Quelque énorme que soit la distance entre le Japon et l'Europe centrale, nous ne
trouvons dans ces parties éloignées de notre globe aucune différence essentielle, quant
à. la forme du plus grand nombre des animaux dont ces contrées sont peuplées.
L'espace immense qui les sépare l'une de l'autre ne permet pas de penser k une migration
successive, bien moins à une migration périodique, qu'au reste on ne pourr
a i t à la rigueur soupçonner, que dans la seule classe des oiseaux, mais qu'il serait
ridicule de leur rendre applicable. Il est donc plus probable que les élémens qui ont
exercé leur influence sur la création ont reproduit les mêmes types l'extrémité orientale
de l'Asie et dans l'Amérique du nord, comme sous le climat de l'Europe; sans
toutefois nier, que les espèces puissent avoir subi des altérations locales et se montrent
sous de légères variétés; ce qui n'empêche pas que les dissemblances, par lesquelles
ces variétés sont caractérisées, ne soient pas assez tranchées, pour qu'on puisse
les isoler des types et les classer comme espèces réellement différentes. En formant
des espèces de chaque variété produite par les lieux ou le climat, il n'y aurait plus
aucune limite dans la distinction des êtres; l'espèce tj'pe d'organisation, dont l'existence
est due au pouvoir créateur, se trouverait par suite de ces combinaisons arbitraires
mise sous la même influence, que notre manière de voir exerce sur la formation
des coupes génériques, qui sont totalement le résultat de conceptions artificielles,
différemment interprêtées, suivant le principe plus ou moins surchargé de
minuties, qu'on s'est formé comme point de départ et qu'on a adopté pour base,
selon lesquelles les coupes génériques sont divisées.
Comme c'est principalement à la taille et aux couleurs que ces variétés locales sont
restreintes, il faudrait, pour les distinguer nettement, connaître les résultats des
combinaisons qui ont pu influer sur l'organisation, et savoir comment il se fait que,
telle espèce perd ou gagne dans ses dimensions; qu'elle est parée de couleurs plus
vives, ou qu'elle affecte des teintes moins pures selon les climats où elle se propage.
Vouloir tenir note de toutes ces légères différences locales pour les faire servir à
multiplier les espèces, surtout lorsque ces différences sont à peine appréciables, ce
serait le moyen le plus sûr d'entraver pendant longtems la marche des études, sans
qu'il en résultât aucun but d'utilité scientifique propre à compenser l'inextricable
confusion, qui serait nécessairement la suite de toutes ces indications de nuances aussi
subtiles que légères, de ces formes dont les différences sont à peine appréciables à la
vue et qui sont inexplicables par des mots; d'un mesurage minutieux réduit en millimètres;
en un mot sur des formes caractéristiques qu'il faut chercher le scalpel ¿Y la
main et l'oeil armé d'une loupe. Lorsqu'au contraire, dans l'ensemble des formes de
ces espèces nominales, on ne pourra nier qu'on reconnaisse clairement et de prime
abord tous les caractères principaux qui sont propres au type de l'espèce unique et
véritable.
Nous croyons avoir résumé la question dont le but tend à prouver la ressemblance
ou du moins l'analogie très-prononcée, entre le plus grand nombre des animaux qui
vivent sous l'influence d'une même latitude.
Il serait également intéressant, d'offrir à côté de ce tableau esquissé à grands traits,
celui des différences très notables qu'on observe dans la distribution géographique des
animaux, selon les degrés de longitude oii les espèces se trouvent rcjiarties sur notre
sphéroïde terrestre. Cette matière riche en faits et en conséquences, toute intéressante
qu'elle nous semble, nous entraînerait trop loin du but spécial de ce mémoire, c'està
dire , de la description des mammifères du Japon.
Toutefois, nous ne bornerons pas ce travail à la simple description des espèces qui
sont nouvelles, comme à l'indication plus succinte encore de celles qui sont connues.
C'est en les rapprochant de leurs congénères, particulièrement de celles qui vivent
sous une latitude correspondante en Europe ou dans l'Amérique septentrionale, qu'elles
auront plus d'intérêt pour la science (1).
S I N G E S .
Envisageant le Japon sous le point de vue de sa position géographique, on peut à
bon droit être surpris de l'existence d'un mammifère quadrumane dans ces îles.
L'e.spèce propre k cette partie du globe (Inuus speciosus), a une analogie parfaite
avec celle africaine (Inuus ecaudatus), et qui est aussi la seule sud européenne
connue; elle vit en Andalousie, à peu près sous le même parallèle que le Japon, mais
à distance si grande de son congénère, qu'il paraît surprenant de voir les mêmes
formes reproduites d'un bout à l'autre de cet hémisphère. Toutefois il faut convenir,
que les mêmes attributs caractéristiques se retrouvent également chez un petit nombre
d'espèce de l'Inde et de ses archipels équatoriaux. Notre Singe japonais se trouve
déjà décrit et figuré, mais c'est à tort qu'on l'indique comme un habitant des îles de
la Sonde. Il vient se ranger dans le genre Inuus, petit groupe admis sur le type de
notre magot européen et dans le quel on ne peut classer convenablement que les cinq
espèces suivantes, savoir: I. ecaudatus, speciosus, maurus, nemestrinus et
r h e s u s .
Les Japonais (selon M. de Siebold) assurent, qu'on ne trouve pas d'autre quadrumane
dans leur pays, et que le speciosus n'y est répandu que dans les parties les
plus méridionales de leur territoire.
MAGOT A FACE ROUGE. (INCUS sPEciosns).
PiANcnES I et II.
Ce singe est figuré dans le troisième volume de l'histoire naturelle des mammifères
de F. Cuvier, sur un dessin envoyé de l'Inde par Duvaucel et Diard, et que l'auteur
cité publie comme étant une espèce due aux recherches de ces deux naturalistes ; de
plus, il donne dans le texte descriptif, les Indes orientales pour la patrie du Speciosus.
Cette double méprise s'est introduite dans tous les catalogues méthodiques; son origine
est due i\ l'omission de tout renseignement sur l'habitat de l'animal qu'on a fait
dessiner. Le fait est, que le dessin en question repose sur la vue d'un individu du
( I ) l'ngc 4 ligne 14 et dans la noie se trouve mille carré, lisez milles carrés.