grande chaffe d.e filet, comme pour les
parcs fermes, que l’on confirait en clayonnages.
Le Poiffon fuit la chaffe , qui le
conduit dans la madrague ; il pâlie d’une
chambre à l’autre , jufqu’à ce qu’il foit
arrive dans la dernière chambre •, qu’on
nomme la chambre de la mort. Les madragues
ont quelquefois jufqu’à mille braffes
de longueur.
Pour determiiler les Poifîons à fe raf-
fembler tous dans le corpou, on fe fert
dun filet que l’on nomme engarre, & que
1 on fait avancer , en le tenant toujours
tendu , par le moyen de deux bateaux qui
. ep retiennent les angles fupérieurs. Lorfque
lo p veut faire la peche , plufieurs barques
chargées de Pêcheurs s’avancent vers le
corpou, & le,s Pêcheurs hâlent fur les filets
qui compofënt cette chambre, en les fou-
levant de njanière à faire monter en même
temps le Poiffon allez près de la furface
de l’eau, pour qu’on foit à portée de le
prendre à force de bras, ou avec des
crocs.
La curiofîte attire ordinairement une
foule de fpeâateurs à la.pêche des. Thons,
qui fe fait dans les madragues. L’adreffe fié
l ’agilité des Pêcheurs Provençaux, qui fe
jettent dans le même filet ou font les Poif-
ibns , fie s efforcent de les fàifir , de les
harponner ou de les affommer, les combats
qu’ils font obligés de livrer à ces animaux,
pour vaincre lèur réfiftance, dopnent lieu
a une multitude de fcènes^ divertiffantes.
Les acclamations des fpeâateurs, l’harmonie
de plufieurs cors de chaffe qui fe
font entendre le long du rivage, tout contribue
à faire de cette pêche une fête, dont
il refie, dit-on, dans Tame de ceux qui en
ont ete lés témoins, une impreffion vive
^ AProf°nde, qui ne leur permet d’en parler,
meme long-temps après, qu’avec une forte
crenthoufiafme.
• Pour mieux concevoir à quel point
l ’induflrie des. Pêcheurs a fçu varier les
reflburces que leur offrent les divers filets
en ufage parmi eu x , réfumons l’article,
precedent, fie reuniffons-en les détails dans
une efpece de tableau général.
On peut confidérer les filets par rapport
| à la matière dont ils fon t compofés, à leur
forme , aux proportions de leurs mailles,
aux combinaifons d’une forme avec elle-
même, ou de différentes formes entr’elles
enfin, aux diverfes manières dont on les.
employé.
La matière la plus ordinaire des filets ell
le fil de chanvre ou celui de lin ; mais on
fait auffi des filets improprement dits avec
des clayonnages de jonc, d’ofier, & autres
bois tendres & fouples ; tels font les naffes ,
les bourdigues., ôte.
A l’égard de la forme, les filets font
ou en nappes , comme les carrelets , les
ravoirs, les faines , St g . o u en poches ,.
comme les trubles, les guideaux, les ver-
veux-, les dragues, fitc.
La grandeur des, mailles efî ou déterminée
fit relative à la groffeur des Poiffons
qu’on veut prendre, comme dansjes ma-
nets ; ou indéterminée fit même variable
fur un feul filet, dont les mailles vont en
fe rétrecillant, comme cela a lieu par
rapport à un grand nombre de filets.
Les nappes fit les poches , combinées
avec elles-mêmes, ou P une avec l’autre ,
fourniffent trois claffes différentes de filets»
On combine les nappes avec elles-mêmes
dans les trémaux, oh il y a trois nappes
appliquées l’une fur l’autre ; dans les parcs
fermes , dont la partie principale efl circulaire,
St l’autre, qu’on nomme la chaffe,
efl en ligne droite , fitc. La combinaifon
des nappes avec les poches donne les verveux
ailés , les gors , fitc. Enfin , en combinant
une poche avec une fécondé, qui
occupe l’intérieur de la première, on a-
formé les verveux Amples, les naffes, fitc»
Il y a , en général, deux manières d’employer
les filets : l’une exige que le Pêcheur
foit préfent fit qu’il agiffe, St elle.fe fous-
divife en plufieurs efpèces de manoeuvres
différentes ; tantôt c’eft une poche que le
Pecheur lance à l’eau , comme dans la.
pêche à l’épervier ; tantôt il plonge à
l ’eau un filet en poche ou en nappe, attaché
à un manche , ou fufpendu à une
corde , pour le relever après un court
efpace de temps, comme lorfqu’il pêche
avec le carrelet , le truble , la favre ;
d’autres fois il pouffe devant lui le filet,
comme un rateail ; c’efl ce qui fe pratique
dans la pêche aux bouteux. Souvent enfin
il traîne le filet fufpendu entre deux eaux,
ou appuyé fur le fond par fa partie inférieure
, comme lorfqu’il fait ufage des
dreiges, des faines, des dragues , fitc.
