
<ie queue très-vifs il acquierre la force fiéceffairô
pour furmonter la réfiftance de l’eau».
Le fentiment le plus généralement adopté, eft
que les Saumons frayent dans les eaux douces & y
dépofent leurs oeufs. D’autres penfent qu’ils frayent
à la mer, &. qu’ils vont enfuite chercher dans les
eaux douces une nourriture propre à les rétablir
delà maladie dûfrai. Ce fentiment, comme l’on
voit, eft bien oppofé à celui des Auteurs, qui prétendent
que le féjour des Saumons dans l’eau douce
leur eft très-nuifible , & les rend Bécards. Aufli ces
Auteurs foutiennent-ils que les Saumons ne paffent
dans les rivières que pour fe débarraffer d’un in-
fe&e qui les attaque à la mer, &. qui périt dans
l’eau douce. Mais la rapidité avec laquelle les Saumons
remontent, comme nous l’avons dit, le cours
des rivières, quelquefois jufqu a leur fource, fup-
pofe dans ces poiffons une impulfton différente de
celle que produiroit la crainte d'un ennemi, dont
ils feroient bientôt délivrés , fans avoir befoin de
faire un fi long trajet. D’ailleurs , la grande quantité
de petits Saumons que l’on prend dans les
rivières, vient à l’appui de l’opinion, qui veut que
ces poiffons paffent dans les eaux douces pour y ;
-frayër.
Suivant une* lettre adreffée à Gefner, les Saumons
entrent en foule dans le Rhin, au commencement
du printemps ; ils y frayent en différentes
faifons; la plupart commencent peu-de temps
après le folftice d’été ; quelques femelles ne jettent
leurs oeufs que pendant l’automne, d’autres
pendant l’hiver, & il y en a qui ne les jettent
qu’au printemps fuivant. Ces poiffons, après le
frai, changent de goût ; l’Auteur dit qu’alors on
les prendrait pour d’autres efpèces , au point
qu’on leur a même donne des noms particuliers.
Il ajoute que les femelles tracent dans le fable
des filions oh elles dépofent leurs oeufs, qui font
enfuite fécondés par les mâles.
On a remarqué qu’après le frai , les Saumons
avoient fous le ventre des égratignures , que
quelques-uns attribuent à des morfures dinfeéles;
mais il eft plus probable qu’elles viennent de ce
que ces poiffons fe frottent contre le gravier,
pour faire leur ponte. Au refte, il y a beaucoup
d’autres poiffons fur qui l’on remarque de fem-
blables égratignures , dans la même circonftançe,
c e qui confirme l’opinion que nous avons adoptée.
On ne peut nier qu’il n-’y ait des infe&es qui
s’attachent aux Saumons. Quelques Naturaliftes
même ont donné la defcription de ces infeftes.
On prend aufli des Truites qui font toutes couvertes
d’infeâes. Wilîughby avance, fur le rapport
d’autrui, que les Sang - fue-s incommodent
beaucoup les Saumons-, & les font bondir dans les
eaux. Mais ces poiffons trouvent des ennemis plus
redoutables parmi les Marfouins, qui les pourfui-
vent avec tant d’acharnement. qu’ils en prennent
quelquefois jufques dans les filets. On dit aufli
qu’ils accélèrent, par leurs attaques, le paffage
des Saumons dans les rivières. Nous avons déjà
remarqué que l’on prenoit très-rarement des Saumons
dans la Méditerranée , en forte qu’on peut
dire que ce poiffon eft particulier à l’Océan &. aux
mers dû Nord.
Lemery dit, dans fon Traité des Drogues Amples
, page .773 , que le Saumon fe nourrit de petits
poiffons.* Quelques Auteurs prétendent qu’il ne
vit que d’eau , & ils fe fondent fur ce qu’on n’a
trouvé aucune apparence de nourriture folide dans
l’eftomac de plusieurs Saumons qu’on avoit diffé-
qués. Mais, fuivant la remarque de Willughby, le
Saumon mord avec affez d’avidité aux appâts-qu on
lui prélente , tels que des vers & des morceaux de
petits poiflons. Pourquoi ne profiteroit-il pas journellement
de la même nourriture qui fe trouve a
fa portée , & dont il lui eft fi facile de fe. iaifir ?
