
eft maintenue verticalement dans le fens
de la hauteur, par le moyen des flottes &
du left. Comme le Poiflon ne s’y emmaille
pas, ou que, fi cela arrive, ce n’eft, pour
ainfi dire, que par accident, on ne peut
relever le filet qu’en joignant l’une à l’autre
les deux ralingues , pour renfermer le
Poiflon dans cette duplicature. Les Pêcheurs
ont encore l’attention de rétrécir
de plus en plus la courbure horizontale
du filet, en rapprochant les bras l’un de
l ’autre, lorfqu’ils font près de retirer la
faine de l’eau, afin d’envelopper un plus
grand nombre de Poiflons.
Dans les rivières ou les courants qui
ont pevi de largeur, les Pêcheurs fe partagent,
& après s’être placés moitié fur
un bord & moitié fur l’autre, ils hâlent
fur les deux bras, en traînant le filet ; ils
fie fervent d’une pierre, qu’ils attachent au
bout de l’un des deux bras, & qu’ils jettent
enfuite fur le bord oppofé., foit lorfqu’ils
veulent tendre leur filet, foit lorfqu’ils fe
propofent de le ramener à bord.
On fait avec la faine, dans les étangs,
au bord de la mer 8c entre les roches, où
l ’eau a peu de profondeur, une pêche qui
porte le nom de pêche au colleret. Les Pêcheurs
entrent dans l’eau jufqu’aux aiflëlles;
& après avoir traîné le filet pendant quelque
temps , fe rapprochent, pour en réunir
les extrémités , avant de le retirer. Les
Pêcheurs Flamands font traîner le colleret
par des chevaux ; & en fe procurant ainfi
une force plus confidérable, ils ont l’avantage
de pouvoir donner plus d’étendue au
fiiet.
Lorfque les Pêcheurs font en petit
nombre, ils attachent l’un des bras dont
il a été fait mention à un pieu fixé fur le
bord de l’eau ; & prenant l’autre .bras dans
un bateau , ils font décrire un arc à la
faine, puis ramenant le bras qu’ils ont
confervé dans le bateau, vers le pieu auquel
eft attaché l’autre bras, ils retirent
ainfi leur faine à terre : quelquefois ils
établiffent fur le rivage deux treuils, pour
mettre à bord la faine qu’ils ont tendue
avec un bateau. D ’autres fe féparent en
deux bandes, dont l ’une, qui refte fur le
rivage , hâle un des bras du file t, tandis
que l’autre, qui efl: dans un bateau, traîne
l’autre bras : d’autres encore ont deux bateaux
, avec lefquels ils tirent les deux
bras de la faine, & ils finiflent par l’amener,
à terre, quand le rivage eft praticable,
ou bien ils relèvent leur filet à . la mer ,
en rapprochant les deux bateaux l’un de
l’autre.. . .
Gomme il s’échappe toujours quelques
Poiflons, lorfqu’on met à bord les grandes
faines, fouvent deux Pêcheurs fie mettent
à l’eau, & traînent un colleret derrière le
fond de la faine, pour reprendre le Poiflon
qui s’évade. C’eft ce qu’on appelle pêcher à
la grande faine foutenue d'un colleret.
On a donné aux faines une forme plus
avantageufe , en y ajoutant une efpèce de
poche ou de fac , qui occupe le milieu de
leur largeur, en forte que les deux portions
adjacentes du filet forment comme
deux aîles attachées fur les bords latéraux
de la poche. Ces filets, qui ne fervent que
dans la Méditerranée, portent les noms
d'aiffaugue , eiffàugue, ejfaugue ou iffaugue ;
de boulier, btegin, ganguy , boeufs, lartanne,
fuivant les différentes manières dont oo
les employé , & qui diffèrent peu , en
général , de celles qui font ufitées dans
les pêches aux grandes faines. On conçoit
affez combien toutes ces pêches font def-
truûives ; mais aucune ne l’eft autant que
celle qu’on nomme aux boeufs, dans laquelle
le filet, chargé .d’un left confidérable , eft
traîné rapidement par deux bateaux à la
voile, qui hâlent fur les deux bras. Ce filet
laiffe par-tout des traces funeftes de fon
paflage fur le fond qu’il fillone, comme
feroit le foc d’une charrue ; le frai 8c la
menuife périffent,; les Poiflons même qui
fe prennent dans la poche du filet, frpifl'és
l’un contre l’autre, par la rapidité du
mouvement qui les emporte, fe trouvent
prefque tous morts ou . très - endommagés
, lorfqu’on les retire : aufli çette
pêche eft - elle défendue par toutes les
Ordonnances ; mais comme les Pêcheurs
exercent fouvent leur métier pendant la
nuit, il y en a qui profitent de ce temps
pour tromper la vigilance des Officiers de
l'Amirauté,
l’Amirauté, & pratiquer en fecret cette
pêche meurtrière.
