
connus ne mouroient pas d’abord après qu’ils avoient
été partagés en deux, ou en plufieurs parties. On
avoit remarqué dans ces parties de la vie & de
l’aétion. Pourquoi n’a -t-on pas penfé à les confer-
ve r, & à les obferver, pour voir s’il ne fe feroit
point, en chacune d’elles, une reproduction de ce
qui leur manquoit pour être un Animal parfait?
C ’eft qu’on a fuppofé, que cela étoit impoffible.
M r. Linnéus, Profeffeur en Botanique à UpfaI,
en rapporte un exemple dans un Programme qui
eft imprimé à la tête d’un DifcOurs qu’il a fait
en T743- Il dit, que dès Païfans de la Province de
Smaland, & d’autres endroits , affurent unanimement
touchant le V e r , qu’il appelle Gordius, que
ü on le coupe en un grand nombre de parties, chaque
morceau conferve fon mouvement, & reprend
une tête, un corps, ou une queue, quand on le
remet dans l’eau. Mr. Linnéus ajoute enfuite, que
les Naturaliftes, aveuglés par les principes qu’ils a-
voient adoptés, ont regardé ce qu’on difoit de ce
V e r , comme une. fable fi ridicule, & fi contraire à
la Nature, qu’ils n’ont pas même fait une feule
Expérience pour le vérifier.
I l eft à remarquer, que ce ne font que des gens
groftiers, & qui ne pouvoient pas être imbus des
préjugés de l’Ecole, qui ont-cru tout uniment, fur
les Faits qu’ils ont vu s , que des portions d’Ani-
maux devenoient des Animaux complets.
L’idée, dans laquelle on a été, qu’aucun Animal
ne pouvoit être multiplié par bouture,.ne pa-
roit propre qu’à faire perdre les occafions de dé-
D E S P O L Y P E S . IF . Mêm. 3n
couvrir la propriété qu’on a trouvée, aux Polypes.,
lorfqu’on les a coupés. Cependant, il eft .arrivé,
par un hazard afles fingulier, que cette idée a beaucoup
contribué à c.ette découverte : car je n’ai entrepris
l’Expérience dont elle a é t é . une fuite ,
que parceque j’ai fuppofé que les morceaux d’un
Animal ne pouvoient pas devenir des Animaux
complets. C’eft ce qu’on peut voir au commencement
du premier Mémoire
D è s qu’on a fçu, que les Polypes pouvoient ê-
tre multipliés par la feétion, on eft revenu du préjugé
dans lequel on a été fi long-tems à cet égard
fur la nature des Animaux. On a effaïé d’en couper
de differentes efpéces , on en a obfervé les morceaux
; & , en peu de tems, comme je l’ai dit ci-
deffus * , on a trouvé plufieurs Animaux qui avoient
la même propriété que les Polypes.
Il y a lieu de fe flatter, que ces découvertes produiront
plufieurs bons effets. Elles doivent naturellement
nous jetter dans une grande défiance à
l’égard de ces régies générales, auxquelles, fi je
puis parler ainfi, on a prétendu borner la Nature,
& qui ne peuvent fervir qu’à mettre obftacle à nos
connoiffances. Elles doivent contribuer à nous faire
penfer, que ce que nous connoiffons, n’eft que
très peu de chofe, en comparaifon du nombre prodigieux
de merveilles que renferme la Nature: que
nous connoiffons encore trop peu de Parties de ce
Tou t admirable, qui eft l’Ouvrage d’un Etre infini
à tous égards; que nous en connoiffons, dis-je,
R r trop
* Pag. 7
& fuiv.
* Mém.
pag. 4.