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preuve contradietoire à celle apparente probabilité^ même, à défaut de l'évideuce
que nous offre aujourd'hui la disparité très-remarquable, dans le rtgue animal, de
ces deux grandes portions de l'Asie australe.
En effet, rien de commun, même dans les classes de ces géants des animaux,
entre ces deux portions aussi rapprochées dn globe, situées sous le même parallèle.
L ' E l é p h a n t cl le Tapir vivent à Sumatra et le premier dans toute l'Inde sans
qu'on y retrouve le second; mais l'un et l'autre sont inconnus Java. Le Rhinoc
é r o s bicorne de Sumatra diffère considérablement de ce colosse unicorne de l'Inde,
comme aussi de l'autre espèce unicorne de Java, cxelusivemcnt propre il cette dernière
île. Le Bos baiiteng ou taureau sauvage de Java, qu'il faut distinguer du
Buffle aujourd'hui domestique ou Buffle caribau, originaire probablement de
l'Inde et dont Bos f rontatus parait être le type primordial, n'est pas le même que
celui des forêts antiques de Sumatra, où se trouve Bos arni , avec ses cornes de
dimension gigantesque: cette espèce de Bos banteng paraît même différente du
Gaour (Bos sylhetanus) des monts Himalaya, dont on a bien voulu faire récemment
une seconde espèce nouvelle, sous le nom de Bos Diardi i , sur un sujet envoyé
de la Cochinchine. Ces espèces trouvées i\ l'état sauvage, diffèrent essentiellement
du Caribau ou Karabau, race, aujourd'hui partout domestique, et ii laquelle
nous n'hésitons pas à rapporter, ainsi que je viens de le dire, le Bos frontatus
qui vit, à l'état sauvage, dans les forêts de l'Inde. Parmi les Cerfs se distingue
en première ligne une très-petite espèce nouvelle d'Axis, notre Cervus Kuhlii,
propre, exclusivement au petit groupe d'iles connues sous le nom d'îles Bavians, et
qu'on ne trouve pas dans les deux grandes, Java et Sumatra; mais les vastes forêts
de cette dernière nourrissent les Cervus russa et h ippclaphus , deux espèces de
forte taille, beaucoup plus grandes que notre cerf sauvage d'Europe: la première
de ces espèces est aussi nombreuse à Java, mais la seconde ne s'y trouve point.
L'espèce d'Ours de ces contrées, Ursus malaianus est la même à Sumatra, à
Bornéo et à Malacca, mais elle ne vit pas à Java. On assure, mais en ceci j e ne
saurais me permettre d'être garant du fait, que les deux espèces très-distinctes de
cochons de Java, Sus verrucosus et Sus vi t tatus <-), diffèrent l'une et l'autre
d'une troisième espèce propre à Sumatra, mais que je n'ai pas eu occasion de voir eu
nature; Sus verrucosus paraît vivre aussi sur le continent de l'Inde, car, c'est bien la
même que cette espèce Asi-chinoise dont j'ai examiné quelques dépouilles. L'Orango
u t a n ou l 'homme des bois, notre S imi a satyrus, vit à Sumatra et a Bornéo
(1) M. Ilorsfield a essayé de porter quelque doute à cette assertion, en formant deuï espèces, Ursus malaianus
et euryspi lus , qu'il propose d'isoler des autres ours, l^otre Musée peut, au besoin, lui fournir les preuves évidentes
qui servent à constater l'identité de ces deux espèces nominales, dont il forme le genre Helarctos.
(2) Sus v e r r u c o s u s peut être caractérisé de la manière suivante. Taille très-forte, têtes très-alongée, munie
sur les joues d'une forte protubérance calleuse; jeux petits, éloignés, de plus du double de longueur, de la pointe
du mtillle que des oreilles; front concave; des favoris touiTns, crinière forte à poils longs, raides et trifurqés vers le
bout. Pelage abondant et long; en dessus noirâtre varié de poils jaunâtres ; en dessous d'une teinte jaune roussâtre.
S u s v i t t a t u s a la taille d'un fort marcassin d'Europe. Tele peu longue, à museau obtus, sans aucune protubérance
ni favoris; yeus plus grands que v e r r u c o s u s , à-peu-près à distance égale du muflle et des oreilles;
front un peu bombé, très-étroit; crinière peu développée; pelage court, très-rare, à claire voie, et d'un noir
t e r n e ; une bande blanclie plus ou moins distincte du nez aux joncs.
