
C H A P I T R E X X L
De la culture des châtaiOgniers.
T
1 ia beauté, l’étendue et l’utilité des châ-
îaigneraies que nous avons parcourues,
nous ont donné l’idée de nous informer
<de la manière dont on les cultive, et
dont on les élève dans le pays. Persuadés
que ces détails ne déplairont pas
aux amateurs de l’économie rurale, ne
fut-ce que pour servir de point de comparaison
, j’ai jugé à propos d’en former
un Chapitre séparé, avant de quitter la
région et le pays des châtaigniers.
Les châtaignes forment le plus grand et
le plus important revenu que la nature et
l’art fournissent aux habitans du Monta-
tniata* Tendres ou mûres, fraîches ou sèches,
crues ou cuites, réduites en farine et
empâtées en nicci , en castagnacci, (*) en
( *) Espèce de pâte ferme faîte avec la farine de
châtaigne^
beignets frits, ou réduites en polenta (*),
elles fournissent toujours un aliment sain,
agréable au goût, et facile à digérer. La
polenta sur-tout est l’aliment fayori et
le moins dispendieux du peuple : elle est
si nourrissante, que les gens adonnés
aux ouvrages les plus pénibles, comme
à scier le bois, à manier la hache ou
la pioche , ne mangent pas autre chose
que de la polenta 3 et ne boivent que
de l’eau $ et aussi ils disent en plaisantant
, qu’ils vivent de pain de bois
et du vin des nuées. Avec cela, ces gens,
sont sains , forts, robustes et capables
. (x) Bouillie de farine de'châtaigne faite sur un feu
clair dans une chaudière. Lorsqu’elle a suffisamment
bouilli, on la retire du feu ; on décante une partie de
l’eau qui surnage , et on pétrit la farine avec l’eau qui
reste , en la remuant assez long - temps avec un gros
bâton. On la réunit ensuite toute ensemble en forme
de pain au moyen d’une spatule de bois ; puis on remet
le chaudron sur le feu pour un instant, après quoi
on renverse la polenta sur une nappe saupoudrée
de la même farine, pour qu’elle ne s’y attache pas ,
et on la coupe en tranches avec un fil , car elle doit
conserver une mollesse pâteuse.
T