quantité de petits Pofffons , longs d’environ quatre
lignes,le premier ufage que j’en fis, fut d’effaier fi.les
Polypes les mangeroient.
J’e n mis plufieurs dans des verres où il y avoit
beaucoup de Polypes. L ’Expérience m’apprit bientôt
, ce que j’avois d’abord foupçonné : .c’eft que la vivacité
& la force de ces petits Poiffons les mettrait
en-état de faire une grande réfiftance, & je n’ôfai même
prefque me flatter que les Polypes viendroient à
bout d’en arrêter. Les Gardons , c’eft l’efpéce de
Poiffons dont je parle, les Gardons, dis-je, rencontrèrent
bientôt les bras des Polypes en nageant, &
ce fut alors que commencèrent des combats, qui ne finirent
pas tous de la même manière. Lorfque le Poifi
fon ne rencontroit qu’un feul bras de Polype, il arri-,
voit ordinairement qu’il fe dégageoit par une fecouf-
fe vive ; & même affez fréquemment il rompoit le
bras qui le tenoit faifi, & en emportait une partie
avec foi. Le combat finiffoit moins heureufement
pour le Poiffon, lorfqu’il était d’abord arrêté par
plufieurs bras. Les efforts qu’il faifoit pour fe mettre
en liberté, étoient la plupart du tems inutiles, &
ne contribuoient même qu’à l’enlacer davantage dans
les bras de fon ennemi II était facile de remarquer*
que le Polype en faifoit de très grands pour retenir
le Poiffon. Les bras,quil’envelopoient de tous côtés*
étoient fort renflés, ce qui n’arrive guéres que lo r f
qu’fis font de grands efforts : ils étoient fortement
appliqués autour du Poiffon: en un mot, ce que dit
Ovide du Polype marin, peut parfaitement s’appliquer
au Polype d’eau douce dont il s’agit ici, On
didirait
que c’eft de ce dernier que ce Poète parle,
quand il dit: *
Utque fub etquorïbus deprenfum Polypus hojïem
Continet, ex omnï dimijjis parte flagellis.
Q u a n d je vis un Polype qui avoit arrêté un
Poiffon, & qui l’approchoit de fa bouche, je comptai
bien qu’il feroit tout fon poflible pour l’avaler. Il
s’agiffoit de faire paffer dans fon corps un Poiffon long
de quatre lignes, affez épais, & qui ne pouvoit pas fe
replier pour fe ranger dans l’eftomac. Le Polype
qui entreprenoit de l’avaler, ayant été obligé de fe
contracter, par les fecouffes que le Poiffon lui avoit
données en fe débattant, n’avoit alors guères plus de
deux à trois lignes de longueur. Malgré tout cela,
la plûpart des Polypes qui ont arrêté un Gardon,
font venus à bout de l’avaler. Quand un Polype à
longs bras en avaloit un, cette portion étroite de fon
eftomac, qui forme la queue, étoit obligée de s’ouvrir,
& recevoit une partie de la proie. Un Polype, qui
avoit avalé un Poiffon, étoit difficile à reconnoître.
Je fuppofe , par exemple, qu’il ait avalé la queue la
première, on voioit alors les bras contractés à l’extrémité
de la tête du Poiffon * ; c’eft-là ce qui paroif-
foit le mieux. La peau du Polype * étoit fi parfaitement
tendue & appliquée fur celle du Gardon, qu’on
le voioit diftinCtement à travers & que fouvent, fi
on n’avoit pas été au fait, on auroit pu croire qu’on
ne voioit qu’un Poiffon, qui avoit à l’extrémité antérieure
des barbes de quelques lignes de longueur.
O C e
* Metam,
Uv. 4.
* PL. VIL
Fig. 3* « Ç.'i, a c, ae,
* a b,
* Fig. 3#