
des misères humaines, libre, indépendant ;
enivré par une imagination echauffee ?
il me sembloit fouler aux pieds la terre
et la mer ; je croyois planer au-dessus de
tout le genre humain. Tout-à-coup le
jeune berger , en voulant se lever , porta
mal-adroitement le pied sur mon thermomètre
chéri y le bruit qu il fit en le brisant ,
réveilla mon esprit absorbé dans ces belles
visions , et tout mon bonheur disparut
à l’instant.
Je me lève sur le champ en colère j
le berger épouvanté, se sauve en sautant
comme un chevreuil à travers les arbres
et les rochers. Je frémis aussitôt des dangers
auxquels il s’exposoit j je lappellai, 1 invitant
de la manière la plus pressante, à se
rassurer et à revenir a nous . mes cris
furent inutiles, il disparut. J eus donc
ainsi le double regret d’avoir perdu
mon thermomètre excellent, et de ne
pouvoir récompenser ce pauvre enfant
qui nous avoit délivré de si bonne grâce
du labyrinthe où nous étions engagés, et
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qui nous avoit tiré des mains de notre
guide mal-adroit.
La colère que la vivacité de cet air
provoque promptement et appaise de
même, se dissipa comme un éclair.
Après avoir détache à grands coups
de marteau divers morceaux de p eperino,
et noté ou recueilli diverses plantes ^
nous commençâmes à descendre par le
sentier que nous avions examine avec
attention, laissant à notre guide fort humilié
le soin de faire 1 arriere-garde avec
nos chevaux.
Quand nous fûmes arrivés à l’endroit
où nous avions laissé le boeuf déserteur,
nous le cherchâmes en vain. Vraisemblablement
le jeune berger, craignant toujours
que dans ma colère je ne l’eusse poursuivi,
avoit repris son boeuf et s’etoit enfui
lestement. C ’est ce que nous confirma un
autre berger qui se trouva dans les environs.
Cette assurance nous tranquillisa,
car je craignois toujours que ce malheureux
enfant n’eût fait en fuyant quelque chûte
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