La chair du Saumon eft épaiffe , tendre, lamel-
leufe, d’un goût qui a quelque chofe de doux &
d’agréable à-la-fois. Cependant elle a befoin d’être
relevée par l’affaifonnement, Gefner & d’autres
Auteurs mettent ce poiffon au premier rang, parmi
tous ceux qui font d’ufage comme aliment. Mais
cette préférencé eft plutôt fondée fur le rapport
du goût, que fur des railons de fanté ; car le S au-
mon n’eft pas propre pour les eftomacs délicats, ÔC
il feroit dangereux d’en donner aux convalefcents.
On eftime fur-tout les Saurons qui ont ta tête très-
petite, à raifon du volume de leur corps, qui doit
être gros & arrondi, ce qui indique qu’il eft gras
& charnu. Ses écailles doivent être brillantes, &
l’on regarde cet éclat comme un figne de fanté.
,Au contraire, ceux qui éprouvent la maladie du
frai les ont ternes, & leurs couleurs moins vives
annoncent une langueur dont la chair du poiffon fe
relient par le goût fade & défagréable qu’elle en
contracte.
Le Saumon -eft fi généralement eftimé, le débit
en eft fi sûr & fi lucratif, lorfque ce poiffon eft
frais, qu’on juge aifément combien les Pêcheurs
ont dû varier & multiplier les moyens de le prendre.
Nous ne parlerons qu’en paffant de ceux qui
ne diffèrent point de ce qui fe pratique pour la
pêche de toutes fortes de poiffons, tels que l’emploi
des faines, des parcs, des .filets, & autres
pêcheries , où l’on prend effeélivement une multitude
de poiffons de toute efpèce , pêle-mêle
avec des Saumons. Mais il y a des pêches particulières
où la prile de ce poiffon eft l’objet .prin-
pal qu’on fe propofe.
Un moyen fort fimple que l’on employé pour
y parvenir, confifte à leur oppofer un obftacle qui
les arrête au paffage, lorfqu’ils montent de la mer
dans les courants d’eau douce. Si ce courant eft
une rivière étroite, on fe contente quelquefois de
tendre en-travers un trémail foutenu de diftance
en diftance par des piquets, & où le poiffon rie
manque ^uère de s’emmailler. D’autres fois c’eft un
fimple filet contre lequel le poiffon s’ùccumule, &
çù l’on va le prendre avec une faine. Dans
Dans plufieurs endroits, pour diminuer l’étendue
du filet* qui occafionne beaucoup de dépenfe &
n’eft pas d’une longue duree , on rétrécit le lit de
la rivière par un clayonnage, au milieu duquel
on laiffe une efpace libre pour le paffage des bateaux
3 on ferme cette efpace , dans le temps de la
pêche, avec un filet, en forte que la totalité des
clayonnages & du filet forme une barrière qui
arrête le poiffon; on fe fert, pour le prendre,,
d’une faine, comme dans le cas precedent.
S’il n’y a point de navigation fur la rivière ,.on
barre Peau d’un bord à l’autre, choififfant un endroit
où le lit foit étroit , pour diminuer les frais
de l’établiffement, ou pour qu’à l’aide d un courant
plus rapide les Saumons fe rendent en plus grand
nombre auprès du clayonnage ; car on a remarque
que ces poiffons fembloient te plaire à refouler les
■eaux dont le cours étoit accéléré, comme s’ils
youloient faire effai de leur force.
Il y a dans la Guyenne des pêcheries de poiffons
qu’on appelle NaJJes , & qui font plus avan-
tageufes que les précédentes. On barre en partie
le cours de la rivière par une chauffée de pierre,
principalement deftinée à retenir l’eau pour faire
tourner la roue d’un moulin. Au-delà de cette
chauffée, en fuivant la direôion du courant on
établit des grillages qui forment deux des cotes
d’un triangle dont la chauffée eft la bafe. On
laiffe au fommet de ces triangles des ouvertures
qui livrent un paffage aux Saumons. Lorfque
î’on veut faire la pêche de ces poiffons, on
ouvre des vannes pratiquées le long de la chauffée
, & l’eau paffant par des grillages fitués derrière
ces vannes, forme un courant qui détermine
les Saumons à le remonter. Ils entrent dans
l’enceinte des triangles par les ouvertures dont
nous avons parlé; mais ils ne peuvent plus| en
fortir, parce qu’ils trouvent, a 1 endroit meme
de leur paffage , des brins d un bois flexible,
qu’ris ont écartés pour entrer , mais qui leur
ferment toute iffue , en leur oppofant leurs
pointes, dont les direâions font convergentes
vers l’intérieur de l’enceinte.