(3) On a allégué erronément, dans un journal anglais, que l'Orang de Sumatra est différent de celui de Bornéo.
IX
mais ne se trouve pas à Java; l'espèce d'IIylobate et celles des Semnopithèques
de Java, I lylobates leuciscus et Semnopi thecus mitratus, maurus et aurat
u s ou Pyr rhus, ne se trouvent pas i\ Sumatra, patrie d'im assez grand-nombre de
quadrumanes de ces deux genres. Des trois espèces connues de Galéopi thèques, la
plus répandue et pour ainsi-dire la seule bien connue, se trouve dans tout l'archipel
depuis Java jusqu'à Timor et Amboine : c'est celle qu'on nomme Galeopithecus
v a r i e g a t u s dont le Galeopithecus rufus des catalogues n'est point le mâle,
mais bien le mâle du Galeopithecus marmoratus qui vit à Sumatra et pas à
Java; la troisième, sous le nom provisoire de macrourus n'est connue que par
le squelette: des cinq espèces du genre Ilylogale (Cladobates de F. Cuvier
ou Tupaia de Rallies), une seule est propre aux deux îles et trois autres encore
le sont à Sumatra, sans qu'elles habitent Java. Parmi les espèces très-nombreuses du
genre Sciurus , on en voit seulement deux qui vivent dans l'une et l'autre île. Dans
les autres classes des Rongeurs, peu étudiées jusqu'ici, se trouveront sans-doute
quelques espèces à désigner. Nous savons maintenant qu'il y a différence spécifique
entre les Rousset tes, les P a chysomes et les Chauves-souris de ces deux îles
voisines, tandis que les mêmes espèces vivent c\ Bornéo et à Sumatra: cette vaste
portion de la Sonde est particulièrement riche dans les espèces des genres Ilylobates
et Semnopi thecus ; les premiers, d'une alliu-e extrêmement lente à terre, ont les
arbres de haute futaie pour demeure habituelle; c'est là que leur agilité se fait remarquer;
parcourant les grandes forêts qui leurs servent à la fois d'asile, leurs fournissent
la nourriture et leurs donnent la faculté de fuir au loin; c'est en s'élançant
d'une branche à l'autre et en se promenant, par bonds et par sauts, sur la cime des
arbres qu'ils s'éloignent, en peu d'instans, à des distances très considérables; modèles
d'amour maternel, ces animaux ont fait, maintefois, couler les larmes des yeux
du chasseur, obstiné à leur poursuite, tant la tendresse des parens pour leur progéniture
ressemble, dans ses expressions et dans les soins empressés et délicats dont
ils sont l'objet, à celle que l'espèce humaine prodigue aux faibles créatures qui lui
doivent le jour. Une des espèces de Semnopithèqrie, le c r i s tatus , habite les
forêts en plaines, où il se tient caché sous le feuillage; tandis que les autres espèces
encore plus élancées et grêles que le c r i s tatus , vivent dans les forêts en montagnes,
où elles se nourrissent des fruits des figuiers sauvages et se promènent dans ces
arbres de haute futaie en s'élançant par des bonds et des sauts à des distances dont
la portée paraît iucoucevable ; tant est puissante la force des muscles de leurs membres.
Chez les S emnopi thèques qui sont, dans l'ancien continent, les représentans
des Atèles et des Alouates du nouveau monde, cotte force musculaire ne trouve
point tme auxilaire dans la queue longue et grêle, qui n'est point prenante comme
chez ces singes américains, dont la queue leur sert de cinquième membre et
facilite aussi, par la force préhensile dont l'extrémité est douée, l'élan qu'ils se donnent
avec plus de force par le btilancement qui accompagne le saut. Les Tapirs
(1) Le G a l e o p i t h e c u s ma c r o u r u s , nommé provisoirement ainsi, paraît devoir former un genre distinct,
servant à lier plus étroitement ce genre avec celui de L emu r (Maki). Nous possédons le squelette de ee rare anim
a l ; malbeureusement il manque de crâne et la dépouille est encore inconnue. Je p résume, que l'espèce vit
•i Ceylan.