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recherché de couleurs. C'est la patrie de ces beaux Faisans C à taille svelte et
ëlégante, à queue excessivement alongée, dont les peuples supersticieux de ces contrées
interdisent l'exportation par certains motifs religieux, et dont ils se plaisent
i\ reproduire les images en or, en argent et en soie, sur leurs étoffes de luxe; les
papiers de meuble et leurs soieries de prix portent aussi le plus souvent les figures
assez exactement rendues de ces beaux oiseaux, qui font l'ornement de leurs bassecours.
Parmi les R ept i l e s se font remarquer quelques espèces dignes de fixer l'attention.
La Salamandr e gigantesque. Triton japonicus, porte dos formes bizarres:
ime tète extrêmement large et déprimée, un corps applati mimi d'une queue
en forme de large aviron, le tout porté par des pieds très-courts ; elle vit dans
les eaux limpides des torrens. En Crustacés maintes formes extraordinaires; parmi
lesquelles on distingue une espèce nouvelle d'une circonférence de plusieurs pieds,
M a j a Kaempferi , dont les bras des mâles ont jusqu'à quatre pieds de longueur;
on dit, que ce Ci'uslacé est redouté des babitans par les blessures graves, qu'il est
en état de faire au moyen de ses fortes serres. En Insectes, on trouve au Japon des
C o l é o p t è r e s d'une grande dimension et d'une rare beauté; une seule forme nouvelle
a été trouvée dans la famille des C a r a b i q u e s , elle a reçu le nom de Lagenosoma
et est remarquable par son thorax alongé.
D'après cet exposé rapide, qui a pour but de fournir ime exquisse du gisement
des terres, comprises sous le domaine plus ou moins direct des possessions néerlandaises
de l'Inde et des richesses en histoire naturelle, que le gouvernement se trouve
à même de pouvoir explorer au profit des sciences et des arts, dans des contrées
presque totalement neuves pour toutes les branches d'étude; il est de la tâche d'uue
puissance maritime en possession d'aussi vastes colonies, situées sous les régions les
plus productives et les mieux dotées par la nature, de concourir, par des missions
scientifiques et des expéditions maritimes, à la détermination plus exacte de ces
terres, et à la conaissance plus parfaite des richesses qu'elles nous cachent encore
dans toutes les parties du domaine de l'histoire naturelle: ce gouvernement possède
les moyens à sa portée de se signaler avec honneur à la postérité, comme ayant
contribué pour sa part à l'exploration du globe, et comme ayant fait participer les
autres nations aux découvertes scientifiques exécutées par ses ordres. Le but qui le
dirige dans ces entreprises doit être de reculer de plus en plus les bornes de la civilisation,
d'étendre le cercle de la science et de procurer à l'industrie des matériaux
nouveaux. Il n'appartient plus à nos émules, aux nations voisines, de nous
fournir comme par le passé des relations scientifiques sur nos possessions coloniales,
de nous faire connaître les productions de ces pays et de se glorifier des découvertes
faites sur notre sol: sachons nous servir de ces dotations remises entre nos mains;
qu'elles tendent désormais au bien-être et à la gloire de la patrie; que ces précieuses
cultures des épices, jadis le monopole de quelques négocians, ne nous fassent point
prendre de vue la civilisation des peuples et la gloire nationale; mais que le noble
{!) Phasianus superbus Lalh. Ind. sp. 2. — P. vcneratus. Tcmm. P]. col. 485, — P. Amhcrsl i i , Lînn.
•ansact. — P Tersicolor. Tem. Pl. 486 et 403.— P. Scimmcrini j i i . Id. pl. 487 et 438.—Transact P. n y c t l i e r a e r u s ,
t o r q u a t u s , pictus, etc
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cortège scientifique puisse continuer d'accompagner nos expéditions maritimes, et que
par ce moyen, nous élevions sous l'égide de la prospérité mercantile un monument,
digne de prendre rang dans les annales des sciences.
En émettant ce voeu, je ne désire pas qu'on puisse me soupçonner de vouloir
adresser le moindre reproche à notre gouvernement colonial de l'Inde; au contraire,
pouvant apprécier peut-être mieux que tout autre tout ce qui a été fait pour l'avancement
des sciences dans ces contrées, je n'ai d'autre but que celui de ne point
laisser tiédir l'ardeur, par la pensée, qui, parmi-nous, rencontre trop souvent des
coryphées, qu'on a déjii beaucoup accompli! Afin donc, que ceux qui prennent
une part sincère à ces progrès puissent juger, par les moyens mis en oevivre,
jusqu'à quel point on en est venu dans les tentatives des recherches scientifiques,
j e me permettrai de terminer ce mémoire par un aperçu des travaux de nos naturalistes
voyageurs.
Convenons, que depuis la paix maritime et la restauration qui en fut la suite,
ce pays a repris son rang, non seulement parmi les nations, mais aussi au nombre de
celles qui se sont empressées de reculer par tous les moyens les bornes de l'esprit
humain ('); témoia, pour l'étude de la nature, tout ce qui a été fait dans cette
branche d'investigation dans nos colonies en Amérique, les naturalistes salariés envoyés
en résidence au Cap de Bonne-Espérance et à Saint-George d'Elmine sur la
côte occidentale d'Afrique: ses vues bienfaisantes se sont particulièrement étendues
vers les possessions dans l'Inde et au Japon. Après la conclusion de la paix, M. le
professeur Reinwardt fut le premier des savans européens qui arbora le pavillon des
sciences sur la corvette de S. M. The Experiment; elle sillonna les mers des
Moluques, rangea les côtes de Célèbes, aterra sur deux points de cette lie, relâcha
à Amboine, à Ternate et à Timor, et jeta l'ancre devant des iles peu connues du
grand archipel. Java avait été exploré en grande partie par ses soins; la géologie
de cette île étudiée et plusieurs de ces volcans examinés avec nue persévérance
courageuse, qui atteste à quel point ce savant mettait d'intérêt et de zèle à bien
remplir le but de sa mission; c'était répondre dignement à tout ce que fit pour la
mission scientifique de M. Reimvardt, la protection vraiment libérale et grandiose
de notre respectable gouverneur général de l'Inde, S. E. le Baron van derCapellen.
Après le professeur Reimvardt, M.M. Kubl, van Hasselt, Blume et van Raalten,
reprirent les travaux où les avaient laissés leurs prédécesseurs. Un désir trop immodéré
de se signaler promptement fit perdre de vue aux deux premiers, les précautions
nécessaires pour des Eiu-opéens, exposés tout-à-coup à toutes les influences
malfaisantes du climat des tropiques; ils périrent victimes de leur zèle poussé jusqu'à
l'imprudence. Leurs collections, d'une richesse qui a droit de surprendre, lorsqu'on
compte le peu de tems employé à rassembler cette quantité vraiment immense de
matériaux, sont parvenus au Musée des Pays-Bas, peu de tems après leur mort.
M. van Raalten, compagnon do ces deux jeunes naturalistes, poursuivit encore, sous
ces climats brulans, le fil de leurs travaux; échappé par le plus heureux des hasards,
à l'attaque redoublée d'un Rhinocéros blessé qui le lança sept fois dans les airs.
(1) Voyez aussi le discours prclimiiwire du 1= volniiic de mes Monojraplùes de Mammalogie.
y