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quinze cents Pendons. Une pêche à-peu-près
femblable porte, dans d’autres endroits, le
nom de Phaftier ou Pbafquier.
* D autres fo is , au lieu d’employer u-n
réchaud, on fe fert feulement d’une torche
de paille, ou d’écorce de bouleau, pour
attirer les PoilTons.
Les Chinois profitent de la lumière de
la lune pour produire le même effet ; ils
ont de longs bateaux, auxquels ils attachent
des deux côtés une planche large de deux
pieds, qui s’étend de l’avant à l’arrière.
Cette planche eff enduite d’un vernis fort
blanc & fort luifant ; le Poiffon, trompé
par le réflet de la lune fur cette .planche,
qu’il prend probablement pour une lame
d’eau, s’élance deffus, & tombe dans le
bateau.
Les Mores du Cap-Blanc, les Chinois
& les Groenlandois font ufage de flèches
ou de javelots pour percer le PoiiTon dans
l ’eau. La flèche efl ordinairement attachée-
a une corde, qui fert à la retirer en même
temps que le Poiffon.
Il y a des Cbaffeurs qui tuent les Poiffons
à coups de fufil. M. Duhamel dit en
avoir vu un qui en droit à plus d’un pied
fous l’eau, ce qui fuppofe une grande habitude
de mirer à travers ce fluide ; car,
d un co te , la refraâion de la lumière fait
paraître le Poiflbn plus près de la furface
de l ’eau qu’il ne l’eft «ellement ; d’une
autre part, la balle de plomb, en paffant
obliquement de l’air dans l’eau, éprouve
dans ce dernier fluide, une déviation qui
la relève au-deffus de fa première direélion.
Le Chaflëur ne peut donc atteindre le but
qu’en dirigeant fon fufil plus bas que l’endroit
oh il apperçoit le Poiflbn, pour
corriger l ’effet de la double réfraftion dont
il s’agit.
On lit dans l’Hiftoire générale des
Voyages, in-40. tome X I V , page 1 1 6 ,
que les Indiens de l’Ifthme de Panama fe
jettent à la mer, & nagent entre deux
eaux , en fuivant les Poiflbns qu’ils ap-
perçoivent, & qu’ils vont prendre à la
main dans les trous oîx ils fe .font retirés.
La nuit ils attirent les Poiflbns avec des
torches de bois de Mahot, & faififfent
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1 avec beaucoup d’adreflfe, ceux qui fe portent
vers la lumière.-
La même Hifloire rapporte, tome XIII,'
pages 11 & 12, que les meilleurs nageurs,
parmi les Indiens de Cumana, fe réunifient
pour faire fur la mer un exercice affez femblable
à e qu’on appelle battue dans la
chafle ordinaire ; ils forment une longue
chaîne ,' 6c en fifflant & battant l’eau , ils
entourent les Poiflbns, & les raffemblent
peu a peu vers là r iv e , en fi grande abondance
, que le fpeéfacle en efl quelquefois
| effrayant. Cette pêche fe fait dans des temps
régies ; 6c malgré l’extrême habileté des
Pêcheurs, il en périt toujours quelques-
uns, foit noyés, foit éventrés par les gros
Poiflbns.
On fçait qu’il y a beaucoup d’Oifeaux
qui font la chafle aux-Poiflbns : de ce
nombre efl: le Cormoran, qui pourfuit fa
proie dans l’eau avec une vîteffe égale â
celle des Oifeaux qui fendent l’air. Dans
certains pays , il- y a des gens qui fçaverrt
tourner à leur profit la voracité &c l’a-
dreffe de cet animal. M. Duhamel rapporte
(Traité des Pêches, fection 3 , chapitre 1,'
page 1 7 ) .qu’il a vu à Fontainebleau des
Cormorans que l’on avoit dreffés pour la
pêche, 6c dont on fe fervoit de la manière
fuivante.
On leur ferrait le bas du cou avec une
efpèce de jarretière, pour les empêcher
d’avaler entièrement le Poiffon ; enfuite
on les laiffoit aller à l’eau, oîi ils pour-
fuivoient leur proie , en nageant avec
rapidité 6c en plongeant jufqu’au fond. Ils
avaloient tout le Poiffon qu’ils avoient
pris ; & à caufe de la jarretière qii’on leur
avoit mife, ils ne pouvaient le faire palier
plus loin que leur cefophage, qui efl fuf-
ceptible d’une grande dilatation. Lorfque
cette efpèce de poche fe trouvoit remplie,
les Cormorans alloient rejoindre leurs maîtres
, qui leur faifoient dégorger fur le
fable les Poiflbns qu’ils avoient avalés ; ils
en mettoient à part quelques - uns pour
eux - mêmes , & donnoient le refte aux
Cormorans ; après leur avoir ôté la jarretière
qui leur ferroit le cou, ils les faifoient
ranger fur une ligne, puis ils leur jettoient
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des Poiffons, que qes Oifeaux faififfoient à
la vo lé e , comme un Chien faifit un morceau
de pain. S’ils avoient pris le Poiffon
par la queue ou par le milieu du corps ,
ils le jettoient d’eux-mêmes en l’a ir, 6c le
retendent par la tête pour l’avaler.
Les Chinois employent au meme ufage
des Cormorans 6c d’autres Oifeaux pécheurs
; mais au lieu de leur mettre une
jarretière, ils leur paffent le cou dans un
anneau de fer, pour les empêcher d’avaler
leur proie. Un Oifeau bien dreffé efl fi
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eftimé, qu’on le vend cent cinquante florins
de Hollande.
Cet article fur les Pêches efl d’un de mes
Confrères, nui a aujji fait les articles de
VHifloire de l’Homme , marqués d’un aflé-
rifme, & qui m’a été d’un grand fecours pour
les deferiptions des Quadrupèdes ovipares, des
Serpens & des Poiffons. J ’ai du regret qu’il
ne me foit pas permis de publier ici fon nom,
qui efl déjà bien connu parmi ceux des Natu-
rdliftes ; mais fa très-grande modeflie ejl une
de fis principales vertus.