs sur le sable des chemins.
Les résiniers ne devront-ils pas être séparés de
l’ordre des Bimanes, pour devenir des Singes?
Tous n’en ont pas l’intelligence} comme chez
plusieurs des premiers sujets de l ’Académie
royale de Musique , leur esprit est dans les pieds.
On sait d’ailleurs que chez les Hottentots le
pouce se retire et se déjette déjà , tandis que la
plante se contourne sensiblement. Aussi distingue
t-on encore à la trace ces habitans du sud de
l’Afrique ; les Caffres et certains colons européens
qui se divertissent à les tuer ne s’y trompent
jamais.
(6) Les rapports des Orangs avec les Hommes
sont si frappans , que les peuplades asiatiques ou
africaines chez lesquelles existent de tels Bimanes
, et où l’on a souvent occasion d’en observer,
n’ont pas hésité à leur reconnaître une sorte de
parenté. Le nom par lequel on les désigne est
un mot malais qui signifie être raisonnable • il
s’applique également à notre espèce. M. Frédéric
Cuvier (JDict. de Levrault, t. X X X V I , p. 276)