Les évêques ne pouvaient seuls fixer le taux du numéraire. Ce fut de
concert avec le chapitre qu’Englebert de la Marck, en 134.8, modifia le cours
des monnaies servant à payer les cens 1 Le 6 août 1 4 9 7 , dans une journée
d’état, Jean de Horn proposa de baisser la valeur des monnaies nationales,
toujours dépréciées par celles du Brahant; il trouva de l’opposition et n’obtint
qu’une réduction partielle, pour un temps limité, si bien que, moins de deux
ans après, ce cours dut être maintenu par une nouvelle décision des états 2.
Après Érard de la Marck, ce droit de veto fut absorbé par le chapitre,
et lorsque ce corps n’était pas consulté par le prince ou par ses conseillers,
comme il arriva en 1 5 4 9 , il priait le maïeur de ne pas donner suite à l’édit
de Son Altesse 3.
La publication ou c ri d’un édil concernant l'empirance ou la modération
des monnaies, se faisait de concert avec le magistrat de la commune où cet
édit devait être mis à exécution. Les contrevenants étaient punis d’une
amende. En 1 4 8 7 , nous trouvons la formule suivante : « Ons fait assavoir
de par nostre très-redoublé seigneur, monseigneur de Liège, et les maistres,
jureis et conseil de sa cité, que... Et, à reffusant, le paine de iij florins
d’or, à applichier tierce-part à mondit seigneur, le tierce-part à la cité
et autre tierce-part à rapourteurs i . »
La participation des bourgmestres aux édits sur la monnaie finit aussi par
déplaire au chapitre : il continua de les consulter, mais après l’édit de 1 6 3 9 ,
où les bourgmestres étaient nominalement désignés, il protesta contre cette
prétendue innovation et refusa formellement de reconnaître leur intervention
comme un droit, par une décision de l’année 1 6 4 0 s , Il est vrai que le
chapitre, avant de prendre une résolution dans une affaire aussi importante,
ne serat admise que anchois ne soit examinée et taxee, et avoec publement criee le pris
que elle varat; et assi ordinons que toutes monoes d’or et d’argent, vieles et novelles,
soyent d’une pris et valeur par tout en nous pays de Liege et de Louz. » (Ordonnances, etc.,
1™ série, p. 463.)
1 Pièces justificatives, n° V.
2 JoiiAtiNis de Los Chroiiicon, apud de Ram, pp. 113 et 113.
3 S t . Bormans, Répertoire.des conclusions capitulaires, p. 106.
4 De Ram, Analecta leocliensia, p. 822.
s S t . Bormans, Répertoire des conclusions capitulaires, p. 493; Conclusions capitulaires,
reg. 146, fol. 91.
s’entourait de toutes les lumières désirables : on le voit fréquemment demander
l’avis des échevins, du conseil privé, de la chambre des finances ou des
citoyens compétents, tels que les marchands et les compteurs de la cathédrale *.
En général, les édits devaient être publiés le même jour ou dans un court
intervalle, dans toute la principauté. Cependant, pour des raisons particulières,
il arrivait que le prince faisait faire une évaluation extraordinaire des
monnaies, à l’usage de quelque bonne ville du pays 2. Il pouvait alors en
résulter que ces monnaies n’avaient pas partout la même valeur; aussi
voyons-nous, en 1 5 6 7 , le métier des drapiers demander qu’elles aient le
même cours à Maestricht et à Visé que dans la cité 3.
Les cris étaient proclamés à son de trompe et mis en garde de loi au
perron de Liège, en présence du grand maïeur ou de son lieutenant et de
deux échevins S Des tarifs ou placards, qu’on affichait à la porte de Saint-
Lamberl (1 4 8 8 ) et en d’autres endroits publics de la principauté, les faisaient
connaître ensuite aux habitants et spécialement aux nombreux changeurs
du pays 8.
Les édits monétaires contenaient en outre certaines règles destinées à faciliter
les transactions et à empêcher la sortie des espèces de bon aloi. Toutes
ces prescriptions étaient sanctionnées par des peines qui variaient selon les
circonstances.
1 Conclusions capitulaires, année 1583 et autres.
2 Dépêches du conseil privé, année 1625, reg. 42, fol. 48.
3 Recès de la cité de Liégè du 3 juillet de cette année.
4 L’ordonnance de 1358 sur le paiement des cens, véritable édit sur la valeur des monnaies,
fut déjà publiée de cette manière. (Pièces justificatives, n° VI.)
3 Le plus ancien de ces placards qui nous soit parvenu, est actuellement conservé
à l’université de Liège (fonds Capitaine). C’est un imprimé xylographique, en caractères
gothiques, avec -figures de monnaies. Il est intitulé : La evaluadon des deniers que ors et
en avant auront cours au pa ys de liege. laquele est ordonnée, de p ar levescque de liege et du
commuyn conseyl. pour le profyi du pays — fayt en lan. M.CCCCÇ.XI. au moys de janvier .
L. de Vlierden publia un recueil de ces ordonnances, intitulé : Edicts et publications des
monnoyes forgées et lesquelles ont eu cours par les Pays et Principaullé de Liège, dez l'An 1477
jusques à l'An 1623 courant. Liège; petit in-4°. Une seconde édition de cet ouvrage parut
en 1675, avec un supplément jusqu’en 1661. On y trouve un « Cry fait à Huy, l’an 1489 »,
et un « Cry fait à l’assemblée des Estais, l’an 1512 ». Un autre, publié par d e R am , Analecta
leodiensia, est intitulé : « Cry proclamé en le fore (foire) à Liège », le 26 septembre 1486.