
ne ferviroient point à nourrir & à teindre les Polypes
, comme le font les parties colorées qu’ils tirent
des Animaux; mais, les Polypes n’ont pu vivre dans
cès infuüons.
I l paroit donc, par les Expériences rapportées ci-
deffus, que la couleur des Polypes dépend de celle
du fuc nourricier qu’ils tirent des Animaux qu’ils
mangent. On pourrait, peut-être, s’imaginer, que
ce n’ell qu’en apparence qu’ils en font colorés, qu’il
en eft des Polypes, comme d’une bouteille d’un verre
tranfparent, à'travers lequel on voit la liqueur qu’elle
renferme, & qui paroit en avoir la couleur. 11
fuffit, pour fe convaincre .du contraire, d’examiner
avec attention un Polype , après qu’il s’eft entièrement
vuidé de tout excrément, & qu’il s’eft de nouveau
allongé. On voit à l’oe il, que fon eftomac eft
extrêmement rétréci, qu’il ne contient plus de liqueur,
& que la couleur eft dans la peau même. Si
ênfuite, on ouvre le Polype, il eft encore plus facile
de s’en convaincre.
J’a i voulu favoir combien de tems les Polypes con-
fervent leur couleur. J’ai fait l’Expérience avec des
rouges & avec des noirs, tous de la même efpéce.
Après qu’ils ont eu digéré les alimens qui les ont colorés,
je les ai laifle jeûner. J’ai trouvé, qu’au bout
de quinze jours, ces Polypes avoient encore une nuance
, fort reconnoiffable, de noir ou de rouge, quoique
beaucoup plus foible que celle qu’ils avoient eue
d’abord après avoir mangé. Peu à peu, elle s’eft fi
fort affoiblie, qu’au bout de trois femaines, ou d’un
• mois, elle n’étoit pins fenfible : le Polype étoit à peu
près blanc. Mais,
M a i s , comment ce fuc coloré fe répand-t-il dans
la peau des Polypes? Entre-t-il dans des Vaiffeaux,
& fe difperfe-t-il, par le moïen de ces Vaiffeaux, dans
tout le corps? On doit fe rappeller ici, que j’ai dit
dans le premier Mémoire * , que je n’avois pû découvrir
aucun Vaiffeau dans la peau des Polypes. Je
n’ai vu que ces grains dont j’ai beaucoup parlé, & la
matière glaireufe dans laquelle ils font. Il fe peut que
cette matière renferme plufieursVaiffeaux; mais, fup-
pofé que cela foit, j’ôfe dire, cependant, que ce n’ell
pas dans ces Vaiffeaux, que paffe immédiatement le
fuc coloré qui a été extrait des alimens : car cette
matière glaireufe eft toujours blanche, & tranfparen-
te , dans les Polypes mêmes qui ont le plus de couleur.
L e s grains, au contraire, qui fe trouvent en abondance
dans la peau des Polypes, font colorés: c’eft
de leur couleur, que dépend celle des Polypes ; & la
leur dépend de celle du fuc nourricier que ces Animaux
tirent des alimens qu’ils prennent. • Ces grains
deviennent, par exemple , rouges ou noirs , quand
les Polypes ont été nourris par un fuc rouge ou noir.
Ils ont des nuances, plus ou moins fortes de ces différentes
couleurs, à proportion de la force de la nuance
de celle du fuc nourricier, & à proportion de fa
quantité. Enfin, ils perdent peu-à-peu leur couleur,
fi on ne l’entretient, en donnant de tems. en tems des
alimens de même couleur aux Polypes. Que conclure
donc de tout cela, & de tout ce qui a été dit ci-
deffus fur ce fujet *? C’eft que le fuc nourricier paffe
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