Les Européens ont cherché depuis plus d’un siècle
à introduire la civilisation parmi ces insulaires ; des
missionnaires, pendant cette période déjà longue,
ont séjourné sans cesse dans les diverses îles de
l’archipel de la Société et principalement à Taïti. On
est parvenu à donner un commencement d’instruction
à un certain nombre d’individus appartenant
à ces peuples, à leur apprendre à lire et à écrire;
néanmoins, les voyageurs les plus récents ont pu
se convaincre que pour cela l’industrie ne s’était pas
développée chez ces insulaires, que leur civilisation
n’avait pas fait de progrès bien sensibles. Au point de
vue de l’anthropologie ceci a son importance. La civilisation
se développe chez un peuple en raison de la
masse des facultés intellectuelles qui s’y rencontrent.
Lorsqu’un peuple est resté ignorant, tout en portant
en lui des éléments de progrès , il suffit du contact
d’individus plus civilisés pour faire surgir les idées
de progrès , le désir de perfectionnement, le goût du
beau. Quand des relations de cette nature s’établissent
entre un peuple ignorant et des individus instruits
et que ce peuple sait à peine profiter des lumières
qui lui sont apportées, on peut en conclure
que l’intelligence n’est pas susceptible d’un grand
développement chez cette nation. Telle nous semble
être l’histoire des Taïtiens.
Nous n’avons guère vu de crânes de Taïtiens ; une
planche de l’atlas de M. Dumoutier nous donne la
représentation des traits d’un homme, d’une femme
et d’un enfant, probablement une jeune fille, provenant
des sépultures des Taïtiens.
L à , nous remarquons la même forme générale de
la tête que chez les naturels des îles Marquises ; c’est
également une forme pyramidale , plus prononcée
encore que nous ne l’avons vu partout ailleurs dans la
tête d’homme qui porte sur la planche les numéros 4
et 2 ; mais ici l’allongement général de cette tête nous
fait croire à une particularité tout à fait individuelle.
Mêmes rapports entre la hauteur et la longueur du
crâne que chez les Kanaques, et cependant, vue par
le profil, la tête nous paraît plus arrondie chez les
Taïtiens, les pariétaux nous semblent moins déprimés
en arrière. Sous le rapport des proportions
de l’os frontal, comme chez les pré c édents , nous
avons constaté un peu moins de largeur que de
hauteur. La saillie des os maxillaires nous paraît
aussi plus prononcée chez le Taïtien que chez le
Noukahivien. Ceci est très-marqué dans la tête de
femme portant sur la planche XXX les numéros 3
et h. Si l’on mesure la longueur comprise entre l’apophyse
mastoïdienne et l’extrémité du maxillaire supérieur
, on v e r ra , en portant cette mesure sur l ’espace
compris entre les os jugaux à leur inse rtion,
qu’elle est manifestement supérieure à celle que
nous avons reconnue sur de nombreux crânes de
naturels des îles Marquises. Cette différence est aussi
très-sensible dans le crâne d’enfant qui, sur la même
planche , porte les numéros 5 et 6.
De ce qui précède, nous nous trouverions donc