
efpèces d’aîles ou de longues nappes, dif-
pofées dans une fituation verticale, de
manière qu’elles vont en convergeant vers
le filet; alors le Poiffon, q u i, fur-tout
dans les courants d’une certaine largeur,
pafferoit à droite & à gauche du verveux,
le trouve enfermé entre les ailes qui le
conduifent dans ;le filet.
On forme aulîi, avec des files de pieux
contigus l’un à l’autre, des paliffades que
l ’on nomme gors, lituées fur des lignes
convergentes, comme les ailes dont on
vient de parler, & qu i, en rétréciffant le
cours de l’eau, en augmentent la vîteffe,
& forcent un plus grand nombre de Poif-
fons à entrer dans le filet. On varie ces
indullries de différentes manières, fuivant
la nature & la difpofition des lieux où fe
font les pêches.
Les naffes font des efpèces de verveux
faits d’auffe, de jonc, d’oïier ou de quelque
bois flexible, & conflruits à claire-voie ,
de manière qu’ils laifl'ent paffer l ’eau &
retiennent le Poiffon. On leur donne di-
verfes formes, & on les connoît fous différents
noms, tels que ceux de najfon, nanfe,
lance, tire, bouteille, ruche, panier, bout-
terolle.
On adapte à la plupart des naffes un
goulet fait de la même matière, 8c dont les
brins déliés permettent, par leur flexibilité,
au Poiffon d’entrer dans la naffe, mais font
obftacle à fa fortie, en lui préfentant leurs
pointes, qui fe font rapprochées par l’effet
de leur reffort. On retire le Poiffon par
une petite trappe adaptée au corps de la
naffe.
Dans les étangs falés, qui ont une communication
avec la mer , on conftruit des
efpèces de naffes d’une grandeur confidé-
rable, que l’on nomme bourdigues ou b or-
digues. On choifit pour cela le temps où le
Poiffon, après avoir été frayer dans les
étangs, doit bientôt repaffer à la mer.
Les bourdigues font des affemblages de
cloifons faites avec des nattes 8c des pieux
fitués de diftance en diftance pour foutenir
ces nattes. Deux de ces cloifons , qu’on
appelle murailles, 8c qui convergent l’une
vers l ’autre, en allant de l’étang à la mer,
ferment l’enceinte formée par la bourdlgue.
D ’autres cloifons plus petites font fituées
deux à deux fur des lignes qui convergent
en dedans des murailles , & repréfentent
autant de goulets qui s’adapteroient aux
deux cloifons principales. On pratique une
petite ouverture à la pointe de ces efpèces
de goulets , pour laiffer paffer le Poiffon.
Les deux murailles font interrompues, de
diftance en diftance j par des refervoirs
circulaires fitués à l’origine des cloifons
qui forment les goulets, de manière que
les Poiffons , qui fe trouvent entre les
goulets 8c les murailles, ont la facilité de
pénétrer dans ces réfervoirs, auxquels on
a donné le nom de tours. Il y a aufli, a
l’endroit de la jonâion des murailles, une
to u r , derrière laquelle eft une naffe qui
termine la bourdigue : à côté de cette
même tour eft un réfervoir où fe retire
une partie du Poiffon , qui fe raffemble
dans la tour en plus grande quantité
qu’ailleurs.
Les Pêcheurs ont dans le voifinage de
la bourdigue, fur un lieu tin peu élevé ,
une cabane où ils fe tiennent nuit 8c jour,
8c de temps en temps ils vont dans un petit
bateau, avec une efpèce de truble appelle
coupeillon, pour prendre le Poiffon qui eft
entré dans les différents réfervoirs de là
bourdigue. Comme le Poiffon nefouffre
point dans ces réfervoirs, on n’eft point
aftreint à faire cette vifite à des heures
réglées.
Les bourdigues ont quelquefois jufqu’à
cinquante ou même foixante toifes de longueur
fur v ing t-cinq à trente toifes de
largeur. Dans les endroits qui ont peu de
largeur, on conftruit des efpèces de petites
bourdigues appellées maniguyeres ou mey-
nadieres.
Les filets dont nous allons parler maintenant
font des efpèces de nappes que l’on
tend fur des piquets de plufieurs manières
différentes, mais qui ont toutes pour but
de retenir, au tetou r de la marée, le Poiffon
qu’elle avoit entraîné en montant. Les pêches
dans lefquelles On employé ces filets,
s’appellent tentes ou etentes à la baße eau
fur piquets.