Nous venons de voir qu’en ajoutant une
poche aux faines, on en formoit les aif-
fiuigues , les bregins & autres filets du
même genre. Si maintenant, on fupprime
les aîles , pour ne.conferver que la.poche,
il en réfultera d’autres efpèces de filets ,
auxquels on a donné les noms de drague,
chaujje, cauche, chalut, fac de drague, bâche
traînante, couvreau, carte, corret, dranguelle
ou drangelle , &c. Ces filets ne diffèrent
prefque des guideaux & des naffes dont
nous avons'parlé précédemment, qu’en ce
que ces derniers relient fédentaires, au lieu
qu’on traîne les autres fur le fond de la mer.
Pour maintenir l’embouchure des filets
dont il s’agit ici conftamment ouverte , j
tantôt on amare un côté de cette embou- !
chure fur une efpèce de tringle de bois !
léger, tel que du fapin, 8c on.attache au i
côté oppofé une corde plombée, q u i, par
fon poids, tient cette partie du filet écartée
de la partie fupérieure ; tantôt on fubftitue
à la tringle dont on vient de parler, une
corde qui porte des flottes de liege ; telle I
eft la garniture d’une efpèce de filet en
forme de poche quadrangulaire, 8c que l’on
nomme chalut'en Saintonge, en Poitou 8c
en Bretagne. On attache , aux extrémités
de la garniture , des cordes qui fe réunifient
les unes fur les autres en des points
communs, & il part d’un .des points de
réunion une autre corde qui fert à traîner
le.filet. Les filets de ce genre fe traînent,
comme les précédents, tantôt à bras , 8c
d’autres fois â l’aide d’un ou deux bateaux,
qui s’avancent par le moyen des rames ou
des voiles.
Il nous refte à parler des parcs pierres 8c
flottés, que l’on tend dans la Méditerranée,
farts employer ni perches, ni piquets. Le
but de ces pêcheries eft d’arrêter les Poif-
fons q u i, après avoir féjourné quelque
temps fur nos côtes, femblables aux Oi-
feaux de paflage, fe retirent, pendant le
refte de l’année, dans d’autres parages qui
leur conviennent mieux. On diftingue particulièrement
les Thons parmi ces Poiflons
voyageurs.
Hifloire Naturelle. Tome III.
Dans la faifon du paflage , les Pêcheurs
parcourent la mer comme les Chaffeurs
battent la campagne ; 8c lorfqu’ils apper-
çoivent un banc de Poiflons, les bateaux
les mieux armés gagnent la tête de ce banc,
8c ferment le paflage aux Poiflons, en tendant
devant eux leurs filets garnis de flottes
& de left, tandis que les autres en tendent
de pareils fur les côtés & à l’arrière , 8c
forment ainfi une enceinte, dans laquelle
ils enferment le plus de Poiflons qu’il eft
poflible. Cette efpèce de parc s’appelle
feinche, ou Amplement enceinte.
S’il n’y a que de petits Poiflons dans la
feinche, on les y pêche avec différentes
fortes de filets ; mais fi ce font des Thons,
on forme, depuis la feinche jufqu’auprès
de la terre , avec des paliffades de filets
tendus parallèlement l’un à l’autre , un
canal qui communique à un petit parc que
l’on établit à peu de diftance du rivage :
on ouvre enfuite la paroi de la feinche qui
répond au canal ; les Thons, qui cherchent
à fe fauver, fe jettent précipitamment dans
le canal ; oh les y excite encore , en les
effarouchant dans l’enceinte de la feinche :
..lorfqu’ils fpnt tous entrés dans le parc, on
1 les y enferme, & l’on affermit les parois
du parc, en doublant les filets qui les
compofent, & en les affujettiffant par des
cordes tendues qui répondent aux ancres
ou grappins de tous les bateaux que l’on a
mouillés exprès à l’entour. Les Pêcheurs
. retirent les Thons du réfervoir avec des
filets, ou en les harponnant.
Cette pêche n’eft plus guère pratiquée,
depuis qu’on a multiplié fine efpèce de
grand parc, qui reftj tendu à la mer, au
lieu d’etre conftruit fur le champ comme
la feinche, 8c auquel on a donné lé nom
de madrague.
Ce parc forme une vafte enceinte, distribuée
par _ compartiments en plufieurs
chambres , qui portent différents noms ,
fuivant les pays. Les cloifons font maintenues
par des flottes de liege 8c un left
de pierres, 8c de plus par des cordes, dont
une extrémité eft attachée à la tête du filet,
8c l’autre amarée à une ancre.
On établit sntre l’enceinte 8c la côte une