
C ’e s t , en faifant les Expériences que je viens de
rapporter, que j’ai découvert un Fait remarquable,
dont j’ai déjà fait mention en paffant, & dont je dois
à préfent parler plus au long. En confidérant de jeunes
Polypes, qui étoient encore attachés à leurs mères
, j’en vis un qui avoit lui - même un petit, lequel
eommençoit à fortir de fon corps ; ceft-a-dire, quil
étoit mere, pendant qu’il étoit encore uni à fa mere.
C e que j’admirai dans ce Polype, fut bientôt commun
à plufieurs autres;- & j’eus,en peu de tems,plufieurs
jeunes Polypes-, encore attachés à leurs meres, lef-
quels avoient déjà trois ou quatre- petits, dont quelques
uns étoient même parfaitement formés * : ils
pêchoient des Pucerons comme les autres, & ils les
mangeoient. Ce n’eft pas tout : j ai -meme vu une
mere Polype , qui portoit fa troifieme génération.
Du petit qu’elle produifoit , fortojt un autre petit, &
de celui - ci un troifiéme.
L orsq_ue l’on conûdére une mere chargée de petits,
il faut, pour croire que c’eft un Animal qui multiplie,
en être bien convaincu d’avance; On la prendrait
plutôt pour une Plante, ou pout une Racine.,
qui eft extrêmement ramifiée #.
J e ne décrirai qu’une de ces meres , entre tant
d’autres-, que j’ai eu occafion d’obferver. C’eft celle
qui eft repréfentée dans la Figure 8. de la PL VIII.
’ Elle fournira en même tems un Exemple de la
promptitude avec laquelle les Polypes- croiffent &
multiplient.
C ’ e s t d’un Polype à longs bras dont il s’agit.
Quinze jours après avoir commencé à fortir de fa merei
t e , & neuf jours après s’en etrè feparé, il avoit pour
lé moins, lorfqu’il etoit bien etendu, un pouce & un
quart de longueur. Dix jeunes fortoient en même
tems de fon. corps, & quatre a cinq de ces jeunes
étoient longs d’environ fept à huit lignes. Il y en
avoit huit d’entre eux qui étoient parfaitement formés
, & en état de manger. De plus , cinq de ces
derniers produifoient des petits. De l’un de ces cinq
il en fortoit trois, de deux autres il en fortoit deux,
& enfin, les deux derniers en pouffoient chacun un.
Quelques-uns des Polypes de cette fécondé génération
avoient déjà des bras, & prenoient même des
Pucerons. T ou t le groupe, formé par cette mere, &
par fes dix-neuf petits, avoit pour le moins un pouce
& un quart de long, & un pouce de large. Les
' bras de la mere, de même que ceux de fes petits,
pendoient pour la plupart vers le fond du poudrier.
I l ne s’étoit féparé qu’un jeune Polype, de cette
mere , depuis qu’elle avoit commencé à multiplier.
C ’eft ce qui a fait qu’au bout de quinze jours elle s’eft
trouvée fi garnie de petits. Elle a toûjours été fuf-
pendue à la fuperficie de l’eau., & le verre, dans lequel
elle étoit, a toûjours été bien rempli de Pucerons;
deux circonftances, très propres à prévenir la
trop prompte féparation des petits , & par confisquent,
à fe procurer le fpeélacle de ces Polypes fi
garnis d e jeunes.
O N a déjà pu facilement comprendre, par ce que
j’ai dit jufqu’à préfent, que les Polypes ne multiplient
jamais tant, que lorfqu’ils ont une abondante nourriture
, & qu’il fait chaud. Ces deux circonftances
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