celles do l'adulte sont toujours d'un prix très-clevii, ce qui est probablement cause
que les indiyidus dans le développement parfait sont extraordinaircment rares^ et que
leur dépouille complète se voit rarement dans les musées.
La carapace est plus oblougue et plus étroite que celle des autres espèces; elle est
terminée en pointe lancéolée vers l'extrémité postérieure. L'arète dorsale est trèssaillante.
Les lames, qui revêtent la carapace, ne sont pas soudées les unes aux autres
à leurs bords, mais fixées à leur base seulement dans la cuirasse, et se couvrent
les imes les autres comme les tuiles d'une toiture, conformation particulière à cette
espèce, et dont on a emprunté la dénomination d'imbricata. Ces écailles sont,
dans les jeunes individus, plus épaisses que celle des adultes chez les autres espèces;
leur teinte est d'un brun-foneé marbré de jaunâtre ou couvert de zig-zags. Le nombre
des écailles dont la carapace est garnie, est le même que dans la Cbelonia
v i r i d i s ; mais celles du dos sont de forme rhomboïdale, à pointes et arêtes saillantes;
celle de devant sont de forme triangulaire; les latérales se distinguent par
leur extrémité postérieure en pointe et par leur forme de rhomboïde; les marginales,
disposées eu dents de scie, ont leurs angles postérieurs très-aigus. Les lames du
plastron ont les mêmes proportions que celle du Chelonia viridis; elles sont aussi
imbriquées ou en tuiles; celles du milieu sont plus larges et plus courtes, les latérales
plus longues et plus étroites, la paire postérieure plus carrée que chez le Cbel.
v i r i d i s : la seconde paire ressemble, dans cette espèce, aux autres lames, tandis qu'elle
s'avance beaucoup plus vers le milieu du plastron dans le Cliel. vi r idis. Les nageoires
antérieures ont moins de longueur que dans les autres espèces; elles sont, comme
celles de derrière, toujours armées de deux ongles, souvent très-émoussés, quelquefois
peu appai'cns, ou même manquent totalement dans plusieurs individus, soit accidentellement
soit par quelque lésion. Cette observation est également applicable à
tous les Cbéloniens proprement-dits; car le nombre normal est constamment de
deux ongles, à toutes les extrémités.
La couleur du fond des extrémités est d'un jaune brunâtre, mais les grandes taches
sont d'un brun noirâtre; elles s'étendent sur toutes les parties et dominent quelquefois
tellement, que ces parties paraissent être d'une teinte uniforme et foncée.
La tête est moins large et plus longue que chez la T o r t u e f ranche (Chel. viridis)
mais ses dimensions relativement à celles du corps sont les mêmes dans les deux espèces.
Un museau très-étroit, cflllé et allant en pointe distingue celle-ci de la manière
la plus caractéristique, tellement que les navigateurs anglais, frappés de la ressemblance
de cet oi-gane avec le bec d'un oiseau de proie, lui ont donné la dénomination
de l lawksbi l l . La forme et la distribution des lames de la tête sont à-peu-près
les mêmes que dans le Chel. viridis, mais les nasales sont séparées en deux paires.
Quelquefois les deux frontales sont réunies, comme dans l'individu, dont nous avons
fait figurer la tête. La structure des mandibules ressemble plus ii celle de la
C a o u a n n e (Chel. eephalo), mais elles sont plus aiguës, plus étroites et se courbent
un peu plus l'une vers l'autre. L'enveloppe cornée n'est munie d'aspérités qu'à
sa faee interne.
Le squelette offre, à quelques modifications près dans les dimensions, peu de différence
avec celui des autres espèces congénères; cependant la petitesse des os en
fourches et de l'omoplate est très-marquante. Nous avons dessiné au trait, planche
15
6 fio- 4 le crâne d'un individu à l'âge moyen. En le comparant à ceux des autres
ChéToniens proprement dits, figurés sur la même planche, on se convaincra
que exception faite des formes, il diffère très-peu de celui du Chel viridis; mais
k s changemens de forme dans les dimensions relatives, que subit la tête de cette espèce
suivant les différens états de la vie, sont du plus haut intérêt pour la science. Dans
l'adulte le museau est beaucoup plus aigu que ne l'indique la tête, planche 5. fig.
l et 2 'provenant d'un individu à la période de l'âge moyen, rapporté du Japon
par Mr. von Siebold. Chez des individus plus jeunes encore, le bord antérieur de
la mâchoire supérieure descend presque perpendiculairement, à-peu-près comme le
montre la tête du Chelonia eephalo pl. 4. fig. 2. Enfin dans les très-jeuncs sujets,
ce bord descend des narines oii il forme une pointe saillante, dans une direction
contraire à celle que nous avons décrite dans les adultes, c'est-à-dire .en arrière.
Il est vrai, que l'on remarque dans toutes les espèces de ce genre un développement
de formes à-peu-près semblable, mais chez aucune d'elles ces changemens ne
sont si frappans, que dans celle dont nous nous occupons ici. Cette particularité est
probablement cause, que Laeépède a commis l'erreur de publier le jeune comme une
espèce distincte, et de l'introduire dans les systèmes sous la dénomination de Tortue
n a s i c o r n e : indication rapportée depuis par les auteurs contemporains, tantôt à l'espèce
du présent article, mais souvent comme espèce distincte, ou dans les synonymes
des aiitres tortues du genre. L'exiguité du museau dans les jeunes individus fait que
la tête, dans cet âge, a l'apparence d'être très-grosse; les lames de la carapace ont
dès-lors acquis beaucoup de consistance, mais la disposition imbriquée est encore peu
sensible; chaque lame est munie d'une protubérance longitudinale très-prononcée, de
sorte que l'ensemble forme trois lignes saillantes entrecoupées, qui s'étendent longitudinalement
sur toute la carapace.
Il parait que les couleurs de la carapace de cette espèce sont moins sujettes à varier
que chez le Chel. viridis; la disposition des teintes en rayons s'est offerte constamment
la même dans tous les individus que nous avons pu exanainer; on observe seulement
que, des deux couleurs principales, l'une ou l'autre prédomine sur les écailles.
Les difficultés inséparables de l'examen des parties molles sont peut-être la cause
que cette étude a été négligée, aussi est-il bien rare de trouver des individus conservés
à l'esprit de vin dont les parties intérieures ne soient pas décomposées.
Comme les intestins de ces jeunes individus ont encore peu de consistaiice, ils sont
souvent distendus outre-mesure par les matières à demi digérées et dures, dont ces
animaux font leur nourriture, ce qui rend leurs formes très-dilficiles à déterminer.
Dans les jeunes individus, la vahe du pylore est très-peu apparente, et on n'aperçoit
absolument rien des plis nombreux des parois de l'estomac, tels que nous les avons
décrits chez le vieux Sp b a r gis. La surface interne du duodénum est garnie de
nombreuses cellules à parois très-minces, qui ne ressemblent nullement à celles du
vieux Sphargis, si remarquables par leur texture spongieuse. Nous présumons que
ces organes subissent des changemens considérables selon l'âge, et que ces parties
se ressemblent peut-être dans les adultes de toutes les espèces de Tor tues de mer.
Il serait d'un grand intérêt pour la science, que des naturalistes, à même d'étudier
ces animaux sur des sujets dont les viscères n'ont pas subi do lésion, voulussent s'occuper
de leur anatomie.