J e n’entrerai pas à préfent d'ans un plus grand détail
fur la manière dont un Polype avale fa proie, &
fur l’état de fon corps après qu’il l’a avalée, parceque
j’aurai dans peu l’occaûon de citer des Faits qui me
ramèneront à ce fujet.
A pr è s avoir vu manger des Mille-pieds aux Polypes,
& m’être alluré qu’ils étoient pour eux une
nourriture très convenable, j’en raifemblai en abondance,
pour avoir de quoi nourrir plufieurs Polypes
que je tenois dans des verres. Les foins que je me
donnai pour ralfembler ces Mille-pieds, me fournirent
l’occafion de les obferver dans les folfés mêmes dont
je les tirojs. Je vis des endroits-de ces folfés qui en
fourmilloient. Ils rampoient fur les Plantes, & fur
tous les corps qui étoient dans l’eau, ils les quittoient
pour fe mettre à nager, & pour palier d’une Plante
à l’autre.
J e jugeai facilement alors des expédiens qu’emploient
les Polypes pour fe mettre à portée de leur
nourriture ; je compris, que c’étoit pour cela qu’ils
montoient fur les Plantes, & qu’ils fe difperfoient fur
leurs branches. En effe t, dès qu’ils font parvenus
à une place convenable, il leur fuffit d’alonger leurs
bras, & d’attendre que les Mille-pieds, qui vont &
viennent dans l'eau, les rencontrent en nageant. Lorsque
ces bras font bien étendus , ils occupent un efpa-
ce confiderabler dans lequel un Mille-pieds ne fau-
roit paffer, fans courir grand rifque d’être pris, j Si
un Polype de la troifiéme efpéce dirige fes bras de
tous côtés autour de fa tête, & s’il les étend confide-
rablement, il peut donner un pied de diamètre au
piépiège
qu’il tend pour arrêter fa proie. Il eft alors à
peu près dans le cas de ces Araignées qui fe placent
au milieu de leur toile, & qui attendent que quelques
moucherons donnent dedans. On pourroit aufli comparer
un Polype, à un Pêcheur a la ligne, mais c’eft
un Pêcheur qui fe fert en même tems de plufieurs lignes.
Pendant qu’il eft occupé à retenir une proie
avec quelques bras, & à la porter à la bouche * , les * p l . v i .
autres relient fouvent étendus, & faififfent celles Flg'
qui fe préfcntent *. . : : \ 1 ,■ - * mcn&p.
I l arrive fréquemment, que plufieurs Mille-pieds
font faifis prefqu’en même tems, par les différens bras
d’un même Polype & qu’ils en font dévorés les # Fig. 3.
uns après les autres.
C e n’eft pas Amplement aux Mille-pieds que les
Polypes en veulent lorfqu’ils étendent leurs bras.
Ce font des pièges qu’ils dreffent également à la plupart
des petits Infeûes qui nagent dans les eaux. Ils
arrêtent les premiers qui fe préfentent.
D è s que j’eus remarqué avec quelle voracité les
Polypes mangeoient les Mille-pieds, je jugeai qu’ils
n’étoient pas la feule proie qui leur fût convenable.
Je m’empreffai d’autant plus à connoitre les Animaux
dont ils pouvoient encore fe nourrir, que j’avois de
la peine à me pourvoir d’une quantité fuffifante de
Mille-pieds, pour procurer une abondante nourriture
aux Polypes que j’élevois. D’ailleurs, il falloit
beaucoup de tems pour les raffembler.
J ’ o u v r i s des Polypes, que j’avois tirés de l’eau
raffaftés, & je fis fortir de leur corps de petits Pucerons
qui étoient encore fort réconnoiffables. Il y en
M 3 avoit
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