La fécondé manière ne demande du Pêcheur
que le foin de tendre fit de relever
le filet, avec un coup d’oeil jette de temps
en temps fur le lieu de la pêche , pour
obferver s’il y a des Poiffons de pris. C ’efl
à cette manière que fe rapportent les guideaux
, les verveux, les ravoirs, les parcs
ouverts ou fermés, fitc. Tous les filets qui
s’employent de cette manière portent en
général le nom de filets fèdentaires, comme
nous, l’avons dit plus haut : eaux que l’on
traîne s’appellent filets flottants & dérivants;
quant à ceux que l’on plonge, pour les
retirer prefqu’auiïi-tôt, comme l’épervier,
ils tiennent, pour ainfi dire, le milieu
entre les filets fédentaires & les filets dérivants.
On v o it , par les détails qui précèdent,
qu’il y a beauçoup de filets qui portent
différents noms , St qui ne font que le
même filet employé de diverfes manières.
Chaque filet change auffi de nom , fuivant
les lieux, en forte que la nomenclature
des pêches efl extrêmement chargée, outre
qu’étant liv ré e , en quelque fo r te , aux
caprices de ces Langues corrompues qu’on
appelle Patois, .elle manque fouvent de la
préçifion néceflaire, pour qu’on puiffe dif-
tinguer nettement un filet de l’autre. Mais
comme l’u'fage, en ce genre, devient une
forte de lo i, nous avons confervé, autant
qu’il a été pofiible, les dénominations reçues.
On trouvera, dans le cours de ce
Diûionnaire, l’explication des termes qui
défignent les filets dont nous n’avons point
parlé dans cet article , & qui ne font que
des efpèces de modifications de celles que
nous venons d’expofer.
3°. Differentes pêches particulières.
Les pêches qui feront l’objet de cet
article , font celles que l ’on pratique avec
des inflruments qui diffèrent des hameçons
fie des filets, ou dans lefquelles on a recours
à des expédients fie des rufes d’un
genre particulier, pour attirer fii furprendre
le Poiffon.
Les inflruments dont il s’agit font des
efpèces de faucilles femblables à celles dont
fe fervent les Moiffonneurs, des crochets
• ou gaffes emmanchés au bout d’une longue
perche, des rateaux, des herfes quarrées
ou triangulaires, des pelles ou des.pêches,
des crots ou grappins, des digons ou an-
gons, c’efl-à-dire des pointes de fer ajuflées
au bout d’une perche ; des fourches, des
tridents, des fichoires à quatre branches,
fitc. Tous ces inflruments, terminés par
une ou plufieurs lames pointues, portent
la dénomination générale de fiouanne.
On fe fert des fouannes, ainfi que des
autres inflruments dont nous venons de
parler, foit pour aller prendre les Poiffons
qui fe retirent entre les rochers, tels que
' les' Congres, foit pour aller les chercher
dans le fable, oîi ils font enfouis , SC
les y piquer, ou les en faire fortir, pour
les affommer enfîiite, comme cela fe pratique
, en certains endroits , par rapport
aux Anguilles. , ;
La peche que l’on nomme à la foule, ou
Pommeter, ou Plyetter, fe fait en marchant
à pieds nuds fur le fable ; 8l quand le Pêcheur
fent u n Poiffon fous fes pieds, il le
prend avec les mains, ou le perce à l’aide
d’un hangon.
On a remarqué que la lumière , & en
général les corps brillants , attiroient le
Poiffon, 8c l’on a employé dans plufieurs
pêches cette efpèce d’amorce. Quelquefois
on fe fert d’un réchaud, que l’on attache
à l’avant ou à l’arrière d’une chaloupe, fiC
dans lequel' on fait dû feu avec des éclats
de vieilles douves , dans lefquels il y a du
goudron. Les Poiffons fe portent du côté
où ils voyent la-lumière; & dès qu’ils font
à portée des Pêcheurs , ceux - ci lancent
fur eux des fouannes qui les en rendent
maîtres. Cette pêche fe nomme pêche au
pharillon ou petit phare. Lorfque le temps
efl calme 8c la nuit fort obfcure, on prend
quelquefois, en une feule pêche, douze à
e ij