
que les habitans des lieux rudes, maigres
et montueux, sont beaucoup plus industrieux
et plus actifs à tirer parti de leurs
terres, que ceux qui vivent dans les pays
de plaine dont la culture est facile, et dont
le terrain est gras et fertile. Les Tirolois
par exemple, les Savoyards et les habitans
des Alpes ne laissent pas un coin de
de terre inculte, pas une pente, pas un
sommet de montagne, pas un rocher tant
soit peu couvert de terre, ( qu’on y porte
même au besoin) pour en retirer ensuite
un produit maigre et une bien mince subsistance
, qui sont les seuls résultats de
travaux rudes , difficiles, et toujours
renaissans.
Telle est aussi l’industrie des Auvergnats
en France. Après s’être livrés aux fatigues
les plus pénibles pour tirer parti de leurs
terres escarpees , on les voit descendre
en troupe de leurs montagnes, et aller
en France et en Espagne seconder de
leurs bras vigoureux les cultivateurs mous
et lents des plaines , puis retourner dans
leurs
A U M O N T A M Ï A T A .
foyers porter à leurs familles le prix de
leurs sueurs. Nous voyons d’un autre
côté la plupart des laboureurs des plaines
fertiles tracer nonchalamment de légers
sillons dans leurs champs ; e t , peu jaloux
d’augmenter les ressources de l’industrie e
de la culture, borner leurs soins aux endroits
de leur territoire qui sont les plus faciles
et les plus commodes, pour attendre dans
un repos parfait la maturité de leurs fruits.
Que leurs bleds soient endommagés par de
mauvaises herbes ou non -, que leurs vins
soient acerbes, foibles ou passables, peu
leur importe 5 ils recueillent le tout tel
quil est, et s’inquiètent fort peu de
multiplier ou d’améliorer leurs productions.
On peut dire que les habitans" des
plaines sont les enfans gâtés de la nature ;
cette mère commune fait croître , pour
ainsi dire, spontanément les moissons pour
eux , et leur accorde plus qu’ils ne méritent,
et beaucoup plus que ce que les malheureux
montagnards peuvent espérer de leurs
pénibles et industrieux travaux.
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