On a donné le nom de ravoir à un filet
dont les mailles, qui font quarrées, ont
environ deux pouces de largeur. On tend
ce filet dans une direftion perpendiculaire
à celle du courant, 8c on le retrouffe par
le bas, de manière à y former des poches
femblables à celles de l’épervier. Lorfque
la marée monte , le courant foùlève le
filet prefqu’à fleur d’eau, 8c il ne fe prend
aucun Poiffon; mais quand la mer baiffe, le
filet s’applique contre les piquets, 8c en
même temps l’eau, refoulée dans la portion
qui eft retrouffée, ouvre les bourfes,
8c plufieurs Poiffons y relient pris , tandis
que d’autres s’engagent dans -les mailles.
Quand les Pêcheurs veulent retirer leur
prife, ils vont, avec des botines, relever
le bas du filet, qu’ils accrochent d’efpace
en efpace aux fommets des piquets , 8c ils
ne font fortir le Poiffon que quand le filet
eft entièrement hors de l’eau. Nous expliquerons,
à l’article des trémaux, ce qu’on
entend par ravoirs trèmailUs.
Pour prendre les Poiffons dé' paffage,
tels que les Maquereaux, les Harengs 8c
même les Merlans, 8cc. on tend, fur de
longues perches , des efpèces de ravoirs>,
que l’on nomme manets', 8c qui prennent
encore divers noms, fuivant les différentes
efpèces de Poiffons que l’on fe propofe
de pêcher par leur moyen ; aînfi, on les I
appelle màrfaïques, harenguüres, harenga'des,
8c en Picardie, rets à Roblots, parce que
les petits Maquereaux y portent le nom de
Roblots. Tous ces filets ne diffèrent entr’eux
que par la grandeur des maillesç dont l’ouverture
eft proportionnée au volume des ;
Poiffons qui doivent s’y engager. On tend
ces filets un bout à terre 8c l’autre dans la
mer, de manière qu’ils croifent la marée,
8c arrêtent lés Poiffons dé paffage, lorfquè
ceu x-c i font portés vers la côte. Cette
peche fé nomme hauts palis, parce que les
perches qui foutiennent les filets s’élèvent
de huit, dix ou douze pieds au-deffus de la
furface du terrein. Les filets appellés cibau-
dïèresfur piquets ou muliers, font des ravoirs
deftinés à prendre principalement des mulets,
d’où leur vient la dénomination de
muliers.
Il y a une manière de pêcher avec des
filets que l’on nomme rets traverfants , &C
auxquels on donne une difpofition fort
différente de çelle des ravoirs. On les laiffe
abaiffés aux pieds des piquets, jufqu’à ce
que la mer foit pleine, ce qui donne au
Poiflon la liberté de fe porter à la côte.
Mais avant que la mer baiffe, on lève 8c
on tend les filets, qui arrêtent les Poiffons
8c les empêchent de regagner le large. C ’eft
tout le contraire de ce qui fe pratique avec
les ravoirs.
Les Pêcheurs de la Gafcogne difpofent,
fur une ligne un peu circulaire, les piquets
qui doivent foutenir le filet, 8c creufent,
au pied de ces piquets, un fillon , dans
lequel ils font entrer leur rets traverfant,
de manière qu’il occupe le moindre volume
poflible; puis ils le recouvrent avec le fable
qu’ils ont tiré du fillon. Lorfque la mer
commence à baiffer, ils dégagent le filet
de l ’eau, & l’élèyent jufqu’au haut des
perches, à l’aide de plufieurs cordeaux attachés
à la partie, fupérieure du filet, en
nombre égal à celui des perches, au fom-
met defquelles ces cordeaux fervent enfuite
à attacher le filet. Cette façon de pêcher
porte lé nom de pallet.
Nous venons dé voir que le but qu’on
fe propofoit dans la pêche aux rets traversants
étoit d’empêcher le Poiffon qui s’étoit
porté à la côte de regagner la pleine mer.
On conftruit, dans la même v u e , fur le
bord de la mer, de vaftes enceintes, qu’on
appelle parcs, dont on a beaucoup diver-
fifié les formes, & pour lefquels on emploie
différents matériaux, fuivant la facilité
qu’on a de trouver plutôt l’un que l’autre
dans le terrein du voifinage.
La nature offre quelquefois des parcs
tout formés , fur - tout dans les endroits
fitués entre les rochers 8c derrière les
bancs, où il refte, après que la marée a
baiffé , des mares ou des réfervoirs. Les
Pêcheurs v on t, avec des trubles 8c autres
petits filets , prendre le Poiffon qui fe
trouve dans ces réfervoirs. On a donné
aux parcs dont il s’agit le nom de parcs
naturels, 8t il eft vraifemblable qu’ils ont
fait naître l’idée de conftruire, à-peu-près