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plus douter, que la mere ne le pouffe hors de fon
corps, comme un tronc d’arbre pouffe une branche.
On voit diftinâement, que cette excrefcence,
qui eft le commencement d’un jeune Polype , n’eft
qu’une continuation de la peau de la mere ; que cette
peau s’eft renflée, s’eft élevée en cet endroit : &
même, il n’eft pas impoffible de voir, qu’elle forme
déjà un petit tuïau, qui communique avec celui que
forme la peau de la mere, ou , pour parler autrement
, avec fôn eftomac. C ’eft-la ce que mes premières
Obfervations m’ont appris : mais, j’avois trop
d’intérêt dé m’affurer plus pofitivement de ce Fait,
pour m’en tenir là. Je n’ai donc rien négligé, pour
faire des Expériences plus déciftves, fur la manière
dont les jeunes Polypes font unis avec leurs meres.
I l s’agiffoit fur-tout de favoir, fi l’eftomac des
jeunes Polypes communique avec celui des meres.
On doit fe rappeller ici ce que j’ai dit de la ftrufture
* Pag. 50. de ces Animaux*. Leur corps eft percé d’un bout à
l’autre: il forme une forte de tuïau, ou de boïau; &
c’eft ce tuïau, que j’ai appellé l’eftomac des Polypes.
Je me propofâi donc , pour m’affurer de l’étroite
union, qui me paroiffoit être entre un jeune Polype
& fa mere, de chercher, fi les tuïaux, que forment
leurs corps, avoient un trou de communication; fi
l’eftomac du jeune Polype n’étoit, par rapport à ce-<
lui de la mere, que ce que font certains vaiffeaux du
corps humain, qui S’ouvrent les uns dans les autres.
L a première Expérience que je fis, pour parvenir
à mon but, fut de tâcher d’ouvrir un Polype de
manière, que je puffé voir diflinclement le trou da
: com*
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communication,, en cas qu’il y en eût, un, en effet
entre l’eftomac de cette mere, & celui de fon petit
Je choifis un affez grand Polype de la fécondé efpé-
c e , duquel fortoit un jeune , dont le bout pofté-
rieur, l’endroit par lequel il tenoit à la mere, n’avoit
pas encore commencé à s’étrangler, afin que s’il y
avoit- un trou de communication, il fut d’autant plus
fenfible. Je mis ce Polype dans un peu d’eau,
dans le creux de ma main, & je me plaçai de manièr
e , que je pouvois,quand je voulois,éclairer davantage
mon objet, en l’expofant au Soleil. Enfuite,je
coupai, avec des cifeaux, environ la moitié du corps
du jeune Polype. Son eftomac fut alors ouvert, au
bout fupérieur de cette partie, qui reftoit attachée à
la mere, il y avoit une ouverture, par laquelle je regardai
avec, le fécours d’une loupe ; & il me fembla,
qu’en effet , cet eftomac du jeune Polype communi-
quoit avec celui de la mere. Mais, je pouvois me
faire illufion. Il convenoit, pour que je fuffe plus
fûr de ce que je voiois, que cet endroit, où devoit
être la communication, fut davantage éclairé. Je
coupai donc le corps de la mere, de côté & d’autre
de l’endroit d’où fortoit le jeune Polype. Il ne refta
alors qu’une portion cylindrique fort courte, & ouverte
par les deux bouts. Ces deux ouvertures fer-
virent à introduire plus de jour dans la portion qui
reftoit du corps de la mere; & , par conféquent à é-
clairer davantage cet endroit où devoit être l’ouverture
de communication entre elle & le jeune. Je regardai
de nouveau par le bout fupérieur & ouvert de
la portion reftante du jeune P o lyp e , & je vis très
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