Dans quelques endroits , comme à la Val-Dieu,
aux environs de Charleville, la pêcherie eft formée
d’une charpente, divifée en plufieurs chambres,
qui ont un plancher de bois. Les Saumons entrent
dans ces chambres par des grillages en goulet ou
en entonnoir , dont les baguettes fouples & elaf-
tiques, faifant fo même office que celles qui ont
été décrites qi-deffus, permettent aux poiffons de
paffer dans les chambrés , mais non pas d’en fortir.
Lorfqu’on veut les prendre , on abaiffe des pelles
qui interceptent le courant de l’eau, en forte que
celle qui eft dans l’intérieur de la pêcherie , s’écoulant
par des grillages qui font fur le coté oppofé,
les poiffons relient à fec fur le plancher,,ou l’on
va les prendre, foit avec la main, foit à l’aide d’un
jfilet. \ i •
p n conftruit auffï des efpèces de coffres a çiaire-
fîijlo ifc Naturelle, Tome 111%
voie, que l’on appelle coffres à Saumons, &. qui
ont ordinairement un couvercle fermant à clef,
non - feulement pour mettre le poiffon en fureté,
mais pour empêcher qu’il ne fe fauve en fautant
par - deffuà les bords du coffre. Qn. difpofe ces
coffres auprès de quelque digue qui ^arrête les
poiffons,de manière qu’après l’avoir côtoyée, en
cherchant un paffage qui leur permette de remonter
vers la fource des rivières , ils font attires par
un courant rapide qui fort du coffre , & qui enfile
l’efpace relié libre entre la digue & le bord de
l’eau. Ils entrent donc dans le coffre par une ouverture
garnie d’un goulet de baguettes élaftiques ,
& les Pécheurs vont les y prendre avec des filets
'en forme de poche , fufpendus au bout d’une per-
■che. On conçoit que l’on peu^ varier de differentes
manières ces fortes de pêcheries, fuivant la dif-
pofition des lieux , ou les idées des conftruéleurs.
On employé différentes efpèces de filets, pour
prendre les Saumons qui fe trouvent arretés auprès
des digues ou chauffées qu’on leur oppofe, dans les
rivières dont ils remontent le cours. On fe fert, fur
la Mofelle, de l’épervier, du çarrelet, & d’une
nappe de filets que les Pêcheurs appellent
Souvent les Pêcheurs attachent, aux extrémités,
d’une des perches courbes qui forment la croifee
du carrelet, lin filet qu’ils nomment trahifon. Ce
filet traverfe diagonalement le carrelet, & par fa
pofition verticale, il empêche le poiffon de fauter
par-deffus le carrelet; il a de plus l’avantage de
fervir aux Pêcheurs d’indication, pour reconnoître
lapréfence des Saumons, qui donnent des fecouffes
à ce filet, par les violents efforts qu’ils font pour
le franchir.
Les Pécheurs de Saint - Valéry, qui ont leurs
maifops fur le bord de la Somme , pêchent des
Saumons par leurs fenêtres , avec un grand' échi*
quier, fufpendu à une corde, qui paffe fur une
poulie. C’eft ce qu’on appelle en quelques endroits
pêcher au hunier. On pêche aufli, fur la Somme ,
des Saumons, avec de grande vpryeux garnis de
goulets.
Les Hollandois cpnftruifont dans la Meule, pour
la pêche du Saumon, des efpèces de parcs, faits
avec des clayonnages de branches de faule. Ces
clayonnages forment un enfoncement, vers le
courant de l’eau, & s’élèvent de deux pieds
au-deffus de la furface. Qn place en avant un
grand veryeux dont les ailes fe réuniffgn.t .a celles
du clayonnage, en forte que le tout forme une
enceinte. Mais le verveux eft affez enfoncé dans
l’eau, pour que les Saumons puiffent le franchir,
en nageant, fuivant leur coutume , contre le cou^
rant. Etant arrivés au parc, qui eft plus élevé , ils
donnent contre le clayonnage, & ne pouvant
réuffir à s’élancer par-deffus, ils s’éfarouchent, fe
portent vers le fond pour s’en retourner, & vont
fe prendre daps le verveux. Dans d’autres endroits,
tels que ceux où fe fait la jonélion de 1J| Meufe
avec le Rhin, le Leçk ôc le Vaal, on pêche les
y I